Comment réduire le risque incendie posé par les batteries lithium-ion ?

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Voiture électrique en charge. Mike Bird / Pexels, CC BY-NC-ND

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Comment réduire le risque incendie posé par les batteries lithium-ion ?

Voiture électrique en charge. Mike Bird / Pexels, CC BY-NC-ND
Apparao Rao, Clemson University; Bingan Lu, Hunan University; Mihir Parekh, Clemson University et Morteza Sabet, Clemson University

Dans notre monde peuplé d’appareils électroniques, les batteries rechargeables lithium-ion sont partout. Par rapport aux batteries au plomb, qui ont dominé le marché pendant des décennies, elles présentent plusieurs avantages, comme une charge plus rapide et une densité énergétique plus élevée à poids égal.

De quoi rendre nos gadgets électroniques et nos voitures électriques plus légers et plus durables, au prix de quelques inconvénients. Car ces batteries contiennent plus d’énergie : si elles prennent feu, elles brûlent jusqu’à ce que toute l’énergie stockée soit libérée. Sauf qu’une telle libération soudaine d’énergie peut occasionner des explosions graves, sources de dégâts matériels et humains.

En tant que scientifiques spécialistes de la production d’énergie, de son stockage, de sa conversion, ainsi que l’ingénierie automobile, nous nous intéressons de près au développement de batteries à la fois de forte densité énergétique et sûres. Or, nous voyons des signes encourageants montrant que les fabricants de batteries progressent vers la résolution de ce problème technique important.

Éviter de surcharger ses appareils est un bon moyen pour réduire le risque d’incendie des batteries lithium-ion.

Un nouveau type de risque incendie

Le transport urbain est en train de subir une transformation majeure vers l’électrification. Alors que les villes du monde entier se préoccupent de plus en plus du changement climatique et de la qualité de l’air, les véhicules électriques sont désormais sur le devant de la scène.

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Dans le même temps, les vélos et scooters électriques transforment eux aussi les transports urbains en offrant des moyens pratiques et à faible émission de carbone pour naviguer dans les rues encombrées et réduire les embouteillages. Entre 2010 et 2022, les vélos et scooters électriques partagés (ceux appartenant à des réseaux de location) ont représenté plus d’un demi-milliard de trajets dans les villes américaines. Les vélos électriques privés viennent s’ajouter à ce total : en 2021, plus de 880 000 vélos électriques ont été vendus aux États-Unis, contre 608 000 voitures et camions électriques.

Les véhicules électriques (VE) représentent une petite partie des incendies de voitures, mais il est difficile pour les pompiers de contrôler les incendies de VE. En règle générale, un incendie de VE brûle à environ 2 760 °C, alors qu’un véhicule à essence en feu brûle à 815 °C. Il faut environ 2 000 gallons d’eau – soit environ 7,5 mètres cubes d’eau – pour éteindre un véhicule à essence en feu. Dans certains cas, le contrôle d’un feu de VE peut demander 10 fois plus d’eau.

Il s’agit d’une préoccupation majeure dans les grandes villes où les véhicules électriques sont populaires. Les services d’incendie de New York et de San Francisco déclarent ainsi avoir traité plus de 660 incendies impliquant des batteries lithium-ion depuis 2019. À New York, ces incendies ont causé 12 décès et plus de 260 blessés de 2021 à début 2023. Il y a un besoin clair d’améliorer les pratiques de manipulation et de charge des batteries, ainsi que de mettre en œuvre des améliorations techniques.

Un vélo électrique avec un sac Uber Eats accroché au guidon à côté d’un bâtiment.
Les vélos électriques sont populaires pour les services de livraison urbaine, ce qui signifie que de nombreux utilisateurs en dépendent pour leurs revenus. Lindsey Nicholson/UCG/Universal Images Group via Getty Images

Plusieurs batteries électriques par voiture électrique

Pour comprendre les incendies de batteries lithium-ion, il est important de rappeler quelques principes de base. Une batterie contient des produits chimiques qui contiennent de l’énergie, avec une séparation entre ses deux électrodes. Elle fonctionne en convertissant cette énergie chimique en électricité.

Les deux électrodes d’une batterie sont entourées d’un électrolyte, une substance qui permet à une charge électrique de circuler entre les deux bornes. Dans une batterie lithium-ion, ce sont les ions lithium qui portent la charge électrique. Lorsqu’un appareil est connecté à une batterie, des réactions chimiques se produisent aux électrodes et créent un flux d’électrons dans le circuit électrique externe qui alimente l’appareil.

Infographie montrant les éléments d’une batterie lithium-ion
Lorsqu’une batterie lithium-ion fournit de l’énergie à un appareil, les ions lithium (atomes porteurs d’une charge électrique) se déplacent de l’anode à la cathode. Les ions se déplacent en sens inverse lors de la recharge. Argonne National Laboratory/Flickr, CC BY-NC-SA

Les téléphones portables et les appareils photo numériques peuvent fonctionner avec une seule batterie, mais une voiture électrique a besoin de beaucoup plus d’énergie et de puissance. En fonction de sa conception, un véhicule électrique peut contenir des dizaines, voire des milliers de petites batteries individuelles, appelées cellules. Les cellules sont regroupées en ensembles appelés modules, qui sont à leur tour assemblés en packs. Un véhicule électrique standard contient un grand bloc-batterie avec de nombreuses cellules à l’intérieur.

