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La société Greenflex, qui développe la démarche EnergieSprong en France, participera à la conférence Le Monde Cities « Lutter contre les passoires énergétiques : comment passer à l’action en Europe ? ». Son directeur associé, Sébastien Delpont, estime que la difficulté à industrialiser la rénovation énergétique est plus culturelle, que technique et financière.
Née aux Pays-Bas en 2012, EnergieSprong est une stratégie d’industrialisation et de massification de la rénovation énergétique sans néanmoins l’uniformiser. Le principe est simple : identifier des logements présentant les mêmes caractéristiques, puis faire produire en grandes quantités tous les matériaux nécessaires à cette rénovation (façades isolantes, fenêtres, chaudières…). Grace à la méthode EnergieSprong, plus de 4 000 logements ont déjà été rénovés aux Pays-Bas. Soutenue et subventionnée par la Commission européenne dans le cadre du programme H 2020 « Transition Zéro », cette approche est appelée à se développer en Europe, à commencer par le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France. Les enjeux sont doubles : lutter contre la précarité énergétique des ménages les plus modestes tout en essayant d’atteindre l’objectif de neutralité climatique souhaité par la Commission. La société d’accompagnement en transition énergétique Greenflex, lauréate des Prix de l’innovation du Monde Cities en 2016, a été mandatée pour décliner EnergieSprong au sein de l’Hexagone. Son directeur associé, Sébastien Delpont, appelle à une approche « radicale » pour industrialiser la lutte contre les passoires énergétiques.
La démarche EnergieSprong prend-elle en France ?
Depuis que nous essayons d’adapter la méthode EnergieSprong, trois projets sont sortis de terre à côté de Lille, d’Amiens et de Rennes. Cela montre la faisabilité de la démarche face à ceux qui nous disaient qu’elle ne marchera jamais, car « en France, c’est tellement différent ». Avec 25 logements rénovés, nous ne sommes certes pas encore à la même échelle que les Pays-Bas où plus de 4 000 logements l’ont été depuis 2012. Mais nous avons commencé cinq ans après eux, et la situation n’est pas si différente. Nous avons fait la preuve que cette approche pouvait fonctionner à petite échelle, dans le contexte technique et juridique français. Nous voulons à présent industrialiser le fait de sortir les gens de la précarité énergétique. Nous venons d’ailleurs d’avoir un engagement de 14 bailleurs sociaux pour rénover plus de 6 500 logements. Et dans le cadre d’un des programmes d’économies d’énergie soutenus par le ministère de la Transition écologique et solidaire, Greenflex a été retenue pour renouveler l’accompagnement des acteurs de l’écosystème, avec l’ambition d’obtenir un engagement de 10 000 logements de plus à rénover dans douze régions.
Comment réussira-t-on vraiment à passer à l’échelle en France ?
La massification se fera quand on arrêtera de s’interroger sur notre niveau d’ambition. Selon la loi, de toute façon, tous les bâtiments devront être classés énergie positive en 2050. Si on veut changer d’échelle, il faut donc une approche radicale et simple. L’agriculture biologique est un secteur d’activité que tout le monde comprend à travers le zéro pesticide, même si c’est ambitieux et difficile à faire. Zéro énergie garanti est ce qu’il nous faut pour créer cette locomotive que le bio peut être pour l’agriculture française.
Comment faire pour que les rénovations énergétiques coûtent moins cher ?
Nombre de bailleurs sociaux innovent mais dans leur coin sans se coordonneer. Il n’y a pas de partage d’expériences entre tous les territoires. Or, on peut avoir du volume et des prix, parce qu’on a les mêmes spécifications techniques à Albi qu’à Montauban, à Toulouse ou à Narbonne. Aujourd’hui, il faut passer du sur-mesure au prêt-à-porter : un bailleur doit accepter de ne personnaliser que 20 % d’un projet, et non plus 100 %. La difficulté est moins technique et financière, que culturelle.
Au-delà des bailleurs sociaux, Greenflex va-t-il s’ouvrir à d’autres marchés immobiliers ?
