Anatomie d’une bouffée de chaleur : votre tête chauffe-t-elle vraiment ?

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Anatomie d’une bouffée de chaleur : votre tête chauffe-t-elle vraiment ?

Si la sensation de chaleur est indéniable, la question de savoir si les bouffées de chaleur augmentent de manière significative la température de la peau reste débattue. DimaBerlin/ Shutterstock
Michelle Spear, University of Bristol

La périménopause se caractérise par une baisse des niveaux d’oestrogènes. Ces changements hormonaux perturbent la capacité de l’hypothalamus à maintenir la température corporelle, ce qui favorise la survenue de bouffées de chaleur. Si certains mécanismes restent débattus, l’impact sur le quotidien n’est plus à démontrer.


La bouffée de chaleur est un phénomène aussi perturbant que banal. Un instant, la vie suit son cours. L’instant d’après, une vague de chaleur s’élève, se propage de la poitrine au visage, en laissant derrière elle une peau rougie et des perles de sueur. Pour beaucoup, cette chaleur soudaine s’accompagne d’une accélération du rythme cardiaque et d’un léger sentiment de malaise. Bien que brève – elle dure généralement de 30 secondes à cinq minutes – son intensité peut être surprenante et aggravée par un timing imprévisible.

Une vidéo virale récente a attiré l’attention sur l’intensité de la bouffée de chaleur. La vidéo montre une femme du nom de Tracey Monique en proie à une bouffée de chaleur lors d’un événement en plein air. Dans la vidéo, sa tête est littéralement en ébullition.

La vue des volutes de vapeur s’échappant de sa tête a mis en évidence les effets dramatiques de ce symptôme commun de la périménopause. Souvent mal comprise ou banalisée, l’image de la bouffée de chaleur attire l’attention sur un phénomène qui touche environ 75 % des personnes en périménopause.

La vidéo a également suscité un débat sur les réseaux sociaux, qui reflète la complexité des bouffées de chaleur elles-mêmes. Certains affirment que la vapeur qui s’échappe de la tête de Monique est due au fait qu’elle a enlevé son chapeau alors qu’elle était dans le froid. Mais de nombreuses femmes ont commenté la vidéo en affirmant qu’elle résumait parfaitement ce que l’on ressentait lors d’une bouffée de chaleur.

Voyons ce qui se passe réellement pendant une bouffée de chaleur et pourquoi elle peut être si violente.


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Les instigateurs hormonaux

Au cœur de la bouffée de chaleur se trouvent les œstrogènes, des hormones qui jouent un rôle essentiel dans la régulation de la température corporelle chez les femmes. Les œstrogènes influencent directement l’hypothalamus, une structure cérébrale petite mais essentielle, souvent appelée le thermostat du corps. L’hypothalamus surveille et ajuste la température corporelle pour maintenir l’équilibre.

Dans des circonstances normales, l’hypothalamus maintient le corps dans une fourchette de température étroite, en ajustant le flux sanguin et la production de sueur en fonction des besoins. Mais pendant la périménopause, les taux d’œstrogènes fluctuent de manière imprévisible et finissent par diminuer. Ces changements hormonaux perturbent la capacité de l’hypothalamus à maintenir la température habituelle.

La baisse des niveaux d’œstrogènes rend également l’hypothalamus trop sensible aux petits changements de température corporelle, les interprétant à tort comme des signes de surchauffe. Cela déclenche une réaction exagérée visant à refroidir le corps : une bouffée de chaleur. Il en résulte une dilatation soudaine des vaisseaux sanguins, en particulier dans la peau de la partie supérieure du corps, afin de permettre à la chaleur de rayonner vers l’extérieur. Simultanément, les glandes sudoripares s’activent, ce qui intensifie la sensation de chaleur.

L’hormone lutéinisante (également appelée LH, NDLR), qui régule principalement l’ovulation, joue également un rôle secondaire dans les bouffées de chaleur. Lorsque les niveaux d’œstrogènes diminuent, l’hypophyse (qui régule les hormones clés qui contrôlent la croissance, la reproduction et le métabolisme) libère des pics erratiques d’hormone lutéinisante. Ces pics semblent accroître la sensibilité de l’hypothalamus, en amplifiant son interprétation erronée de la température corporelle normale comme étant une surchauffe.

