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Partant de l’absence de transparence aux élections professionnelles, les deux chercheurs Dominique Andolfatto et Dominique Labbé pointent, dans une tribune au « Monde », les lacunes et les ambiguïtés de la démocratie sociale en France.

Tribune. Depuis le début du mouvement des « gilets jaunes », on parle beaucoup des corps intermédiaires. Parmi ceux-ci, les syndicats français offrent un cas intéressant. En effet, en une quinzaine d’années, une série de réformes a voulu « rénover la démocratie sociale ». Si celle-ci n’est jamais clairement définie, il y a au moins une ligne directrice : les résultats des élections professionnelles conditionnent à la fois la reconnaissance des organisations au niveau de l’entreprise, des branches d’activité ou au niveau national interprofessionnel, et leur capacité à discuter avec les employeurs et les gouvernements, à conclure des accords, à fabriquer des réformes, à participer à la gestion de nombreuses institutions paritaires.

Les élections étant le fondement de cette démocratie sociale, on s’attendrait à disposer de résultats exhaustifs et détaillés. Or tel n’est pas le cas.

On ne dispose officiellement que d’une « mesure d’audience de la représentativité » publiée tous les quatre ans par le ministère du travail (voir lien PDF). La dernière mesure date de mars 2017. Elle fournit des chiffres globaux portant sur 13,2 millions d’électeurs inscrits dans les entreprises privées et à statut. Or ce secteur emploie plus de 19 millions de salariés, ce qui signifie qu’un tiers des salariés concernés échappent à cette mesure. De plus, il n’y a eu que 5,2 millions de suffrages valablement exprimés en faveur d’un syndicat, soit quatre électeurs sur dix et moins d’un sur trois si l’on tient compte de tout le salariat concerné.

Les organisations minoritaires disparaissent

Mais c’est le détail qui étonne le plus. Cette « mesure » agrège les résultats de trois types de consultations différentes :

D’une part, un scrutin unique concerne toutes les entreprises de moins de dix salariés. Il a été un véritable fiasco puisque seulement 7 % des électeurs ont voté.

D’autre part, pour les élections aux chambres d’agriculture (collège des salariés) – la dernière édition a eu lieu en février –, seuls les résultats en pourcentage des suffrages exprimés sont publiés sans indication concernant le nombre d’électeurs, la participation, le nombre absolu de suffrages recueillis par chaque organisation.


Lire la suite : « Les dirigeants politiques, patronaux et syndicaux font peu de cas des salariés français en tant que citoyens »


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Le groupe américain ouvre un laboratoire d’intelligence artificielle dans la capitale Accra et voit, comme Facebook, l’Afrique comme un marché prometteur.

De prime abord, les locaux ressemblent à tous les locaux de Google dans le monde : le célèbre logo aux couleurs primaires est visible sur un mur, des ordinateurs sont posés sur des bureaux flambant neufs, une salle de repos accueille une console Playstation, le coin cuisine une machine à expresso et un micro-ondes… Seuls quelques détails trahissent le premier laboratoire d’intelligence artificielle ouvert en Afrique par le géant du numérique : les impressionnantes lignes de code sur les écrans de la dizaine de chercheurs qui travaillent en silence dans l’open space, un grand tableau rempli de formules mathématiques, mais aussi, au mur, des tentures et une collection d’éventails en kente, ces tissus du Ghana aux motifs géométriques et multicolores prisés dans toute l’Afrique. Les salles de réunion ont été baptisées Bojo et Labadi, du nom de plages de ce pays anglophone installé dans l’Afrique de l’Ouest francophone.

Pourquoi ouvrir un centre d’intelligence artificielle au Ghana ? Cette question intriguait les journalistes conviés mercredi 10 avril dans la capitale Accra pour visiter ce laboratoire annoncé en juin 2018 et ouvert en février dernier. Le pays jouit d’une stabilité politique et d’un bon niveau d’éducation en sciences, convient le directeur du labo Moustapha Cissé. Mais il y a une raison plus profonde, estime cette étoile montante de « l’IA » – un Sénégalais de 34 ans qui arpente les bureaux dans une élégante et longue chemise à col rond mais sans ses beaux mocassins, qu’il a enlevés : « Ouvrir un laboratoire ici, en Afrique, peut faire avancer la science en amenant une perspective différente de celle des chercheurs installés aux Etats-Unis ou en France. » Parmi les dix-sept centres d’Intelligence artificielle (IA) de Google, neuf sont en Amérique du Nord, cinq en Europe, deux en Asie et un en Israël. Le labo d’Accra se veut une réponse au manque de « diversité » et aux problèmes de « biais » dans la recherche, qui empêchent, par exemple, les logiciels de reconnaissance faciale de bien identifier les visages noirs, faute d’y avoir été assez entraînés.

Ce centre de recherche fondamentale se donne pour mission de s’intéresser à des problèmes qui se posent en Afrique dans la santé, l’agriculture ou la traduction des « 2 000 langues du continent ». Mais l’IA est-elle une priorité dans des pays qui manquent d’hôpitaux ou de raccordement à l’électricité ? « Il ne faut pas surtechnologiser les solutions, reconnait Joe Quinn, un des chercheurs, ex-professeur et conseilller IA pour les Nations unies en Ouganda. Mais l’intelligence artificielle peut être utile. Surtout si vous êtes sur place pour parler avec ceux qui pourraient l’appliquer. » En Ouganda, celui-ci a développé un logiciel destiné à trier des échantillons de sang infecté par la malaria. L’IA pourrait aussi aider à repérer, grâce à un téléphone portable, des feuilles de manioc atteintes de maladie ou des lésions cancéreuses cutanées. M. Quinn espère aussi cartographier les bâtiments en Afrique, grâce à l’analyse d’images satellite de Google Maps.