C’est en faisant tomber un domino après l’autre que l’on fait évoluer un écosystème. Il faut parfois avoir le courage de surinvestir dans certains secteurs de marché aux dépends d’autres, en se disantque cela aura un impact sur tout l’écosystème. Pour que les prix des travaux baissent rapidement, nos premiers partenaires doivent être de gros propriétaires. Néanmoins, les bailleurs sociaux ne sont pas une fin en soi. Nous avons été mandatés par l’Etat pour adapter notre approche aux logements privés, aux copropriétés mais aussi aux bâtiments éducatifs. Ce dernier segment de marché, où nous ne pouvons intervenir qu’en juillet et août lorsqu’il n’y a pas d’élèves, est un très bon complément à celui du logement.
« Le Monde » organise une conférence sur les enjeux de la rénovation énergétique des bâtiments, intitulée « Lutter contre les passoires énergétiques : comment passer à l’action en Europe ? » jeudi 16 mai, de 8 h 30 à 10 h 30, à l’Hôtel des Postes de Strasbourg.
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Les organisations non gouvernementales sont une source d’informations très importante pour les entreprises, qui « ont besoin de leur regard critique pour avancer », explique Antoine Mach, expert en notation ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance).
Antoine Mach, cofondateur de Covalence, à Genève, décrit la façon dont les ONG agissent aujourd’hui vis-à-vis des entreprises et les changements dans leurs relations qui en découlent. Entretien.
Les ONG peuvent agir de différentes manières sur les entreprises : d’abord par la pression indirecte, en exerçant une influence sur la décision politique qui donnera naissance à des lois, par exemple celles sur le devoir de vigilance en France ; par des mouvements informels tels que la grande mobilisation contre le réchauffement climatique ; bien que difficile à mesurer, ce type d’action joue un rôle. Et enfin, par des campagnes ciblant certaines entreprises, sur des thèmes sociaux, environnementaux, sur les conditions de travail…
Ils obéissent à une logique différente : les ONG ont bonne réputation mais pas d’argent, et les entreprises ont de l’argent mais pas toujours bonne réputation. Les partenariats arrangent donc les deux parties. Les ONG se positionnent alors plutôt dans un rôle d’expert auprès de l’entreprise pour délivrer des labels, des certifications, monter des opérations de terrain… Le vrai défi, c’est alors de savoir trouver la bonne distance. Il faut pouvoir justifier de ce rapprochement avec le privé auprès des sympathisants, des donateurs et des bénévoles.
Les ONG ont beaucoup évolué en matière d’expertise. Leurs salariés ont acquis des compétences économiques et managériales. Elles utilisent les mécanismes de l’économie de marché, comme d’acheter des actions pour pouvoir participer aux assemblées générales, par exemple. Autre nouveauté, certaines ONG mènent des actions en justice contre des entreprises. Citons LafargeHolcim, attaqué pour son rôle en Syrie, Volkswagen et le diesel, Apple et les conditions de travail…
Effectivement. Alors que les grandes agences de notation sociale ou environnementale se sont concentrées ou ont été rachetées par des groupes financiers, les ONG se sont positionnées sur ce créneau. Elles font des classements, qui sont souvent fiables et bien construits : c’est malin, car les entreprises sont très réceptives à ce type d’action. Celles qui sont bien notées donnent de la légitimité au classement et s’en prévalent. Cela accrédite le fait que les ONG ne mettent pas tout le monde dans le même sac et oblige les moins bien notées à réagir.
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A la centrale hydroélectrique de La Coche, un dispositif permet de stocker et de réutiliser l’eau pour produire de l’électricité à la demande.
Quelle est la manière la plus efficace de stocker de grandes quantités d’électricité ? Cette vieille question est devenue de plus en plus pressante, avec le développement des énergies éolienne et solaire, qui ne produisent pas en continu. Au cœur des Alpes, la centrale hydroélectrique de La Coche (Savoie) apporte une partie de la réponse. Coincé à flanc de montagne à quelques kilomètres de Moûtiers, ce site exploité par EDF n’est pas un simple barrage, mais une station de transfert d’énergie par pompage, une STEP.