La réaction de refroidissement

Lors d’une bouffée de chaleur, l’hypothalamus envoie des signaux urgents au système nerveux autonome qui régit les fonctions involontaires telles que le rythme cardiaque, la pression artérielle et la transpiration. Cela incite les vaisseaux sanguins proches de la peau à se dilater – un processus appelé vasodilatation. Cela permet à une plus grande quantité de sang de circuler vers la surface pour libérer de la chaleur. C’est pourquoi le visage, le cou et la poitrine peuvent ressentir une chaleur intense et paraître visiblement rougis lors d’une bouffée de chaleur.

Une femme transpire à cause d’une bouffée de chaleur
Les glandes sudoripares sont activées lors d’une bouffée de chaleur pour refroidir le corps. New Africa/Shutterstock

Presque simultanément, l’hypothalamus active les glandes sudoripares de la partie supérieure du corps. La transpiration a pour but de refroidir le corps par évaporation. Dans les environnements froids, cette transpiration peut produire de la vapeur visible, comme le montre la vidéo virale de Monique.

Mais lorsque l’hypothalamus se rend compte que le corps n’est pas réellement en surchauffe, la vasodilatation diminue et les vaisseaux sanguins reviennent à leur état normal. Mais l’effet de refroidissement rapide de la transpiration peut laisser les femmes frigorifiées. Cela crée des montagnes russes de sensations pendant et après la bouffée de chaleur.

Cette séquence – chaleur, bouffée de chaleur, sueur et froid – reflète la lutte du corps pour retrouver l’équilibre en réponse à un thermostat défaillant.

Ce qui fait débat

Si la sensation de chaleur est indéniable, la question de savoir si les bouffées de chaleur augmentent de manière significative la température de la peau reste débattue.

Des études thermographiques, qui utilisent l’imagerie infrarouge pour mesurer les modèles de chaleur et la température de surface, ont démontré des augmentations mesurables de la température de la peau, en particulier au niveau du visage, du cou et de la poitrine.

Mais d’autres recherches n’ont mis en évidence que des changements mineurs ou négligeables de la température de la peau. Cela soulève des questions quant à la corrélation directe entre la perception de la chaleur et les changements physiologiques.

Les critiques suggèrent que la sensation de chaleur provient davantage de l’altération de la thermorégulation du cerveau que du réchauffement réel de la peau. Des outils tels que l’imagerie thermographique peuvent également ne pas détecter des changements de température subtils ou transitoires. Ou alors ces changements peuvent être masqués par l’évaporation de la sueur.

Il est également possible que les changements de température de la peau, comme d’autres symptômes de la périménopause, varient considérablement d’une personne à l’autre. La variabilité des niveaux d’œstrogènes y contribue de manière significative – les personnes qui subissent des changements hormonaux plus irréguliers signalent souvent des bouffées de chaleur plus intenses ou plus fréquentes. Des facteurs tels que la génétique, le mode de vie et des causes environnementales, ajoutent à la diversité des expériences et à l’intensité des symptômes.

Les bouffées de chaleur sont une interaction complexe entre des réponses hormonales, neurologiques et vasculaires. Si le débat scientifique sur les changements de température de la peau n’est pas résolu, l’expérience vécue de sensation de chaleur et d’inconfort est indéniable. Pour beaucoup de femmes, ces symptômes sont perturbants, voire même les affaiblissent, et affectent profondément la vie quotidienne.

La vidéo virale de Monique, avec l’image frappante de la vapeur s’élevant de sa tête, a trouvé un écho profond auprès d’innombrables femmes –, ce qui offre une preuve visuelle brutale de ce qu’elles ont ressenti mais qu’elles ont souvent eu du mal à exprimer. Comprendre l’anatomie d’une bouffée de chaleur permet non seulement d’en comprendre les mécanismes, mais aussi de souligner l’importance de l’empathie et des approches personnalisées pour gérer ce symptôme aux multiples facettes.

Michelle Spear, Professor of Anatomy, University of Bristol

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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