Ce qui cause le départ de feu

Généralement, un incendie de batterie commence dans une seule cellule au sein d’un bloc-batterie. Une batterie peut s’enflammer pour trois raisons principales :

  • un dommage mécanique, tel qu’un écrasement ou un percement lors d’une collision entre véhicules,

  • un dommage électrique dû à un court-circuit externe ou interne,

  • ou encore une surchauffe.

Les courts-circuits des batteries peuvent être causés par une mauvaise manipulation ou par des réactions chimiques indésirables à l’intérieur de la cellule. Lorsque les batteries lithium-ion sont chargées trop rapidement, les réactions chimiques peuvent produire des aiguilles de lithium très pointues appelées dendrites sur l’anode (l’électrode avec une charge négative). Elles finissent par pénétrer le séparateur et atteindre l’autre électrode, ce qui provoque un court-circuit interne de la batterie.

De tels courts-circuits chauffent la cellule de la batterie à plus de 100 °C (212°F). La température de la batterie augmente d’abord lentement, puis d’un seul coup, atteignant sa température maximale en une seconde environ.

Un autre facteur qui rend les incendies de batteries lithium-ion difficiles à gérer est la production d’oxygène. Lorsque les oxydes métalliques de la cathode d’une batterie, ou une électrode chargée positivement sont chauffés, ils se décomposent et libèrent de l’oxygène gazeux. Les incendies ont besoin d’oxygène pour brûler, de sorte qu’une batterie capable de produire de l’oxygène peut entretenir un incendie.

En raison de la nature de l’électrolyte, une augmentation de 20 % de la température d’une batterie lithium-ion va aussi accélérer certaines réactions chimiques indésirables, ce qui va en retour dégager un excès de chaleur. Cette chaleur va faire augmenter la température de la batterie, ce qui accélère encore davantage les réactions. L’augmentation de la température de la batterie accroît le taux de réaction, créant un processus appelé emballement thermique. Lorsque ce phénomène se produit, la température d’une pile peut passer de 100 °C à 1000 °C en une seconde.

En cas d’emballement thermique, une batterie lithium-ion entre dans un état d’autoéchauffement incontrôlable qui peut conduire à un incendie ou à une explosion.

Comment limiter l’emballement thermique

Les méthodes pour assurer la sécurité des batteries peuvent se concentrer sur le suivi des conditions extérieures ou intérieures de la batterie. La protection extérieure implique en général l’utilisation de dispositifs électroniques tels que des capteurs de température et des soupapes de pression pour s’assurer que la batterie n’est pas soumise à une chaleur ou à une contrainte susceptible de provoquer un accident.

Cependant, ces mécanismes vont augmenter la taille et le poids des batteries, ce qui peut réduire les performances de l’appareil qu’elle alimente (si le véhicule doit déplacer un poids de batterie plus élevé, ndlt). De plus, ils ne sont pas toujours fiables en cas de températures ou de pressions extrêmes, comme celles produites lors d’un accident de voiture.

Les stratégies de protection interne, de leur côté, se concentrent sur l’utilisation d’équipements à sécurité intrinsèque. Cette approche permet de traiter les risques à la source.

Pour réduire l’intensité de l’emballement thermique d’une batterie, il faut une donc une combinaison d’améliorations logicielles et matérielles. Les scientifiques travaillent à la mise au point de cathodes qui libèrent moins d’oxygène lorsqu’elles se décomposent, d’électrolytes non inflammables, d’électrolytes à l’état solide qui ne s’enflamment pas et peuvent également contribuer à réduire la croissance des dendrites, et enfin de séparateurs qui peuvent résister à des températures élevées sans fondre.

Une autre solution est déjà utilisée : les systèmes de gestion des batteries, ou BMS (Battery Management System). Il s’agit d’équipements matériels et de logiciels intégrés dans les batteries qui peuvent surveiller les paramètres vitaux de la batterie, tels que l’état de charge, la pression interne et la température des cellules de la batterie.

Tout comme un médecin se base sur les symptômes d’un patient pour diagnostiquer et traiter sa maladie, les BMS peuvent diagnostiquer les problèmes au sein du bloc-batterie et prendre des décisions autonomes pour éteindre les batteries présentant des points chauds, ou pour modifier la répartition de la charge afin qu’aucune batterie individuelle ne devienne trop chaude.

La composition chimique des batteries évolue rapidement, de sorte que les conceptions les plus récentes vont demander le développement de nouveaux BMS. De nombreux producteurs de batteries forment des partenariats qui rassemblent des fabricants ayant des compétences complémentaires afin de relever ce défi.

Les utilisateurs peuvent également prendre des mesures pour maximiser la sécurité de leurs équipements, par exemple :

  • Utiliser l’équipement de charge et les prises recommandés par le fabricant, et évitez de surcharger ou de laisser un VE branché pendant la nuit.

  • Inspecter régulièrement la batterie pour détecter tout signe de dommage ou de surchauffe.

  • Garer le véhicule loin d’un environnement trop chaud ou trop froid – par exemple, garez-vous à l’ombre pendant les vagues de chaleur – pour éviter que la batterie ne subisse un stress thermique.

  • Enfin, en cas de collision ou d’accident impliquant un VE, suivez les protocoles de sécurité du fabricant et débrancher la batterie si possible afin de minimiser les risques d’incendie ou d’électrocution.

Apparao Rao, Professor of Physics, Clemson University; Bingan Lu, Associate Professor of Physics and Electronics, Hunan University; Mihir Parekh, Postdoctoral Fellow in Physics and Astronomy, Clemson University et Morteza Sabet, Research Assistant Professor of Automotive Engineering, Clemson University

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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