Le choking, cette pratique qui consiste à exercer une pression sur le cou de son partenaire au cours d’une relation sexuelle, se répand, notamment, chez les jeunes. Une étude australienne alerte sur le fait que trop nombreux sont celles ou ceux qui n’ont pas conscience des risques, même quand les deux sont consentants et que celui (ou celle) qui étrangle pense maîtriser son geste.
Environ 50 % des jeunes Australiens ont déjà eu recours au choking ou à la strangulation lors de rapports sexuels. Dans cette pratique, l’un des partenaires exerce une pression sur le cou de l’autre, ce qui limite sa respiration ou sa circulation sanguine (voire les deux).
(Littéralement « choking » signifie « étouffement ». Dans cette pratique sexuelle, l’étouffement est consécutif à une strangulation. Plus rarement, on parle d’« asphyxie érotique », NDLR).
La strangulation pendant les rapports sexuels comporte un ensemble de risques qui vont d’effets tels que des ecchymoses et des vomissements à des lésions au niveau du cerveau et à la mort.
Bien que les décès surviennent rarement, la strangulation est la principale cause de décès dans les jeux BDSM consensuels.
[BDSM est la combinaison des initiales de « bondage », une pratique sexuelle dans laquelle l’un des partenaires est attaché, et « discipline » (BD), « domination » et « soumission » (DS) ainsi que « sadisme » et « masochisme » (SM), NDLR].
Rien ne prouve qu’il existe un moyen sûr de pratiquer la strangulation. La strangulation peut notamment causer des blessures sans laisser de traces et les conséquences négatives ne se manifestent parfois que bien après l’épisode d’étouffement.
Dans une nouvelle étude, nous avons découvert qu’une des raisons pour lesquelles la strangulation pendant les rapports sexuels est si fréquente vient peut-être du fait que de nombreuses personnes croient à tort que, bien que risquée, la strangulation peut être rendue sûre par une pression modérée et une communication appropriée.
Mais stopper le flux sanguin qui irrigue le cerveau peut nécessiter moins de pression qu’ouvrir une canette de boisson gazeuse. Et les recherches montrent que la strangulation peut entraîner de sérieux dommages, même lorsqu’elle est consentie.
Une enquête auprès de jeunes Australiens
En 2023, nous avons interrogé un échantillon représentatif de 4 702 Australiens âgés de 18 à 35 ans sur leurs expériences et leurs opinions concernant la strangulation pendant les rapports sexuels.
En 2024, nous avons publié une étude sur la prévalence de la strangulation sexuelle sur la base des résultats de cette enquête. Nous avons constaté que 57 % des participants ont déclaré avoir été étranglés lors d’un rapport sexuel, et que 51 % avaient étranglé un partenaire.
À la fin de l’enquête, nous avons demandé aux répondants :
Quelles sont vos réflexions ou vos idées sur l’étouffement pendant les rapports sexuels ?
Pour cette nouvelle étude, nous voulions comprendre comment la strangulation sexuelle est perçue. Plus de 1 500 participants ont commenté les questions liées à la sécurité dans leurs réponses, et nous les avons analysées.
Nous avons interrogé de jeunes Australiens à propos de la strangulation sexuelle.ImYanis/Shutterstock
Beaucoup croient à tort que le choking peut être sans danger
Nous nous sommes inquiétés du fait que de nombreuses personnes interrogées semblaient croire que l’étranglement sexuel pouvait être pratiqué en toute sécurité. Le plus souvent, les participants considéraient que l’étranglement était sans danger lorsqu’il était pratiqué en appliquant une faible pression sur les côtés du cou.
Un participant, un homme hétérosexuel de 31 ans, a déclaré :
« Ma partenaire aime avoir une main ferme sur la gorge, sans pour autant étouffer la trachée, mais en limitant légèrement la circulation sanguine lorsqu’elle sent qu’un orgasme est en train d’arriver. »
Une femme, hétérosexuelle de 24 ans, a commenté :
« Je pense qu’il devrait y avoir une conversation préalable pour déterminer la force et l’intensité de la pression. »
Bien que toute pression sur le cou ne soit pas fatale, la recherche montre que même une pression relativement faible peut provoquer la mort par strangulation.
De plus, si la personne qui a recours à la strangulation ou qui est étranglée a consommé de l’alcool et d’autres drogues, les différences de pression peuvent être plus difficiles à discerner, ce qui accroît les risques pour la personne étranglée.
Communication et consentement
Les participants ont également établi un lien entre la sécurité – qu’elle soit émotionnelle ou physique – et le consentement à la strangulation sexuelle, comme l’a écrit une femme hétérosexuelle de 32 ans :
« Si l’acte a lieu entre deux adultes consentants qui en ont discuté au préalable et qui ont mis en place un plan de sécurité, je n’y vois aucun inconvénient. Mais j’ai été victime d’un “choking” sans consentement lors d’un précédent rapport sexuel, ce qui m’a mise en colère et m’a effrayée. »
Une femme, bisexuelle de 23 ans, a déclaré :
« Tant que les deux parties sont d’accord et que la pression est faible, cela peut être une expérience agréable. Le consentement doit être donné. »
En général, le consentement est considéré comme un processus continu qui peut être retiré à tout moment. Un homme, hétérosexuel de 32 ans, a déclaré :
« On devrait se baser sur un consensus strict, avoir conscience du langage corporel et de la respiration de sa (ou son) partenaire et lui demander si elle (ou il) veut poursuivre dans la pratique ou non. Si elle (ou il) dit non, il faut le respecter et revenir en arrière. »
Cependant, des recherches ont montré qu’une personne étranglée peut ne pas être en mesure de retirer son consentement par des gestes ou par des mots, même si elle le souhaite.
Plusieurs participants ont évoqué les limites du consentement en tant que mécanisme de réduction des risques, en reconnaissant que, même en cas de consentement, la strangulation pendant les rapports sexuels pouvait causer des dommages.
De nombreux participants à l’enquête ont discuté du consentement en relation avec la strangulation sexuelle.LightFieldStudios/Shutterstock
Il est inquiétant de constater que plusieurs personnes interrogées se sont dites préoccupées par le fait que le consentement était souvent négligé, intentionnellement ou accidentellement. Une femme, hétérosexuelle de 35 ans, a déclaré :
« Le nombre d’hommes qui prennent l’initiative de cette pratique sans demander l’avis de la femme est effrayant, et ils se sentent pourtant autorisés à le faire. »
Certaines personnes interrogées – généralement des femmes, mais pas toujours – ont indiqué qu’elles étaient poussées à pratiquer la strangulation (à la fois pour être étranglées et pour étrangler leur partenaire). Un homme, hétérosexuel de 24 ans, a déclaré :
« J’ai peur de le faire, mais ma partenaire me donne parfois l’impression que je dois le faire. »
La nécessité d’une meilleure éducation à la sexualité
Des études menées dans d’autres pays comme les États-Unis ont également montré une mauvaise compréhension des dangers potentiels de la strangulation sexuelle ; une perception erronée qui considère qu’elle peut être sûre si elle est pratiquée avec les « précautions appropriées ».
Même si le consentement est un élément essentiel de toute activité sexuelle, cela ne suffit pas à rendre la strangulation sûre. Il en va de même pour la régulation de la pression exercée.
Il est positif de constater que de nombreuses personnes interrogées dans le cadre de notre enquête ont exprimé le souhait d’obtenir davantage d’informations sur la strangulation sexuelle. Des informations précises sur les risques associées à la strangulation sexuelle devraient être facilement accessibles en ligne et par le biais de campagnes de santé publique.