Pour lutter contre les abus dont sont victimes les employées de maison, une ancienne domestique a créé une page Facebook qui veut faire changer la société brésilienne.
Depuis 30 ans, cette employée domestique anonyme travaille dans la même maison. A 76 ans, elle n’est toujours pas à la retraite et continue de servir ses patrons fidèlement.
En début d’année, elle se rendait comme tous les jours à son travail. Elle passe devant l’ascenseur dit social, réservé aux résidents de l’immeuble et se dirige vers l’ascenseur de service au fond du couloir, celui pour les employés. Jusque là rien de choquant à ses yeux, tous les immeubles du Brésil comptent deux ascenseurs.
Mais l’ascenseur de service est en panne. Alors qu’elle se dirige vers l’ascenseur social, le portier refuse de la laisser passer, il a des ordres spécifiques des résidents. « Pas de domestiques dans l’ascenseur social. » Elle ne peut que céder et grimpe en peinant les huit étages qui la séparent de ses patrons.
Ce témoignage envoyé par son fils a ému aux larmes Joyce Fernandes, 31 ans, plus connue sous son nom de scène : Preta-Rara (nègresse rare). Rappeuse depuis près de dix ans, aujourd’hui formée en histoire, Preta-Rara était jusqu’en 2010, une employée domestique.
« Pas par méchanceté, ma fille »
Le 19 juillet 2016, alors qu’elle cuisine, elle décide de poster un de ses souvenirs sur son compte personnel. Elle y raconte comment l’une de ses patronnes l’a obligé à ramener ses propres couverts, pour ne pas utiliser ceux de la maison où elle travaille, « pas par méchanceté ma fille », assure la patronne, « c’est juste pour maintenir l’ordre dans cette maison ».
En quelques heures, son post est partagé plus de 500 fois et reçoit plus de 1 000 « j’aime ». Des domestiques, parfois leurs enfants, se retrouvent dans cette histoire et beaucoup lui écrivent spontanément leur propre mésaventure. Devant ce succès, Joyce décide de lancer, le 21 juillet, une page sur ce sujet qui lui tient à cœur : #euempregadadomestica (« moi, employée domestique »).
Preta-Rara est fille et petite-fille d’employée domestique. Dans la ville de Santos (au sud de São Paulo), elle ne trouvait aucun boulot. A l’époque, comme la plupart des filles d’employées de maison, elle ne voit pas d’autres possibilités que de suivre le chemin de ses mère et grand-mère. Quand elle l’apprend, sa mère fond en larmes : elle sait que sa fille devra subir une vie d’humiliation...