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Chaque mois, la sociologue Amandine Mathivet donne la parole aux salariés pour décrypter la vie au travail. Dans son podcast de novembre, Alix et Ester racontent comment et pourquoi elles ont participé à une expérience de « team building ».

« Au turbin ! », l’émission mensuelle « qui parle du travail », a commencé à circuler sur les réseaux sociaux depuis septembre. Sa réalisatrice, Amandine Mathivet, est sociologue. Elle a consacré sa carrière aux conditions de travail et n’a jamais cessé de récolter des témoignages de salariés pour son travail de consultante au sein du cabinet Technologia, de sociologue du travail chez Ad’hoc Conseil et d’experte CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) chez Emergences.

Le podcast « Au turbin ! » est le fruit et le prolongement de ce travail. Il diffuse la parole des salariés et interroge l’évolution du management. Après « Les espaces de travail » et « Les reconversions professionnelles », le troisième épisode d’« Au turbin ! », diffusé mardi 5 novembre, est consacré au team building. Quel est le rôle de ces activités de loisirs organisées par l’entreprise pour ses salariés ? Comment les vivent-ils ? Quel est l’impact sur les relations de travail après l’expérience ? Pourquoi les entreprises y sont-elles attachées ?

Mélange de contextes

Les interviews de salariés se succèdent et racontent le contexte professionnel, l’annonce de l’événement auquel ils doivent participer et ce qui l’a motivé. Alix, 42 ans, juriste dans un cabinet de conseil où le turn-over est important, est envoyée en séjour en Tunisie du côté de Hammamet, avec ses collègues. Ester, 38 ans, urbaniste, va « subir » un week-end surprise à Lyon, pour « apprendre à se connaître ». « Je n’avais pas du tout envie de jouer au paintball », confie-t-elle. « Est-ce que ça sert à travailler mieux ensemble après ? J’en doute. »

Leurs témoignages illustrent comment le team building mélange les contextes privés et professionnels de façon tout à fait « inappropriée », parfois gênante, mais voulue. En conclusion du podcast, la sociologue Danièle Linhart analyse le concept et explique en quoi le team building est un outil du management moderne, « construit sur une individualisation et une psychologisation du salarié, au détriment du respect de la professionnalité ». Il s’agit de « recréer du collectif en constituant des équipes sous influence, en jouant sur l’hypersollicitation du registre narcissique », dit-elle. Le message adressé est : l’entreprise s’occupe de vous, dans une ambiance conviviale, mais docile. Au boulot ! On vous dit.


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Le lancement d’une monnaie virtuelle par Pékin constitue un revirement des autorités, provoqué par le projet de Facebook, explique le correspondant du « Monde », Frédéric Lemaître, dans sa chronique.

Chronique. Mark Zuckerberg en rêvait, Xi Jinping l’a fait. Enfin, presque. La banque centrale de Chine est en train de mettre la dernière main au lancement de sa monnaie virtuelle. Pas question de laisser Facebook, interdit en Chine, développer une monnaie internationale qui empiéterait sur la souveraineté des Etats, y compris, un jour, sur celle de Pékin, expliquent les dirigeants chinois, en phase sur ce point avec le ministre de l’économie et des finances français, Bruno Le Maire.

Evidemment, dans le contexte de guerre commerciale et technologique actuel, la démarche de Pékin n’est pas qu’anti-Facebook. Elle est surtout antiaméricaine. « Maintenant, tous les regards sont tournés vers la Chine, qui est lancée dans une compétition sans précédent contre les Etats-Unis pour un meilleur avenir défini par les blockchains », se réjouissait récemment le quotidien nationaliste chinois Global Times. Ironie de l’histoire : dix ans après le lancement du bitcoin par des geeks libertariens qui voulaient contourner le contrôle des autorités monétaires, l’Etat le plus centralisé au monde prend tout le monde de court en lançant une monnaie virtuelle nationale.

