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En critiquant la remise du prix de la Fondation Bill Gates à l’autoritaire premier ministre indien Narendra Modi, l’économiste Amartya Sen souligne l’importance des valeurs démocratiques dans le développement, explique dans sa chronique le journaliste du « Monde » Julien Bouissou.
Chronique. Qui, du milliardaire ou du sage, sait le mieux combattre la pauvreté ? Le premier a déjà prouvé qu’il était capable de créer de la richesse, beaucoup de richesse. Bill Gates, cofondateur de Microsoft, et son épouse Melinda sont à la tête d’une des plus grandes fortunes de la planète. ils en ont consacré une partie pour éradiquer la pauvreté et les maladies infectieuses grâce aux nouvelles technologies. Le second, Amartya Sen, Prix Nobel d’économie en 1998, a derrière lui une carrière universitaire prestigieuse au cours de laquelle il a démontré que la liberté et la démocratie étaient des conditions essentielles au développement.
Lorsque ce dernier a appris que la Fondation Bill et Melinda Gates avait remis, fin septembre à New York, un prix au premier ministre nationaliste indien Narendra Modi pour récompenser son programme de construction de toilettes, son sang n’a fait qu’un tour. Narendra Modi a en effet éloigné l’Inde de la démocratie depuis son arrivée au pouvoir en 2014, en la faisant sombrer dans un nationalisme ethnique. « Franchement, j’étais surpris et choqué que la récompense de Gates aille à Modi », s’est lamenté le vieux professeur indien, dans un entretien au magazine américain The New Yorker. Puis il a ajouté : « je pense que le monde aime le succès, je pense que les Gates aiment le succès. Or Modi est tellement puissant qu’il est souvent perçu comme ayant, d’une certaine manière, réussi. »
Le professeur de Harvard a appris à se méfier des succès, surtout lorsqu’ils sont fulgurants et autoproclamés par les dirigeants autoritaires. Contrairement à ce que pense Bill Gates, la réduction des libertés et l’affaiblissement des institutions en cours en Inde freinent le développement. Dans son ouvrage intitulé Un nouveau modèle économique. Développement, Justice, Liberté (éd. Odile Jacob, 2003), l’économiste démontre par la théorie des « capabilités » que l’argent à lui seul ne règle pas le problème de la pauvreté. Ou que ce ne sont pas les greniers pleins qui règlent les problèmes de famines, mais plutôt leur accès. Il faut, nous dit Amartya Sen, augmenter les capacités des possibles chez les pauvres en leur donnant accès à l’éducation, à la santé, à la libre expression. Des conditions qui ne sont réunies qu’en démocratie.
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Si les cartes vont être rebattues avec la réforme des retraites, racheter des trimestres pour atteindre le taux plein peut surtout s’avérer rentable pour des seniors en fin de carrière.
Vous manquez de trimestres pour décrocher le taux plein et risquez de voir votre pension définitivement minorée ? Vous avez la possibilité d’en racheter. Au régime général, pour la retraite de base des salariés du privé, cette démarche porte officiellement le nom de « versement pour la retraite ». Seulement voilà, avec la réforme, le trimestre est peut-être en voie de disparition… Car s’il constitue aujourd’hui un élément-clé du calcul des pensions dans la plupart des régimes, nul ne sait, pour l’heure, si cela restera le cas dans le futur système universel à points. Ce sujet ultra-sensible n’a pas encore été tranché par l’exécutif. Alors que, dans son rapport rendu mi-juillet, le haut-commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye préconisait un âge du taux plein à 64 ans pour tous, sans prise en compte de la durée de cotisation, le chef de l’Etat a en effet déclaré, fin août, que le débat restait ouvert.
Nul ne sait si le trimestre restera un élément-clé du calcul des pensions dans le futur système universel à points.
En attendant d’être fixé et de savoir s’il faudra toujours, à l’avenir, avoir cotisé un certain temps pour avoir droit au taux plein, est-il judicieux de racheter des trimestres ? Ou trop risqué ? Tout dépend de votre âge et de la date à laquelle vous comptez partir.
Trois cas de figure sont à distinguer. Si vous êtes né en 1963 ou après, vous comptez parmi les générations concernées par la réforme. « Dans ce cas, ne rachetez surtout rien », alerte Dominique Prévert, du cabinet Optimaretraite. La dépense pourrait s’avérer inutile. On ne sait précisément, pour l’instant, ni comment les pensions seront calculées à l’avenir, ni ce que deviendront les droits à la retraite acquis dans l’ancien système jusqu’en 2025. Certes, ils seront transformés en points du nouveau système, mais les modalités de la conversion ne sont pas connues.
