On pensait jusqu'ici que la capacité à ressentir la douleur était réservée aux cellules nociceptrices de la peau dépourvues de myéline. Des chercheurs affirment aujourd'hui avoir identifié un réseau de cellules gliales sous-cutanées d'un nouveau type et pouvant répondre à des stimuli douloureux.
Ce n'est pas tous les jours que l'on découvre un nouvel organe dans le corps. En mars 2018, des chercheurs américains avaient déjà proposé de définir l'interstitium, constitué de l'ensemble des tissus interstitiels, comme organe à part entière (voir l'article précédent, ci-dessous). En 2017, c'était le mésentère qui prétendait briguer le titre de 79e organe du corps humain. Aujourd'hui, des chercheurs du Karolinska Institutet de Stockholm (Suède) affirment à leur tour avoir découvert un nouveau type de cellules gliales cutanées qui joueraient un rôle important dans la perception de la douleur. Formant un réseau de mailles dans la couche sous-cutanée supérieure, ces cellules pourraient être considérées comme un organe à part entière.
Un réseau de nouveaux nocicepteurs
Jusqu'à présent, il était admis que la sensation de douleur - quand par exemple nous touchons une surface brûlante ou que l'on se coince un doigt dans une porte - était transmise via les nocicepteurs, des récepteurs périphériques situés sous la peau et dont les fibres nerveuses sont la plupart dépourvues de myéline. Leur isolation électrique est assurée par les cellules de Schwann, des cellules gliales périphériques qui entourent les axones des neurones, chargés de transmettre le signal au cerveau. Les chercheurs suédois affirment aujourd'hui, dans une étude parue dans la revue Science, avoir identifié un nouveau type de cellules de Schwann qui seraient capables de ressentir directement la douleur, indépendamment des cellules nociceptrices elles-mêmes.
Les cellules de Schwann nociceptrices (en rouge) s’enroulent autour des cellules nerveuses (en bleu) à qui elles transmettent le signal de la douleur. © Hind Abdo et al, Science, 2019
Pour le vérifier, Patrik Ernfors et ses collègues ont utilisé l'optogénétique. Une protéine sensible à la lumière a été introduite dans les cellules de Schwann de souris afin de pouvoir les stimuler artificiellement avec un laser. Lorsque la lumière était activée, les souris montraient des comportements indiquant une douleur, en se léchant ou en agitant leurs pattes. Les chercheurs ont ensuite désactivé les cellules de Schwann impliquées dans ce mécanisme et procédé à trois types de stimulations douloureuses (froid, chaud, et piqûre d'épingle). Ils ont alors remarqué que seule la douleur mécanique (piqûre d'épingle) était diminuée, ce qui suggère que ces cellules gliales, baptisées « cellules de Schwann nociceptrices », ne seraient sensibles qu'à ce type de douleur.
Mieux comprendre les douleurs chroniques
« Nous démontrons l'existence d'un organe jusqu'alors inconnu avec un rôle essentiel dans la détection de stimulis douloureux, assure Patrik Ernfors. Ces cellules gliales mécanosensibles par nature sont intimement associées aux nerfs nociceptifs non myélinisés et leur transmettent des informations nociceptives ». Cette découverte pourrait avoir des implications importantes dans le traitement des douleurs chroniques comme les neuropathies périphériques, avancent les chercheurs.
Il convient cependant de rester prudent au sujet d'expériences menées sur la souris. Elles n'impliquent pas forcément que ces cellules de Schwann nociceptrices jouent le même rôle chez l'Homme. Cependant, « tous les organes sensoriels découverts précédemment chez la souris se sont avérés présents aussi chez l'humain », précise le scientifique Patrik Ernfors au site Gizmodo.
Ce qu'il faut retenir
- Des chercheurs ont identifié un nouveau type de cellules gliales capables de ressentir directement la douleur.
- Ces cellules ne seraient toutefois sensibles qu’aux douleurs mécaniques et non aux douleurs thermiques.
- Organisées en réseau dense dans la couche sous-cutanée, elles formeraient un organe à part entière.
Source : Un tout nouvel organe sensible à la douleur découvert sous notre peau
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