Si la banque centrale de Chine travaille sur ce sujet depuis cinq ans, le discours chinois sur la question a évolué récemment. Jusqu’à présent, la Chine suivait de très près les blockchains, cette technologie de stockage et d’échange d’informations sécurisée et sans contrôle central, mais elle était très réservée sur leur principale utilisation : les monnaies virtuelles. En 2017, la Chine a d’ailleurs interdit les transactions et les levées de fonds en monnaie virtuelle. En février 2018, Alibaba, l’un des fleurons de la technologie chinoise, prenait l’engagement de ne « jamais créer une monnaie virtuelle ».

Un an et demi plus tard, l’entreprise s’apprête pourtant à être, avec UnionPay, Tencent et les quatre grandes banques publiques chinoises, l’un des sept canaux retenus par la banque centrale de Chine pour diffuser sa monnaie. Le lancement de celle-ci constitue donc un revirement des autorités chinoises, provoqué par le projet de Facebook. Jusqu’à ces dernières semaines, il n’était pas certain que cette monnaie repose sur une blockchain. D’après certains spécialistes, cette technique ultrasécurisée n’est pas assez performante pour réaliser les 300 000 transactions par seconde – objectif de la banque de Chine.


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Les souscripteurs du nouveau plan épargne-retraite individuel pourront opter pour la formule « assurance » ou « compte-titres ». On vous explique la différence.

Les futurs souscripteurs d’un PER individuel (PERin, successeur du PERP et du contrat Madelin) seront bientôt face à un choix nouveau : celui entre le PER « assurance » (pour « assurance-vie ») ou le PER « compte-titres ». La loi Pacte (plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) offre en effet ces deux possibilités, qui se traduisent par quelques différences financières et fiscales.

Sur le plan financier, lePER « assurance » permettra, comme les contrats d’assurance-vie et les PERP actuels, de choisir entre différents supports financiers, dont un fonds en euros garanti. C’est un argument qui compte, pour de nombreux souscripteurs (ce type de fonds capte en effet plus de 70 % des versements réalisés en assurance-vie), mais les rendements des fonds en euros étant désormais très bas, à cause des taux négatifs sur les marchés obligataires, ses perspectives ne sont guère étincelantes. « Le fonds en euros est nécessaire pour sécuriser l’épargne à l’approche de la retraite, explique Olivier Mariée, directeur commercial d’Axa France. Mais les épargnants devront comprendre que d’autres supports, sans garantie, sont mieux adaptés à l’horizon du long terme. »

D’autres assureurs évoquent la possibilité que le fonds en euros du PER rapporte davantage que celui de l’assurance-vie, car il pourra bénéficier d’une gestion plus diversifiée et plus offensive, en raison de la longue durée des engagements. 

En revanche, le PERin ne profitera plus du petit bonus dont bénéficiait le PERP, où les rétrocessions de commissions sur les unités de compte (une part des frais prélevés sur les fonds sans garantie) sont créditées sur le fonds en euros. Avec le PER, elles pourront être encaissées par l’assureur et les distributeurs, et ne viendront plus apporter un élément de rendement supplémentaire aux épargnants.

Dans un PER « compte-titres », ce compartiment spécifique à l’assurance-vie ne sera donc pas présent. L’épargne y sera intégralement investie dans des sicav et des fonds communs de placement, dont la valeur n’est pas garantie. La sécurité sera apportée par les fonds monétaires et obligataires de court terme, mais avec un risque de baisse modeste si les taux d’intérêt des marchés financiers restent durablement bas.

Les frais font la différence

Ce sont les frais qui, finalement, pourraient faire la différence entre ces deux produits. Dans le PER « assurance », les frais des fonds et ceux du contrat s’additionnent, et, dans la mesure où ils sont calculés en pourcentage de l’épargne, ils sont d’autant plus importants que les montants sont conséquents. Avec le PER « compte-titres », l’épargnant supportera les frais des fonds plus, éventuellement, des frais liés au plan, mais, selon les professionnels, ceux-ci pourraient être fixes, ce qui favoriserait les plus gros investisseurs.