Vous êtes né avant 1963 ? Vous ne serez a priori pas concerné par la réforme, si l’on en croit les annonces du gouvernement. Votre pension sera donc entièrement fixée selon les règles des régimes actuels. « Dans ce cas, et si vous comptez partir dans les deux ans à venir, ne tardez plus pour vous interroger sur l’opportunité d’un rachat et, le cas échéant, envoyer votre demande à votre caisse », recommande notre spécialiste du calcul des pensions.
Ce qui ne veut pas dire que tout le monde a intérêt à sauter le pas. Faites vos calculs. Première étape : vérifiez votre dossier retraite sur le site Info-Retraite.fr. Celui-ci récapitule l’ensemble des droits acquis au cours de votre carrière. S’il comporte des erreurs ou des oublis, demandez les corrections à vos régimes. Car pour réfléchir à un éventuel rachat, il convient d’abord de faire le point sur le nombre de trimestres dont vous disposez. En aurez-vous assez pour décrocher le taux plein à la date à laquelle vous souhaitez prendre votre retraite ? Si ce n’est pas le cas, et que vous ne souhaitez pas ou ne pouvez pas prolonger votre activité, le rachat est envisageable.
« Si le rachat vous coûte par exemple 30 000 euros et qu’il vous fait gagner 250 euros de pensions mensuelles, donc 3 000 euros par an, il sera rentabilisé au bout de dix ans de retraite. » Dominique Prévert, conseiller Optimaretraite
Mais pas forcément rentable… Calculez d’un côté ce qu’il vous coûtera, de l’autre ce qu’il vous apportera, en pension annuelle. Demandez à votre caisse de retraite un devis et une simulation. Par ailleurs, pensez à intégrer dans vos tableaux la composante fiscale, et pas seulement le gain immédiat lié à votre rachat. Car si ce dernier est déductible de vos revenus, il aura une incidence sur l’imposition de votre retraite. Dans le calcul du surplus de pension, n’oubliez pas de prendre en compte l’effet de la démarche sur votre complémentaire, car l’obtention du taux plein au régime général joue aussi sur la pension Agirc-Arrco.
« En comparant le coût au gain de pension annuelle, fiscalité comprise, vous pourrez calculer votre âge de retour sur investissement, poursuit Dominique Prévert. Si le rachat vous coûte par exemple 30 000 euros et qu’il vous fait gagner 250 euros de pensions mensuelles, donc 3 000 euros par an, il sera rentabilisé au bout de dix ans de retraite. » A mettre en perspective avec votre espérance de vie… « Pour certains, notamment les cadres supérieurs lourdement imposés avec, à leur compteur, beaucoup de points Agirc-Arrco, l’opération sera très juteuse, car le retour sur investissement pourra intervenir parfois dès quatre ou cinq ans de retraite », précise M. Prévert. Pour d’autres, en revanche, il faudra attendre vingt ans, et la démarche aura moins de chances d’être rentabilisée.
Vous êtes né avant 1963 mais ne comptez pas prendre votre retraite dans les deux prochaines années ? « Dans ce troisième cas de figure, vous n’êtes certes pas concerné par la réforme, mais il demeure sans conteste plus prudent d’attendre avant de racheter des trimestres, conseille M. Prévert. Le meilleur moment pour se lancer étant un ou deux ans avant la date de départ à la retraite souhaitée, pas avant.» Le risque de s’y prendre trop tôt ? Qu’un paramètre de l’opération ne change entre-temps.
Qu’un événement de votre vie personnelle ou professionnelle vous amène à reculer votre date de départ, que vous vous retrouviez au chômage en fin de carrière, ou encore que les modalités de fixation des pensions soient modifiées. « Si vos plans évoluent, martèle notre expert, votre calcul de rentabilité sera remis en cause, les trimestres rachetés pourraient s’avérer inutiles et vous pourriez avoir jeté des dizaines de milliers d’euros par les fenêtres. »
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Pour la première fois, un rapport d’organisations publiques met en évidence que des millions de salariés sont sanctionnés quand ils exercent une liberté inscrite dans la Constitution, expliquent dans une tribune au « Monde » trois militants de la CGT.
