Pourquoi les cancers sont-ils en augmentation chez les moins de 50 ans ?

Santé

Le cancer du sein était le cancer d'apparition précoce le plus fréquent en 2019. Juice Flair/ Shutterstock

The Conversation

Pourquoi les cancers sont-ils en augmentation chez les moins de 50 ans ?

Le cancer du sein était le cancer d'apparition précoce le plus fréquent en 2019. Juice Flair/ Shutterstock
Ashleigh Hamilton, Queen's University Belfast

On pense souvent que le cancer est une maladie qui affecte les personnes les plus âgées. Mais de nouvelles recherches préoccupantes montrent que le cancer chez les sujets les plus jeunes est un problème croissant. Selon une étude récente, ces trente dernières années, le nombre de personnes de moins de 50 ans chez qui un cancer a été diagnostiqué a augmenté d’environ 80 %.

Le type de cancers détectés chez les adultes plus jeunes est aussi un sujet d’inquiétude. En effet, si l’on en croit cette étude mais aussi des travaux de recherche plus anciens, on observe chez les sujets plus jeunes une recrudescence de cancers que l’on considérait jusqu’alors comme spécifique des groupes les plus âgés. Il s’agit notamment des cancers de l’intestin, de l’estomac, du sein, de l’utérus et du pancréas.

Ces données sont préoccupantes car certains de ces cancers, en particulier les cancers du pancréas et de l’estomac, se caractérisent par un faible taux de survie. Cela s’explique par le fait que ces cancers sont souvent diagnostiqués à un stade tardif. Des travaux de recherche ont également montré que le cancer de l’intestin (il s’agit du cancer du gros intestin appelé aussi cancer du côlon ou colorectal, ndlr) tend à être diagnostiqué à un stade plus avancé chez les adultes jeunes, par rapport aux sujets plus âgés.

S’il ressort clairement de cette étude que le cancer est de plus en plus fréquent chez les adultes de moins de 50 ans, les experts manquent de certitudes quant aux causes de cette augmentation.

Des cancers d’apparition précoce

L’étude a porté sur les cas de cancers chez des personnes âgées de moins de 50 ans (on peut utiliser l’expression « cancers d’apparition précoce ») dans 204 pays et régions du monde. Les données analysées ont été collectées entre 1990 et 2019. Les chercheurs souhaitaient connaître, non seulement l’incidence des cancers d’apparition précoce, mais aussi les types de cancers les plus répandus chez les moins de 50 ans.

Ils ont constaté qu’en 2019, 3,26 millions de cas de cancers d’apparition précoce ont été diagnostiqués dans le monde, soit une augmentation de 79 % depuis 1990. Les auteurs ont également prédit que d’ici 2030, le nombre de personnes de moins de 50 ans diagnostiquées avec un cancer augmenterait encore de 31 %.

Le cancer du sein était le cancer d’apparition précoce le plus fréquent en 2019. Mais c’est l’incidence des cancers de la prostate et de la gorge qui a augmenté le plus rapidement depuis 1990. Le cancer du foie est, quant à lui, celui qui a diminué le plus rapidement au cours de la même période.

Le nombre de décès dus aux cancers d’apparition précoce a également augmenté entre 1990 et 2019, mais moins rapidement que le taux de diagnostic. Le nombre de décès a néanmoins atteint 1,06 million dans le monde en 2019, soit une augmentation de 28 %. Les cancers ayant entraîné le plus grand nombre de décès en 2019 sont les cancers du sein, du poumon, de l’intestin et de l’estomac. Le groupe d’âge le plus exposé au risque de cancer précoce est celui des quadragénaires.

Un médecin explique une radiographie à un patient atteint d’un cancer.
C’est à la quarantaine que le risque de survenue d’un cancer dit d’apparition précoce est le plus élevé. Shutterstock

En 2019, le cancer du sein d’apparition précoce était celui qui a pesé le plus lourd pour les femmes, tandis que le cancer du poumon d’apparition précoce était celui a qui a eu le plus lourd impact pour les hommes. Les femmes ont été touchées de manière disproportionnée par les cancers d’apparition précoce, en termes de décès et de dégradation de leur santé, dans les pays à revenus faibles et intermédiaires.