Concernant la fiscalité sur les revenus, les deux types de plans seront logés à la même enseigne. Mais le PER « assurance » dispose d’un intérêt supplémentaire, avec un abattement sur les sommes qui seront transmises aux bénéficiaires en cas de décès du souscripteur. Un avantage qui pourrait convaincre un bon nombre de choisir cette formule plutôt que le compte-titres qui, lui, n’aura aucun atout de ce type.

Actuellement, un choix similaire existe avec le plan d’épargne en actions, qui peut être souscrit sous forme de compte-titres ou d’assurance-vie. Et si les épargnants ont massivement opté pour le premier, les professionnels estiment que lePER « assurance » a de fortes chances de l’emporter, d’autant qu’il devrait être présent dans bien plus de réseaux (assureurs, mutuelles, banques, conseillers en gestion de patrimoine) que le PER « compte-titres », qui sera surtout proposé par les sociétés de gestion d’actifs ou par des banques à l’intention des entreprises. « Le choix entre les deux formules méritera d’être étudié », estime Philippe Crevel, délégué général du Cercle des épargnants. Bilan dans quelques années…


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REPORTAGE | Peu compétitive, l’industrie de l’ancienne RDA ne s’est pas remise du choc de la réunification, scellée en 1990, et des privatisations. Même si le niveau de vie des habitants a fortement progressé.

Avec ses façades anguleuses et ses hautes mosaïques exaltant la condition ouvrière, Eisenhüttenstadt (Brandebourg) a des airs de musée du communisme grandeur nature. Les Volkswagen ont certes remplacé les Trabant, qui pétaradaient jadis dans ses larges avenues rectilignes, mais la ville-modèle socialiste, fondée en 1950 sous le nom de Stalinstadt par les autorités de la République démocratique allemande (RDA), n’a guère changé d’apparence depuis la chute du rideau de fer.

Il n’empêche : un silence déroutant, une insaisissable mélancolie emplissent son centre-ville impeccablement rénové et entièrement classé au registre des monuments historiques. De rares passants, souvent âgés, arpentent ses vastes esplanades. Eisenhüttenstadt est une ville exsangue. Victime des bouleversements économiques engendrés par la réunification allemande, la cité ouvrière, située à la frontière polonaise, à 120 kilomètres de Berlin, s’est vidée de la moitié de ses résidents en une génération. De ses 51 000 habitants de 1989, il en reste à peine 25 000 aujourd’hui.

Les immeubles staliniens de Lindenallee (avenue des Tilleuils) dans le centre ville Eisenhüttenstadt, ex-Stalinstadt, classé au registre des momunents historiques. AMELIE LOSIER POUR « LE MONDE »

« Eisenhüttenstadt est encore une ville industrielle », insiste Frank Balzer, le maire social-démocrate de la commune. Après son élection, en 2018, l’ancien syndicaliste a mis fin à une longue carrière bien à l’image de sa ville : M. Balzer a été embauché, en 1982, à EKO-Stahl, l’immense usine sidérurgique qui s’étire sur plusieurs kilomètres aux abords de la ville, le long du canal Oder-Spree. Il y a travaillé pendant trente-six ans. Désormais propriété d’ArcelorMittal, l’aciérie n’emploie plus que 2 500 personnes, contre près de 15 000 à son apogée, avant la réunification de 1990.

Balayées par la concurrence des groupes d’Allemagne de l’Ouest

Tous ceux qui sont partis n’ont pas été licenciés : de nombreux services, comme la garderie ou l’entretien, ont été externalisés au moment de la privatisation. Mais d’autres entreprises d’Etat présentes dans la cité-modèle, comme le combinat de la viande ou la société de bâtiment WGK, ont mis la clé sous la porte, balayées par la concurrence des groupes d’Allemagne de l’Ouest. Des milliers d’emplois ont disparu. D’ailleurs, EKO-Stahl a bien failli subir le même sort, en 1993. « Jusqu’à notre reprise par [le sidérurgiste belge] Cockerill-Sambre, nous avons dû batailler pour sauver notre usine », se souvient l’édile. Soutenus par la population, les métallos sont allés jusqu’à bloquer l’autoroute pour mettre la pression sur les autorités.


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