Lire la suite : Comment le Ghana est devenu le poste avancé de Google en Afrique


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Une partie des salariés et des syndicats s’inquiètent de réformes menées tambour battant dans un contexte concurrentiel mouvant.

A France Télévisions, la transformation est à tous les étages. La PDG du groupe public, Delphine Ernotte, a lancé six chantiers, portant sur la régionalisation de France 3, la présence de l’outre-mer sur les antennes, l’information, l’éditorial, l’innovation technologique et les fonctions support. L’ampleur de ces bouleversements soulève les craintes d’une partie des salariés et des syndicats, qui redoutent des réformes menées tambour battant, alors même que l’Etat a imposé des économies drastiques – un effort financier autour de 350 millions d’euros d’ici à 2022.

En 2018, le gouvernement a dicté des choix pas seulement budgétaires, qui passent par le renforcement de l’offre régionale de France 3 avec un rapprochement de France Bleu, le réseau local de Radio France, la suppression, d’ici à 2020, de la télévision hertzienne de France 4, la chaîne des enfants, et de France Ô, celle de l’outre-mer, l’augmentation des investissements dans le numérique et une « sanctuarisation » du financement des séries et documentaires. Aussi, les plates-formes américaines, comme Netflix, ont remodelé le paysage, de nouveaux concurrents et non des moindres (Disney) s’apprêtent à débarquer dans la vidéo à la demande sur abonnement (SVOD). Bref, l’audiovisuel public est appelé à s’adapter de gré ou de force.

Du côté de la direction, l’heure est à la définition d’un « projet d’entreprise » avant l’été, afin de préparer la mutation. Mercredi 17 et jeudi 18 avril, il en a été question au comité social et économique central (CSEC) – l’instance représentative du personnel.

A terme, France Télévisions ambitionne d’être une chaîne présente non seulement en linéaire, mais aussi sur le numérique, avec une distribution en gratuit sur son site France.tv et une fenêtre payante en SVOD grâce à la plate-forme Salto. Fruit d’une collaboration avec TF1 et M6, ce projet est actuellement examiné par l’Autorité de la concurrence.

« La bataille structurelle, c’est les contenus »

Pour s’assurer qu’à l’avenir des séries à succès qu’elle finance comme Dix pour cent ne finissent pas sur Netflix, la télévision publique a, de plus, signé, en janvier, un accord qualifié d’« historique » avec l’ensemble des syndicats de producteurs pour obtenir une exclusivité sur ses sites en gratuit et des droits plus longs sur la SVOD. En contrepartie, elle s’est engagée à une garantie d’investissement de 420 millions d’euros d’ici à 2022. « La bataille structurelle, c’est les contenus », souligne-t-on à France Télévisions.


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Si les poules pondeuses en cage sont deux fois moins nombreuses qu’il y a dix ans, les œufs fermiers, qui doivent être issus d’élevages plein air ou bio restent indétectables, explique Laurence Girard, journaliste au « Monde », dans sa chronique hebdomadaire.

Matières premières. La chasse aux œufs est ouverte. Un mot d’ordre lancé dimanche 21 avril, fête pascale oblige. Pas question, pour les enfants, d’être chocolat, les parents veillent au grain… La quête de douceurs cacaotées sera, on s’en doute, couronnée de succès.

Mais une autre traque s’avère plus épique. Où sont cachés les œufs fermiers ?, ne peut-on manquer de s’exclamer, si l’on tente, tout à coup, de mettre de l’ordre dans les poulaillers. Lâchons la bride aux fins limiers.

Et d’abord, tournons-nous vers le représentant de la filière des poules pondeuses, le Comité national pour la promotion de l’œuf (CNPO). Il vient de pondre un logo « Œufs de France ». Pas un label, puisqu’il est attribué aux éleveurs par les éleveurs eux-mêmes. Mais, selon ses promoteurs, une assurance de traçabilité pour le consommateur lui indiquant que poussin, poulette, poule pondeuse et œuf ont vécu leur courte vie dans l’Hexagone. Un œuf cocorico !

Les plus curieux regardent, quant à eux, sur la coquille. Le marquage chiffré – de 0 à 3 –, est leur boussole. En le décryptant, ils braquent en effet leur torche sur les conditions d’élevage. Du bio au plein air, en passant par le sol et la cage. La cage, avec sa forte densité de poules au mètre carré, a du plomb dans l’aile. Mise en joue par les associations de défense du bien-être animal.

Empoignades juridiques

Le CNPO se rengorge en affirmant que, en France, seulement 58 % des poules pondeuses sont en cage. Soit deux fois moins qu’il y a dix ans. Et il estime que l’objectif fixé – passer sous la barre d’une poule sur deux d’ici à 2022 –, pourrait être atteint plus tôt que prévu.

Du côté des rayons des supermarchés, les œufs en cage ont représenté, pour la première fois, moins de 50 % des achats en 2018. L’élevage en plein air, 32 %, dont 8 % en Label rouge, le bio, 17 %, et le sol, 3 %. Et les œufs fermiers ?, s’interrogeront ceux qui attendent toujours le résultat de la recherche.

Réponse du CNPO : un blanc. L’outil de traçabilité tant vanté, censé ne laisser aucun poulailler dans l’ombre, ne les détecte pas. Il a les yeux fermés sur les œufs fermiers.

Et pourtant, cette dénomination existe bel et bien. Elle a même fait l’objet de belles empoignades juridiques. Les professionnels se sont volés dans les plumes. Avant que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ne tranche.


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