Dans l’océan des amendes et des condamnations qui a frappé BNP Paribas ces dernières années, c’est une goutte d’eau. Rien à voir avec la condamnation de la justice américaine de verser 8,9 milliards de dollars en 2014 pour avoir violé les embargos sur le Soudan, Cuba et l’Iran. Pas non plus la même échelle que l’amende de 350 millions de dollars (293 millions d’euros) imposée par les autorités américaines en mai pour avoir manipulé le marché des devises.
Le redressement fiscal auquel a été condamnée BNP Paribas à Londres n’en reste pas moins révélateur des impressionnants montages juridiques employés pour contourner l’impôt. Le tribunal administratif de première instance de la capitale du Royaume-Uni a condamné la banque française le 12 juin pour une fraude qui s’élève à 35 millions de livres (38 millions d’euros), mais l’affaire n’a été annoncée officiellement que vendredi 8 septembre par Her Majesty’s Revenue and Customs (HMRC), l’autorité fiscale britannique.
Le système monté par BNP Paribas comprend des entités au Luxembourg, à la City, en Irlande et aux îles Caïmans. « La totale ! », s’agace sur Twitter Chris Chavagneux, éditorialiste à Alternatives économiques.
Une perte artificielle
Les faits remontent à 2005, à une époque où l’évasion fiscale ne retenait guère l’attention. Le principe de la fraude est simple : créer artificiellement une perte pour réduire la facture fiscale. La méthode employée est l’achat et la vente d’un dividende, mais sans en céder les actions sous-jacentes. Cela porte un nom : le dividend stripping en anglais, littéralement « la suppression du dividende ».
Il faut s’accrocher pour suivre le cheminement de l’argent, dans des circuits opaques et exotiques. BNP Paribas a initialement créé une coquille vide, Harewood Investments No.5, une entreprise enregistrée aux îles Caïmans promettant de verser des dividendes à son actionnaire. La filiale du Luxembourg de la banque française a alors acheté l’intégralité de ses actions, pour 210 millions de livres. Cette somme a immédiatement été transférée sur les comptes de la filiale irlandaise de BNP Paribas.
Dans le même temps, la division londonienne de la banque française est entrée en jeu. La filiale luxembourgeoise lui a vendu les droits des dividendes, mais pour seulement 150 millions de livres. Elle s’est donc retrouvée avec une perte artificielle de 60 millions de livres, la différence entre 210 et 150 millions. Jusqu’à ce stade, BNP Paribas n’avait traité avec aucun acteur extérieur, se contentant de faire circuler l’argent entre ses filiales.
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