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Alors que l’ONU recense, à travers la planète, 900 « procès climatiques » en 2017, l’historien rappelle, dans sa chronique au « Monde », la genèse des actions judiciaires liées à la pollution.

Chronique « Transformations ». Plusieurs ONG ont annoncé, mardi 18 décembre, qu’elles allaient poursuivre l’Etat français en justice : celui-ci devra probablement répondre devant un tribunal de ses actes, et surtout de ses renoncements en matière climatique. Cette décision n’est pas un coup de théâtre : elle s’inscrit dans le raz de marée actuel du contentieux climatique. Certaines affaires sont d’ores et déjà célèbres : en octobre, la cour du district de La Haye (Pays-Bas) a tranché contre l’Etat néerlandais, obligeant ce dernier à réduire davantage qu’il ne le prévoyait ses émissions de CO2.

Mais ces procès retentissants ne sont que la pointe émergée l’iceberg. Un rapport de mai 2017 du Programme des Nations unies pour l’environnement recensait près de 900 « procès climatiques » à travers le monde, et le chiffre s’accroît chaque jour. Des projets d’infrastructures, des projets miniers, pétroliers et gaziers sont attaqués pour des raisons climatiques. En Colombie, un tribunal a déclaré inconstitutionnelle la recherche pétrolière dans les Andes ; au Pakistan, la justice a suspendu une immense mine de charbon dans le désert du Thar ; en Norvège, Greenpeace poursuit en justice le ministère du pétrole pour s’opposer à des permis d’extraction en mer de Barents, etc. Ce sont aussi des gouvernements attaqués pour inaction coupable : aux Etats-Unis, le Massachusetts poursuit l’Agence de protection environnementale (EPA) pour n’avoir pas limité les émissions de CO2 des voitures neuves. Enfin, au fur et à mesure que la planète se réchauffe, des victimes demandent réparation. Déjà, des pertes de récoltes dues aux canicules, ou des frais d’aménagement dans les communes côtières font l’objet de demandes d’indemnisation.

Face à cette marée montante, le ministre de l’environnement, François de Rugy, déclarait au micro de France Inter, le 21 novembre : « Franchement, vous croyez que c’est dans les tribunaux qu’on va régler le problème du dérèglement climatique ? » A vrai dire, un historien de la pollution répondrait « oui »!

Décret fondateur de 1810

Pour le comprendre, il faut revenir au décret fondateur de 1810 sur les établissements classés. Longtemps lu comme le premier acte d’une législation environnementale, il s’agit en fait de l’inverse. Promu par de grands industriels de la chimie, son objectif était de les protéger des interférences de la police, qui pouvait jusqu’alors facilement interdire les ateliers nauséabonds. Au début du XIXe siècle, les exigences du capital ne tolèrent plus cette incertitude juridique. Le décret de 1810 met certes en place une procédure d’autorisation administrative assez lourde : les usines les plus polluantes doivent être autorisées par le ministre de l’intérieur lui-même. Mais en échange, l’administration garantit leur pérennité en dépit des contestations des voisins. Résultat : ces derniers ne pouvant espérer la suppression de l’usine, ils n’ont d’autre recours que de se tourner vers les cours civiles pour obtenir le versement d’indemnités. Tout au long du XIXe siècle, les efforts – modestes – de dépollution sont réalisés parce que des voisins poursuivent les industriels en justice afin d’obtenir des compensations.


Lire la suite : Jean-Baptiste Fressoz : « La “justice” climatique n’est pas un vain mot »


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Malgré les mises en garde climatiques, l’usage d’un des principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre est reparti à la hausse en 2017, tiré notamment par la Chine.

Si les conséquences n’étaient pas si graves, le pied de nez ferait sourire : alors que la COP24 vient à peine de fermer ses portes en Pologne et de conclure ses travaux par un accord minimaliste, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) publie, mardi 18 décembre, son rapport annuel sur l’état du charbon dans le monde.

Et le constat est dramatique : alors que la consommation mondiale de charbon avait décliné en 2015 et 2016, elle est repartie à la hausse en 2017, d’environ 1 %. « Et ce sera encore très probablement le cas en 2018 », note Keisuke Sadamori, directeur des marchés de l’énergie à l’AIE. Or, le charbon est l’un des plus importants contributeurs au changement climatique : la production d’électricité à partir de charbon émet 45 % du CO2 rejeté dans l’atmosphère au niveau mondial.

« Il y a beaucoup de discussions autour du charbon, mais assez peu de changements », note M. Sadamori. Malgré le fort développement des énergies renouvelables, malgré la baisse du prix du gaz après la révolution américaine du gaz de schiste, le charbon reste l’énergie la plus utilisée dans le monde pour produire de l’électricité. Il y a trente ans, autour de 38 % de l’électricité mondiale était produite à partir de charbon. C’est toujours le cas aujourd’hui, malgré l’augmentation spectaculaire de la consommation mondiale. « Un chiffre inquiétant », déplorait en début d’année Spencer Dale, l’économiste en chef du groupe pétro-gazier British Petroleum.

Les prévisions de l’AIE n’ont pas de quoi rassurer celles et ceux qui voudraient voir un déclin des énergies fossiles. « La hausse devrait continuer autour de 0,5 % par an jusqu’en 2023 », estime M. Sadamori.

