Le Point - Pourquoi, à l'inverse du discours ambiant, estimez-vous qu'investir sur les actions les plus risquées n'est pas plus rémunérateur ?
Étienne Vincent : Il existe une croyance partagée selon laquelle il faut prendre des risques pour avoir de bons rendements. C'est vrai, s'agissant du choix des actifs : il faut, sur un horizon long, privilégier les actions aux obligations. A contrario, au sein des actions, la démarche peut s'avérer contreproductive. Le risque, comme l'ont démontré des économistes réputés (Robert Haugen…), ne paie pas toujours. C'est ce qu'on appelle l'anomalie de faible volatilité. On peut avoir une performance supérieure avec un risque moindre. Et pas seulement parce que cette gestion permet d'atténuer les baisses.
Pour quelles raisons le gain est-il plus élevé ?
Parce qu'en se concentrant sur des valeurs moins risquées, on commet moins d'erreurs. Elles sont au nombre de trois. La première, dite le biais de confiance, consiste à acheter en priorité des valeurs que l'on connaît (Apple au lieu de SAP, par exemple). Or on connaît mieux les valeurs volatiles car elles attirent l'attention. La deuxième est le biais d'estimation, appelé aussi l'effet loterie. Les investisseurs sont naturellement attirés par les titres affichant un gros potentiel de gain, même si la probabilité qu'il se réalise est faible. Ce "gros potentiel" fait que les actions volatiles sont surachetées, donc en fait trop chères par rapport à ce potentiel. Enfin c'est le biais de représentativité, ou effet mémoire : on se souvient beaucoup mieux des meilleurs paris boursiers que de leurs échecs, et on a donc l'impression que seuls les paris risqués ont été payants, contrairement à ce que montrent les statistiques.
Quels secteurs et titres privilégier ?
Tous, et pas seulement les secteurs défensifs. Il faut multiplier les paris. Pour que cette approche fonctionne, il faut avoir au moins en portefeuille cent valeurs et être exposé à l'international.
Des exemples ?
Berkshire Hathaway Inc, Air Liquide, SAP, Merck...
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