Tribune. Selon l’enquête sur les discriminations dans l’emploi du Défenseur des droits et de l’Organisation internationale du travail (OIT), la discrimination syndicale par les employeurs est un phénomène massif et répandu. 42 % des actifs estiment que s’ils exercent la liberté de se syndiquer, ils prennent un risque pour leur emploi, leurs conditions de travail, leur rémunération et leur déroulement de carrière.
Ce n’est pas de la paranoïa, puisque l’étude en question révèle que presque la moitié de celles et ceux qui ont pris ce droit de se syndiquer confirment qu’ils ont été victimes de représailles de la part de leur employeur. Et 67 % d’entre eux perçoivent leur engagement comme un risque professionnel. Enfin, le niveau de la répression augmente en cas de participation à l’activité syndicale, de prise de responsabilité dans les institutions représentatives du personnel, d’exercice d’un mandat de délégué.Il est maintenant officiel que c’est la peur, justifiée, de la discrimination au travail qui est la première cause de non-syndicalisation chez les salariés. Dans cette situation, que valent les déclarations patronales et gouvernementales sur l’importance d’une prétendue démocratie sociale ? Bien sûr, nous syndicalistes ne découvrons pas cette stigmatisation du syndicalisme que nous dénonçons depuis des années. En plus des mesures de rétorsion contre les syndiqués, il y a les attaques des médias, les procès contre les syndicalistes, les remises en cause des moyens et des locaux, les lois qui réduisent le droit syndical.
En 2015, une analyse du Fonds monétaire international (FMI), passée elle aussi assez inaperçue, relevait l’existence d’un « lien entre la baisse du taux de syndicalisation et l’augmentation de la part des revenus les plus élevés dans les pays les plus avancés durant la période 1980-2010 ». Cette étude expliquait ce lien par le fait qu’« en réduisant l’influence des salariés sur les décisions des entreprises », l’affaiblissement des syndicats a permis « d’augmenter la part des revenus constitués par les rémunérations de la haute direction et des actionnaires ».
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Dans une lettre adressée au président d’EDF, le gouvernement donne une feuille de route précise conduisant à la construction de six réacteurs EPR sur les quinze prochaines années.
Officiellement, rien n’est arrêté : la France n’a pas décidé de construire – ou non – de nouveaux réacteurs EPR, et le débat est toujours ouvert. Le président de la République, Emmanuel Macron, a simplement demandé à EDF de présenter, mi-2021, un dossier complet, pour pouvoir prendre une décision sur ce sujet épineux.
Pourtant, en coulisses, les choses avancent, et le gouvernement défend une option très claire. Dans une lettre envoyée au président d’EDF, le 12 septembre, que Le Monde a pu consulter, la ministre de la transition écologique et solidaire Elisabeth Borne et son collègue de l’économie Bruno Le Maire donnent une feuille de route précise à Jean-Bernard Lévy pour « être en mesure de répondre à l’exécution d’un programme de construction de trois paires de réacteurs sur trois sites distincts ». Et le courrier de détailler que la construction de chaque paire sera « espacée de quatre ans et les tranches au sein d’une même paire de dix-huit mois ».
Le courrier précise le calendrier imaginé par le gouvernement pour dessiner ce nouveau départ pour le nucléaire français : d’abord, mi-novembre 2019, « un état des lieux intégrant le retour d’expérience de la construction des premiers EPR ».
Face aux difficultés du réacteur de troisième génération en cours de construction à Flamanville (Manche), le gouvernement stipule :
« Les forces et les faiblesses de la filière seront explicitées à partir de ce bilan, dans la perspective de la construction de nouveaux réacteurs. »
Puis, dès la mi-décembre, EDF devra fournir au gouvernement « une analyse des capacités de la filière », pour accomplir les nouveaux réacteurs. Ce travail devra être basé « sur une liste de conditions à réunir pour que la filière puisse garantir la tenue d’un tel programme dans les délais et les coûts impartis ». Le document devra être assez détaillé, puisqu’il devra regrouper « l’ensemble des besoins de la filière en contrats, investissements, recrutements, formations ou autres ». Enfin, en mars 2020, l’électricien devra communiquer « la liste des plans d’action de la filière lui permettant, pour chacune des compétences ciblées, d’atteindre le niveau requis ». Ils devront, « dans la mesure du possible, atteindre leur plein effet pour la mi-2021 ».
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