Ce sigle cache une technologie très simple, dont le monde pourrait avoir de plus en plus besoin : la centrale est positionnée entre deux bassins d’eau, l’un en amont, l’autre en aval. Lorsque les besoins en électricité sont importants, lors des pics de consommation, on fait descendre l’eau du bassin du haut pour produire de l’électricité. A l’inverse, la nuit, lorsque le prix de l’électricité est très peu cher, on pompe pour remonter l’eau du bassin du bas vers celui qui se trouve en amont. Résultat : la centrale peut produire à la demande une électricité totalement renouvelable, au moment où les consommateurs en ont le plus besoin.
« Ce mode de fonctionnement en circuit fermé nous permet d’être maîtres de notre énergie. Les STEP sont les moyens par excellence pour stocker de l’électricité », explique Yves Giraud, directeur de l’hydraulique chez EDF. Malgré les progrès technologiques et les importantes baisses de coût, les batteries ne suffisent pas à satisfaire les besoins sur une longue période : l’ensemble des batteries dans le monde permet de stocker 1,6 gigawatt, contre 160 gigawattspour toutes les STEP. « C’est comme une batterie…, mais liquide », insiste M. Giraud, qui rappelle qu’à La Coche, « l’électricité [est produite] avec de la neige ».
Le vieillissement des réacteurs, la réduction à 50 % en 2035 de la production nucléaire et le développement massif des énergies renouvelables relancent les barrages
EDF compte six installations de ce type, pour une capacité installée de 5 gigawatts – une part très minoritaire de ses 433 centrales hydrauliques, qui produisent entre 10 % et 12 % de l’électricité française.
Dans un pays où le nucléaire compte encore pour 72 % de la production d’électricité, l’« hydro » a souvent été perçue comme un complément bien pratique, mais guère plus. Le vieillissement des réacteurs, la réduction à 50 % en 2035 de la production nucléaire et le développement massif des énergies renouvelables relancent les barrages. Et particulièrement les STEP, qui joueront un rôle crucial dans un système électrique où les renouvelables occupent une place importante.
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La nouvelle génération d’internes aspire à davantage d’équilibre, au grand dam de certains de leurs aînés pour qui la médecine est un sacerdoce.
« On considère encore le médecin comme une personne à part, qui doit se donner entièrement à son métier et éponger tous les problèmes de la société. On nous en demande beaucoup… » Trop ? Amina – dont le prénom a été changé – n’est pas loin de le penser. Chaque semaine, elle consacre entre soixante et quatre-vingts heures à l’hôpital. Depuis trois ans, cette étudiante de 28 ans est interne en psychiatrie en Champagne-Ardenne.
Passage obligé pour, chaque année, 8 000 étudiants en médecine, l’internat se compose de stages successifs dans des centres hospitaliers, sur trois à cinq ans selon les spécialités. Lourdes journées de consultations, gardes de nuit, week-ends d’astreinte, tâches administratives et cours à l’université en parallèle… Cette période très intense ne permet pas toujours aux futurs médecins de dégager un temps de repos suffisant à leurs yeux.
Avant-goût d’un métier très prenant, l’internat sonne comme une alarme pour une nouvelle génération d’internes désireuse d’équilibrer vie professionnelle et vie personnelle. Amina a souvent le sentiment de devoir renoncer à des parts importantes d’elle-même. Femme engagée depuis toujours, elle a été contrainte de délaisserles associations antiracistes et féministes dans lesquelles elle est impliquée. L’interne en psychiatrie aimerait aussi avoir le temps, chez elle, de cultiver son potager, et ainsi retrouver le goût des aliments faits maison. « La médecine est mon travail, pas mon identité globale », veut-elle rappeler.
Son cas n’est pas isolé. Sur les réseaux sociaux, des internes relaient les aspirations de cette nouvelle génération qui n’entend plus tout sacrifier à la médecine. Aviscene (son pseudo sur les réseaux) est l’un d’eux : il comptabilise 60 000 fans sur Facebook et enregistre en moyenne 30 000 vues
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