Oui, messieurs, la fertilité masculine décline aussi avec l’âge
Caroline Law, De Montfort UniversityLorsqu’il s’agit de fonder une famille, la petite musique des limites imposées par l’« horloge biologique » sonne régulièrement aux oreilles des femmes. Les hommes ne sont pas soumis à la même pression en ce qui concerne de la question de leur paternité si elle s’annonce tardive.
Cela peut en partie s’expliquer par le fait que beaucoup pensent que les hommes ont tout leur temps lorsqu’il s’agit d’avoir des enfants. Des exemples exceptionnels, comme celui du chanteur Mick Jagger qui a eu en 2016 un fils à l’âge de 73 ans, peuvent d’ailleurs venir renforcer cette idée reçue… Mais en réalité, il y a beaucoup de choses à rappeler en ce qui concerne leur fertilité masculine et sa longévité. 75 % des jeunes, filles et garçons, sous-estiment l’impact de l’âge sur leur fertilité.
Au cours des dernières décennies, nous avons assisté à une évolution progressive de l’âge auquel un couple à son premier enfant : dans les pays occidentaux, se dessine ainsi une augmentation du nombre de personnes qui deviennent parents plus tardivement dans leur vie. En Angleterre et au Pays de Galles, hommes et femmes n’ont jamais eu leurs enfants aussi tard si l’on se fie aux archives.
Si l’on considère les seuls hommes, ils ont aujourd’hui des enfants en moyenne à près de 34 ans, contre environ 29 ans au milieu des années 1970. (En France, l’âge moyen de la première paternité est de 33,1 ans contre 30,2 ans pour les femmes et la maternité. Cet écart se maintient depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, ndlr.)
Il y a des multiples raisons qui peuvent inciter à repousser ainsi un projet parental. Actuellement, il y a le fait que les jeunes ont plus de difficultés à acheter une maison et se trouvent dans un climat économique et social incertain… Ce qui ne permet pas de se projeter dans l’avenir. Les changements dans la façon dont les gens sortent et forment des relations doit également être pris en compte. Se lancer dans des études longues et prendre plus de temps pour faire un choix de carrière sont d’autres facteurs à considérer. Enfin, beaucoup préfèrent attendre le « moment le plus propice » pour avoir des enfants, soit celui où ils pourront leur donner les « meilleures chances de départ » dans la vie.
Mais ces choix de vie ne sont pas sans conséquences biologiques, ne serait-ce que sur la possibilité d’avoir un enfant « tard ».
La fertilité masculine en question
Si certaines personnes peuvent toujours avoir des enfants à 30, 40 ans et plus, d’autres peuvent en effet avoir des difficultés.
On pense souvent, à tort, que seules les femmes connaissent une baisse de fertilité à mesure que les années passent… Certes la fertilité féminine diminue plus rapidement avec l’âge que celle d’un homme, mais de plus en plus de données suggèrent que l’âge affecte également la fertilité masculine – qui connaît un pic entre 30 et 35 ans, avant de décroître à partir de 40-45 ans environ de façon significative.
Au-delà de 40 ans, un homme serait ainsi moitié moins fertile qu’à 25 ans… sans que l’on sache vraiment pourquoi. Ce sujet reste très débattu, au point qu’il n’existe pas de définition claire de ce que serait une paternité « tardive » chez l’homme.
Pourtant, il est désormais démontré que l’âge du père (au-delà notamment de 45 ans) :
réduit sa fertilité et le nombre de spermatozoïdes produits. Ces derniers sont également moins mobiles et moins performants pour féconder un ovocyte, ce qui implique souvent de recourir à leur injection médicalement assistée,
augmente le risque de fausse couche et de complications médicales pour la mère (retard de croissance intra-utérine, naissances prématurées…),
entraîne une plus grande probabilité de problèmes de santé futurs chez les enfants à naître – en particulier les troubles du spectre autistique (risque augmenté de 80 %), la schizophrénie (de près de 50 %), les troubles bipolaires et la leucémie infantile. Le risque de faible poids à la naissance ou d’hospitalisation néonatale est également accru.
Mais ces éléments sont rarement mis en avant, et les hommes ne sont ainsi souvent pas conscients que chez eux aussi la fertilité peut diminuer avec l’âge. Même si les risques restent faibles, il est toujours préférable d’en être conscient lorsque l’on prévoit d’attendre pour avoir des enfants.
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Améliorer vos chances
Y a-t-il des moyens qui aideraient à mettre vos chances de votre côté lorsque vous voudrez avoir des enfants ? Il y a deux facteurs à prendre en compte.
Le premier est votre mode de vie. Les recherches montrent que de nombreux éléments liés au mode de vie peuvent affecter la fertilité masculine. En particulier, les recherches suggèrent que le tabagisme et la consommation excessive d’alcool influent négativement sur la qualité du sperme et la fertilité. Les sous-vêtements trop serrés, les drogues et les stéroïdes sans à éviter pendant l’adolescence et la vingtaine. À l’inverse, un régime alimentaire et un IMC sains ont un effet positif.
Mais avoir un mode de vie sain n’est qu’une partie de l’équation. Le second élément clé est l’âge.
Idéalement, il est préférable d’essayer d’avoir des enfants avant que le sujet de l’âge ne devienne un paramètre à prendre en compte pour la fertilité – c’est-à-dire avant que l’âge n’affecte les chances de concevoir, ou le bien-être des futurs enfants. C’est pourquoi il peut être pertinent que les garçons commencent à réfléchir plus tôt qu’aujourd’hui à la question de savoir s’ils veulent des enfants.
De nouvelles technologies continuent d’être développées et peuvent aider les gens à augmenter leurs chances de devenir parents à un âge moyen ou avancé. En particulier, la congélation des ovules est un phénomène en pleine expansion et certains suggèrent que la congélation du sperme chez les jeunes adultes pourrait aider les hommes à avoir des enfants plus tard dans leur vie. Mais attention, ces technologies ne sont pas parfaites et ne garantissent pas le succès d’un projet parental reporté.
Caroline Law, Senior Research Fellow, De Montfort University
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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