Par le

Avec l’aide de sa start-up, Eugenia Kuyda a mis au point un bot censé représenter son meilleur ami décédé, avec qui elle discute.

Nous y sommes. Encore une fois, la réalité a rejoint la science-fiction. On peut désormais tchatter avec nos proches disparus. Enfin, presque.

Dans « Transcendance », le personnage d’Evelyn transférait la conscience de son mari dans un ordinateur quantique et continuait ainsi à parler avec « lui » après sa mort.

Le premier épisode de la saison 2 de « Black Mirror » (« Be Right Back ») offrait une version moins futuriste. On y voyait Martha discuter avec son compagnon décédé grâce à une messagerie spéciale : le profil virtuel de son fiancé avait été recréé à partir de toutes ses interactions sur Internet.

Eugenia Kuyda a vu cet épisode.

 « Où est la limite ? »

Cette jeune entrepreneuse russe, basée à San Francisco, est à la tête d’une start-up, Luka. Avec son équipe, elle a conçu une intelligence artificielle qui tchatte avec les client et leur propose des services. Rien de très surprenant.

Mais un jour, elle tombe sur l’épisode « Be Right Back » de « Black Mirror », raconte The Verge. Son meilleur ami, Roman Mazurenko, est mort il y a peu, percuté par une voiture à Moscou. Il allait avoir 34 ans. La série lui fait un drôle d’effet, comme l’explique le site américain : 

« Elle était partagée. Les bots-hommages [...] lui paraissaient à la fois inévitable et dangereux. “C’est forcément l’avenir, et je suis toujours pour l’avenir”, se disait-elle. “Mais, est-ce vraiment bénéfique ? [...] Où est la limite ?” »

L’idée a finalement germé. Pendant trois mois, elle a récolté les textos échangés avec Roman Mazurenko, les e-mails, les photos, et toutes les interactions qu’il avait pu avoir sur les réseaux sociaux, afin d’en créer un chatbot.

Et puis, un jour :

« Comment vas-tu là-bas ?

- Roman : Ça va. Un peu déprimé. »

L’avatar de son meilleur ami prenait vie.

L’immortalité d’Internet

Glauque, fascinant, dérangeant. Le bot de Roman Mazurenko pose des questions. Il interroge notre rapport à la mort, à travers notre empreinte numérique. La page Facebook érigée en mémorial, qui était déjà source de débats, semble maintenant dépassée.

« C’est mélancolique, très perturbant », convient Vanessa Lalo, psychologue spécialisée dans le numérique, contactée par Rue89. « Mais je ne recommanderai ça à personne ! Il y a quelque chose de la toute puissance magique là-dedans, sauf qu’on sait bien que la personne est morte. Ce n’est pas sain du tout. »

Selon elle, le deuil ne peut se faire correctement si on doit parler avec un avatar morbide de notre proche disparu :

« Tenter d’imaginer, grâce à l’immortalité d’Internet, que notre ami est toujours vivant, ne peut pas faire du bien. On se maintient dans une forme d’illusion alors que nous sommes humains, avec nos failles. Quoi qu’en disent certains [cf les transhumanistes], nous resterons mortels. »....

Lire la suite - Grâce à un chatbot, elle parle à son ami mort

Articles en relation

Pascal Brun : Le gagnant de l’Euro-millions Pascal Brun : Le gagnant de l’Euro-millions /* Ce div définit le ratio de la vidéo. Par exemple, pour un ratio de 16:9, on utilise un padding..... Read Full Article
« Penser à tout » : pourquoi la charge mentale des femmes n’est pas près de s’al... Image de freepik « Penser à tout » : pourquoi la charge mentale des femmes n’est pas près de s’alléger Selon l'Ins..... Read Full Article
Enquête sur le « viol ordinaire » Image de azerbaijan_stockers sur Freepik Image de freepik Enquête sur le « viol ordinaire » Alexane Guérin, Sciences Po En F..... Read Full Article
#Metoogarçons : « 80% des violences ont lieu ou commencent avant l’âge de 18 ans... Photo de Gioele Fazzeri: #Metoogarçons : « 80% des violences ont lieu ou commencent avant l’âge de 18 ans » Selon ..... Read Full Article
« Je préfère ne pas en parler » : le tabou des avortements en dépassement de dél... Image de Freepik Image de jcomp sur Freepik « Je préfère ne pas en parler » : le tabou des avortements en dépassement de délais Sophie..... Read Full Article
Et si la solitude était le véritable mal du siècle ? Image de vecstock sur Freepik Image de Freepik Et si la solitude était le véritable mal du siècle ? Cécile Dutriaux, IAE Paris – Sorbo..... Read Full Article