Hausse en Inde et en Asie

Pourquoi le monde n’arrive-t-il pas à se désintoxiquer de « King Coal », le roi charbon ? La réponse à cette question se trouve d’abord à Pékin. Un quart du charbon utilisé dans le monde pour produire de l’électricité est brûlé en Chine. La hausse de la consommation d’électricité dans ce pays est pour beaucoup dans cette addiction au charbon.

Même si le pouvoir chinois a largement développé les renouvelables, le gaz naturel et le nucléaire, les besoins de la plus importante population au monde sont tels que le charbon continue d’y pourvoir largement. Le régime a lancé une bataille pour diminuer les effets du charbon sur la qualité de l’air, ce qui devrait conduire à un très lent déclin : selon l’AIE, la demande chinoise devrait baisser de 1 % par an dans les cinq prochaines années.


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Dans une tribune au « Monde », treize PDG de grandes entreprises s’engagent sur une liste d’initiatives qui viendraient en complément des mesures gouvernementales en faveur du pouvoir d’achat.

Tribune. Nous avons la conviction partagée qu’il est urgent que l’économie de notre pays soit plus inclusive, que l’économique et le social aillent de pair, que le tissu social se reconstruise à partir du tissu économique. Bref, que l’économie et la finance qui la sous-tend soient au service de la société.

C’est pour faire de cette conviction une réalité que, en complément des mesures prises par les pouvoirs publics, les décideurs économiques que nous sommes souhaitons nous engager collectivement dès aujourd’hui pour apporter des solutions et pour conforter un contrat social qui doit tous nous unir. Nous entrons dans la phase de consultation qui va s’ouvrir avec une volonté collective et deux engagements forts :

1. Nos entreprises sont actives dans des secteurs de l’économie qui concernent directement les préoccupations exprimées par les Françaises et les Français. Dès 2019, chacune de nos entreprises amplifiera ou mettra en place, avec ses produits et services, des dispositifs spécifiques permettant d’aider au quotidien celles et ceux qui ont du mal à boucler les fins de mois.

2. L’inclusion des jeunes par l’apprentissage, ainsi que la formation continue des salariés sont les socles de protection dont les Françaises et les Français ont besoin face aux craintes exprimées aujourd’hui sur l’avenir du travail. Accompagnée socialement, la transition écologique doit d’ailleurs être un moteur pour développer des compétences et des métiers nouveaux. Nous prenons donc l’engagement collectif d’un effort sans précédent sur ces points : nous allons accroître de 50 % le nombre d’apprentis que nous accueillons en France, pour le porter à près de 35 000 en 2020, et notre effort collectif de formation continue en 2019 et 2020 sera accru de plus de 5 millions d’heures par rapport aux deux années précédentes.


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Les accidents mortels sont la marque d’une dérive par rapport aux objectifs originels du jeu, déplore un collectif de personnalités, dans une tribune au « Monde ».

Tribune. Créé au XIXe siècle par une école privée de la ville de Rugby, en Angleterre, le rugby s’est ensuite érigé au rang de sport référent dans les universités, occupant à la fois les pieds, les mains… et le cerveau. Basé sur le fair-play, il reposait sur des valeurs de raison, de morale et d’éthique. Sa philosophie était d’avancer et de gagner en reculant, c’est-à-dire d’aller franchir la ligne en passant le ballon en arrière. Les règles établies par les instances internationales induisaient le souci de l’évitement de l’adversaire au prix d’un combat stratégique, en rendant très critiquable le fait de le télescoper pour le déstabiliser ou le détruire.

Cette dernière pratique est pourtant devenue habituelle aujourd’hui. Un joueur espoir âgé de 19 ans vient de mourir à la suite d’un choc d’une extrême violence, plaqué par deux joueurs à la fois. Ce drame est survenu après le décès récent de deux autres joueurs, l’un d’un choc cardiaque, l’autre d’une hémorragie intracrânienne.

Le passage de l’amateurisme au professionnalisme a transformé le jeu en spectacle lucratif, les clubs en entreprises et les joueurs en travailleurs. Certains d’entre eux, très (trop ?) bien payés, sont devenus des « mercenaires » ne sachant plus ce que signifie l’attachement au club. L’objectif de certains dirigeants est de se rapprocher du « sport business » qu’est devenu le football avec ses rémunérations exorbitantes, injustifiées économiquement et socialement, encore moins moralement. Ce changement de paradigme conduit à un appauvrissement intellectuel et à une déstructuration de l’humain.

Risques de lourdes sanctions

Malgré des fondements stratégiques d’évitement et les finalités d’optimisation de la santé mentale et physique des pratiquants, ce sport spectacle est devenu un sport de combat, violent et dangereux. Le nombre de blessures augmente saison après saison, la commotion cérébrale étant seulement la plus médiatisée. Le spectre de l’encéphalopathie post-traumatique est brandi, particulièrement depuis les travaux de l’école de Boston sur d’anciens joueurs de football américain, décédés et autopsiés : l’analyse de leur cerveau a révélé des signes de dégénérescence cérébrale précoce chez la majorité d’entre eux.

La fédération et la ligue de rugby ont certes mis en place des protocoles ainsi que des sanctions (cartons jaunes, rouges) quand un acte « illégal » générateur de blessure est commis. Ces règles sont utiles pour mettre un terme à ces atteintes à l’intégrité physique. Mais c’est aussi un moyen de se donner bonne conscience, alors que, sur le terrain, la violence persiste. Les joueurs professionnels peuvent jouer 35 à 40 matchs par an, alors que les boxeurs, par définition très exposés aux commotions, ne livrent que 3 à 4 combats.


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