Envoyée spéciale à Bastia
Il n'a pas fallu attendre longtemps pour que le chef de l'État donne le ton de sa première visite en Corse. Dans son discours en hommage au préfet Erignac, assassiné le 6 février 1998 à Ajaccio, Emmanuel Macron a employé des mots fermes: «union indéfectible dans la République», «pas d'amnistie», «ne pas transiger avec les requêtes qui feraient sortir la Corse du giron républicain». À quelques heures de sa rencontre avec les deux présidents de la collectivité de Corse, il semblait donc acquis que le Président opposerait une fin de non-recevoir aux revendications des nationalistes: co-officialité de la langue corse, rapprochement des prisonniers, et surtout inscription de la Corse dans la constitution via l'article 74 qui donnerait à l'île un statut comparable aux territoires ultramarins.
C'est donc sans grand espoir que Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni ont accueilli Emmanuel Macron mardi soir au siège de la collectivité de Corse. Les élus insulaires avaient toutefois la ferme intention de demander au Président d'ouvrir un «dialogue» et de lui rappeler que leur élection à la majorité absolue en décembre dernier était un «fait politique» qu'il ne devait pas sous-estimer. Rassemblés sous les drapeaux français, corse et européen, Emmanuel Macron, le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, la «Madame Corse» du gouvernement Jacqueline Gourault et les élus corses ont échangé pendant un peu moins de deux heures pour sortir à 21 heures 30 sans rien laisser filtrer de leur discussion. «Pas de déclaration ce soir»: un silence inhabituel de la part des dirigeants nationalistes qui laisse augurer des échanges très tendus avec l'exécutif.
Si, dans l'entourage des leaders corses, on affirme encore que la rencontre a eu lieu dans un «climat de travail» et qu'il serait encore possible de «tirer la déclaration de Bastia dans un sens favorable», la messe semble dite. Mercredi, lors de son discours politique, Emmanuel Macron devrait rester dans la continuité de cette entrevue: le chef de l'Etat, figure d'autorité, ne fera aucune concession aux élus nationalistes. «Il n'y a pas de négociation», a lancé le Président durant sa visite ajaccienne, confirmant ainsi la position nette du premier ministre Edouard Philippe et du président du Sénat Gérard Larcher qui avaient éconduit, fin janvier, les deux représentants de l'île venus plaider à Paris pour une inscription de la Corse dans la prochaine révision constitutionnelle.
Dans l'île, personne ne s'attendait à ce qu'Emmanuel Macron exauce tous les vœux des nationalistes, mais on espérait tout de même un signe de bonne volonté de la part du gouvernement. Un geste sur la langue corse ou, mieux, sur le rapprochement des prisonniers, aurait satisfait l'électorat nationaliste. Mais au vu du silence gêné qui a suivi la rencontre de mardi soir, il est très peu probable que le Président cède sur quelque point que ce soit.
Lire la suite : Macron n'est pas prêt à négocier avec les nationalistes corses - Le Figaro
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