L’étude montre également que si les pays développés tels que l’Europe occidentale, l’Amérique du Nord et l’Australasie comptent le plus grand nombre de cas de cancers d’apparition précoce, de nombreux cas ont également été observés dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires. Les taux de mortalité étaient également plus élevés dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires.

La principale limite de cette publication est la variabilité des données collectées dans les différents pays, ce qui rend difficile leur évaluation de manière exhaustive. Cet article scientifique n’en reste pas moins utile pour établir une photographie de la santé des populations au niveau mondial.

Des causes inconnues

Il n’existe pas d’explication unique à l’augmentation du nombre de cancers chez les moins de 50 ans. Certains cancers qui surviennent chez des adultes jeunes ont une origine génétique. Mais cela ne représente qu’un petit nombre de cas (environ 20 %).

Les facteurs liés au mode de vie, comme les aliments que nous mangeons, la consommation d’alcool ou de tabac et le surpoids, sont tous associés à un risque accru de survenue de nombreux types de cancers. Selon des données issues de la recherche, ces facteurs peuvent contribuer à l’augmentation du nombre de cancers colorectaux précoces, par exemple. On ne sait pas si c’est également le cas pour d’autres types de cancers d’apparition précoce.

Certaines personnes atteintes d’un cancer d’apparition précoce peuvent avoir un mode de vie sain. Cela suggère qu’il existe probablement d’autres causes, qui n’ont pas encore été mises en évidence, pour expliquer l’augmentation des cancers chez les adultes de moins de 50 ans.

Ces recherches montrent clairement que le paysage du cancer est en train de changer. Si l’incidence des cancers d’apparition précoce augmente, le cancer dans ce groupe d’âge reste toutefois beaucoup moins fréquent que chez les plus de 50 ans. Les cancers d’apparition précoce ne représentent qu’un dixième environ des nouveaux cas au Royaume-Uni. Mais même si ces chiffres sont encore relativement faibles, cela ne signifie pas pour autant que la tendance observée n’est pas préoccupante.

(Pour la France, l’agence Santé publique France a fait le point sur l’incidence des principaux cancers en France métropolitaine en 2023 et les tendances depuis 1990. Chez la femme, le taux d’incidence « tous cancers » augmente de façon continue depuis 1990. C’est le cas, en particulier, des cancers du poumon et du sein. Chez l’homme, en revanche, après une augmentation entre 1990 et 2006 et une baisse entre 2006 et 2012, ce taux semble se stabiliser depuis 2012. Mais l’agence ne fait pas de focus sur les cancers qui surviennent chez les adultes de moins de 50 ans, ndlr).

Il est désormais essentiel de veiller à ce que les cancers d’apparition précoce fassent l’objet d’une plus grande prise de conscience. La plupart des adultes encore jeunes, et même les professionnels de la santé, ne pense pas en priorité au cancer lorsque des symptômes apparaissent. Il est important de consulter son médecin généraliste quand des symptômes surviennent, car la détection d’un cancer à un stade précoce permet d’obtenir un meilleur pronostic.

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Il est également nécessaire de mener, en urgence, des recherches sur les cancers d’apparition précoce au niveau national et international. Les causes sous-jacentes sont probablement différentes selon le sexe, l’origine ethnique et le lieu de résidence.

Au niveau individuel, il y a beaucoup de choses que vous pouvez faire pour réduire votre risque de développer un cancer. Il est important d’adopter une bonne hygiène de vie. Cela inclut une alimentation saine, l’arrêt du tabac, la pratique d’une activité physique régulière, la réduction de la consommation d’alcool, la protection contre le soleil et le maintien d’un poids correct. Si vous ne vous sentez pas bien dans votre corps ou si des symptômes surviennent, il est important de consulter un médecin dès que possible.

Ashleigh Hamilton, Academic Clinical Lecturer, Centre for Public Health, Queen's University Belfast

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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