La réflexion est venue d’un de mes étudiants en médecine, qui m’avoua qu’il adorait l’odeur de vanille qui régnait dans la maison qu’il partage avec des amis qui vapotent… « C’est bon, non ? » m’a-t-il demandé.
Ma réponse n’a pas été spécialement enthousiaste.
« Hé bien non. Si vous pouvez sentir la vanille, vous respirez aussi probablement de la nicotine… »
La nicotine est un alcaloïde (comme la caféine, la morphine…) toxique particulièrement vicieux car incolore et inodore. Il est de plus extrêmement bien absorbé par nos voies respiratoires, y compris le nez, la bouche, les bronches… et même les oreilles.
Ceux qui les côtoient peuvent alors les respirer. Les défenses pulmonaires des fumeurs, des vapoteurs et de leurs voisins sont dépassées en cas d’expositions répétées.
En France, il est interdit de vapoter dans les moyens de transport fermés, les écoles, les bureaux fermés….Richard Mundl (CTK via AP Images)
Les leçons du tabagisme passif
À la fin des années 1980, le tabagisme passif a donné l’impulsion nécessaire pour modifier la législation relative au tabagisme.
Les professionnels de la santé avaient appris, des décennies plus tôt, grâce à une étude menée auprès de médecins britanniques fumeurs, que le tabagisme causait d’immenses dommages et une mort précoce chez les fumeurs. Mais ce n’est que plus tard qu’ils ont commencé à comprendre que le fait de vivre avec un fumeur, de travailler avec des fumeurs ou d’être exposé de manière répétée à la fumée de quelqu’un d’autre pouvait également provoquer cancer du poumon, bronchite chronique, aggraver l’asthme et les maladies cardiaques chez un non-fumeur. Les effets du tabagisme passif sur les enfants sont apparus plus préoccupants encore.
Les groupes de défense des droits ont commencé à défigurer ou à « relooker » les panneaux publicitaires sur le tabac et à ridiculiser leur publicité. En 1982, j’ai écrit un article publié dans le Medical Journal of Australia intitulé « A Tracheostomy for the Marlboro Man » sur ces efforts, les répercussions juridiques et les défis de l’industrie du tabac.
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Les attitudes ont aussi changé et les droits des non-fumeurs ont été peu à peu plus mis en avant. Nous avons tous pu vivre dans un environnement sans fumée en Australie pendant des décennies (depuis 15 ans en France, ndlr).
(En France, il est interdit de vapoter dans les établissements scolaires et destinés à accueillir des enfants, les lieux de travail collectif, mais pas dans les établissements de santé, les restaurants, cafés, centres commerciaux et lieux de travail accueillant du public, « sauf si le responsable des lieux en décide autrement », ndlr.)
Le vapotage passif peut exposer à la nicotine et des produits toxiques.Shutterstock
Les zones sans fumée suffisent-elles ?
Bien que le débat se poursuive sur le vapotage, sa sécurité et son efficacité en tant qu’aide au sevrage, nous ne pouvons pas attendre des années pour mesurer tous les effets du vapotage passif même moins nocif que le tabagisme passif.
Basé sur le principe de précaution en santé publique, le défi est d’informer dès aujourd’hui les non-vapoteurs, en particulier les jeunes non-vapoteurs, sur le phénomène – et leurs droits à vivre « sans vapotage », comme à respirer un air propre. Quitte à prendre position pour défendre ces droits, comme cela a été fait des décennies plus tôt contre le tabagisme passif.