Tous les voyants sont au rouge ! Si nous ne faisons rien pour diminuer le réchauffement climatique et réduire notre impact sur la biodiversité, notre monde va basculer dans une crise planétaire sans précédent qui anéantirait la civilisation humaine, alertent les auteurs d'un rapport qui vient de sortir sur ce qui nous attend d'ici 2050. La biosphère est en danger.
Publié fin mai, l'article Existential climate-related security risk : a scenario approach a eu un écho médiatique retentissant dans le monde entier. Ses auteurs, David Spratt et Ian Dunlop, n'y vont pas par quatre chemins : en effet, si rien n'est fait dans la petite fenêtre de temps qu'il nous reste (et qui est en train de se refermer), nous courons à la catastrophe. Nous, l'humanité et la plupart des êtres vivants.
Dans leur évaluation des risques pour la sécurité nationale dans le scénario du pire, « high-end », c'est-à-dire du laisser-faire - nos actions resteraient insuffisantes à l'échelle mondiale pour contenir le réchauffement global en dessous de +2 °C (l'objectif de +1,5 °C semble de plus en plus irréalisable) -, le futur de la civilisation humaine à court et à moyen terme est clairement assombri par des guerres, des famines, des épidémies, des sécheresses... Et ce serait bref en comparaison avec l'histoire plurimillénaire de notre espèce : en trois décennies seulement, le monde que nous connaissons aujourd'hui, (relativement) en paix depuis 70 ans, serait mis à genoux. La population humaine ne serait pas alors de 10 milliards d’individus comme le prévoit l'ONU...
D'une part, à cause du changement climatique qui va s'amplifier, si rien n'est fait. Et d'autre part, en raison d'autres facteurs comme l'effondrement de la biodiversité - les chercheurs parlent de sixième extinction de masse -, la pollution des sols et des eaux, l'acidification de l'océan, etc. « Le changement climatique [...] fonctionne comme un multiplicateur de menaces et un accélérateur d'instabilité, contribuant à l'escalade de cycles de crises humanitaires et sociopolitiques, de conflits et de migrations forcées, écrivent les deux chercheurs en préambule de leur enquête. Les impacts du changement climatique sur la nourriture et l'eau, la baisse des rendements des cultures et l'augmentation des prix des denrées alimentaires conduites par des sécheresses, des incendies de forêt et de mauvaises récoltes sont déjà des catalyseurs de rupture sociale et de conflits au Moyen-Orient, le Maghreb et le Sahel, contribuant à la crise migratoire européenne ».
La Terre vue de la Lune lors de la mission Apollo 11, il y a 50 ans. C'est la seule planète que nous connaissons où la vie prospère. © Nasa
Agir au plus vite contre le réchauffement climatique
Tout n'est pas perdu cependant mais il faut agir vite, exhortent les deux auteurs, « ce n'est pas inévitable ». Cette semaine, Patricia Espinosa, secrétaire exécutive des Nations unies sur le changement climatique lors de l'UN Climate Change Conference, qui se déroule en ce moment à Bonn, a rappelé combien il est urgent d'agir : « pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 et limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C, il est nécessaire de réduire les émissions de 45 % avant 2030 ». Ce qui rejoint ce que martèlent David Spratt et Ian Dunlop : « il est essentiel de construire très rapidement un système industriel avec zéro émissions [de gaz à effet de serre, ndlr]. Et pour y parvenir, cela nécessite une mobilisation globale des ressources d'urgence, à un niveau semblable en temps de guerre ».
Le tissu du vivant, qui a évolué sur des centaines de millions d'années et recouvre la Terre sur quelques kilomètres d'épaisseur seulement, est menacé d'être réduit en lambeaux. Le risque est grand que la Terre se transforme en étuve et devienne invivable à l'horizon 2050. Après la menace atomique d'une fin du monde, celle de la bombe climatique est là, prenant toujours plus d'ampleur au risque d'un emballement. Pour les auteurs, d'ailleurs, nous approchons du point de non-retour. C'est « un risque actuel et existentiel pour la sécurité nationale » et bien plus que cela puisque le phénomène ne connaît pas de frontières. Les auteurs regrettent par ailleurs que les décideurs ne répondent pas à la menace, pourtant déjà à l'œuvre et ressentie douloureusement dans plusieurs régions du monde - l'armée américaine aussi alerte sur les crises qui se profilent à l'horizon - et minimisent beaucoup trop les risques.
Dans l'avant-propos, l'amiral Chris Barrie, ancien chef des forces de défenses australiennes (de 1998 à 2002) et conscient de la gravité du problème, écrit : « David Spratt et Ian Dunlop ont dévoilé la vérité sans faille sur la situation désespérée dans laquelle se trouvent les humains et notre planète, brossant ainsi un tableau inquiétant de la possibilité réelle que la vie humaine sur terre soit en voie de disparition, de la façon la plus horrible qui soit ».
À quels changements devons-nous nous attendre ?
Récemment, dans un article publié dans Nature Geoscience, des chercheurs qui se sont intéressés à un des réchauffements climatiques du passé ont observé un effondrement des écosystèmes marins et terrestres (multiplication des zones mortes dans l'océan, déforestation...) lors d'une augmentation des températures entre 4 et 7 °C. « Notre étude montre qu'un réchauffement climatique rapide peut avoir des impacts à la fois majeurs et durables sur la terre et dans la mer », a expliqué Richard Twitchett, directeur de recherche au Musée d'histoires naturelles de Londres, qui a participé à cette étude sur le début du Jurassique, il y a 183 millions d'années. Plusieurs dizaines de millénaires ont été nécessaires pour que la nature s'en remettre.
Des annonces catastrophistes et alarmistes ? C'est vrai. Mais nous savons que nous pouvons éviter les scénarios les plus pessimistes et changer la trajectoire que nous prenons (à vive allure) avec le dérèglement climatique. En réalité, la maison commence à brûler... Quelle attitude alors doit-on adopter ? Que faut-il faire ? Attendre ? Espérer que l'incendie s'éteigne tout seul ? Ou prévenir tout le monde et commencer à l'éteindre ? Il n'y a pas d'autres maisons où nous pourrions aller nous réfugier. C'est la seule que nous connaissons - et pour laquelle nous sommes adaptés - dans l'immensité de l'Univers.
Source : Notre civilisation pourrait s'effondrer en 2050
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