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Vins et bières sans alcool : comment se rapprocher du goût « original »

Il existe une large gamme de bières sans alcool. Shutterstock
David Bean, Federation University Australia et Andrew Greenhill, Federation University Australia

La consommation d’alcool fait partie de la tradition française depuis des siècles, elle reste ancrée malgré ses risques et les quelque 40 000 décès annuels qu’elle provoque.

Cependant, une partie de la population désire réduire cette consommation en participant à des événements comme le « Dry January » et d’une manière générale les rayons des supermarchés commencent à se remplir de vins ou de bières sans alcool d’une qualité gustative bien supérieure à ce qui pouvait se faire dans le passé.

Comment, grâce à la microbiologie, conserver les goûts des boissons tout en éliminant l’alcool ?

Avec une augmentation de la demande, la plupart des marques de bière mondiales offrent maintenant des substituts sans alcool. Shutterstock

Tout commence par la fermentation

Les boissons alcoolisées sont produites grâce à des microbes, le plus souvent des levures, qui transforment les sucres en éthanol (alcool) au cours du processus de fermentation.

Outre la production d’éthanol, la fermentation entraîne également la production d’autres molécules qui vont participer à la saveur du produit final. Le processus de fermentation fait donc partie intégrante de la saveur de la bière et du vin, on ne peut pas s’en passer pour fabriquer des boissons à faible teneur en alcool ou sans alcool.

Pensez à la différence entre le jus de raisin non fermenté et le vin : ce n’est pas seulement la présence d’alcool qui crée le profil aromatique du vin.

Ainsi, la production de la plupart des vins et des bières sans alcool commence par le processus de fermentation typique, après quoi l’alcool est éliminé à l’aide de différentes techniques.

Deux techniques pour éliminer l’alcool

Les deux méthodes les plus courantes pour produire de la bière et du vin sans alcool sont la filtration et la distillation. Ces deux systèmes sont technologiquement avancés et coûteux, de sorte qu’ils ne sont généralement utilisés que par les grands producteurs.

Dans le cas de la filtration membranaire – et plus particulièrement d’une technique appelée « osmose inverse » – la bière et le vin sont pompés sous pression à travers des filtres dont les trous sont si petits qu’ils séparent les composés en fonction de leur taille moléculaire. Les molécules relativement petites, telles que l’eau et l’éthanol, passent au travers, mais pas les autres.

L’eau est continuellement ajoutée au mélange des composés « aromatiques » de plus grande taille pour reconstituer la bière ou le vin. Ce processus se poursuit jusqu’à ce que tout l’éthanol ait été éliminé.

Un autre procédé est la distillation, dans laquelle les composés sont séparés en fonction de leur température d’ébullition. La distillation nécessite donc de la chaleur, et la chaleur modifie la saveur de la bière et du vin, ce qui donne un produit moins proche de l’original.

Pour minimiser l’impact sur la saveur, la distillation utilisée pour fabriquer des produits sans alcool s’effectue à très basse pression et sous vide. Dans ces conditions, l’éthanol peut être éliminé à environ 35 °C-40 °C, contre 80 °C à la pression atmosphérique. Ce phénomène est basé sur le même principe que celui qui explique pourquoi l’eau bout à une température plus basse en altitude qu’au niveau de la mer.

Une grande variété de styles de bières est désormais disponible sous forme sans alcool. Shutterstock

Les petites brasseries se démarquent

Si l’augmentation de la production de bières à faible teneur en alcool ou sans alcool reflète la préférence des consommateurs, elle est également due en partie à la large gamme de bières artisanales désormais disponible.

Des brasseries artisanales produisent des bières à faible teneur en alcool sans équipement très coûteux. Elles y parviennent en manipulant soigneusement le processus de fermentation à l’aide de deux méthodes principales.

Dans la première méthode, les brasseurs réduisent intentionnellement la quantité de sucres disponible pour la levure. Avec moins de sucre à utiliser, la levure produit moins d’éthanol.

Il existe plusieurs façons d’y parvenir, notamment en augmentant ou en diminuant la température pendant l’empâtage (le processus d’extraction des sucres simples du grain d’orge). Le brasseur peut également arrêter le processus de fermentation avant que trop de sucre ne soit transformé en alcool.

La salle de brassage de l’Université de la Fédération dispose de tous les outils nécessaires à la réalisation d’un bon brassin, y compris des cuves de fermentation coniques. Federation University, Author provided

La deuxième méthode consiste à utiliser des levures différentes. Traditionnellement, la plupart des bières sont produites à l’aide de la levure Saccharomyces. Cette espèce a été domestiquée il y a de cela des millénaires pour fabriquer de la bière, du vin et du pain.

Mais il existe des milliers d’espèces de levures, et certaines produisent très peu d’éthanol. Ces levures gagnent en popularité dans la production de bières à faible teneur en alcool. Elles fournissent toujours les composés aromatiques attendus, mais avec des niveaux d’alcool très bas (parfois même inférieurs à 0,5 %).

Bien que la plupart des souches de levure soient disponibles dans le commerce et décrites scientifiquement, certaines brasseries restent secrètes quant à la souche exacte qu’elles utilisent pour produire des bières à faible teneur en alcool.

Plusieurs entreprises se consacrent au développement de nouvelles souches de levure pour le marché de la brasserie. Outre l’utilisation de souches d’origine naturelle, deux souches peuvent être croisées pour créer des hybrides. Shutterstock

De moins en moins de différence

Il est difficile de fabriquer une bière ou un vin à faible teneur en alcool ou sans alcool qui aurait exactement le même goût que ses équivalents à teneur élevée en alcool. En effet, l’éthanol contribue au profil aromatique des boissons alcoolisées, c’est plus évident dans le vin (généralement environ 13 % d’alcool) que dans la bière (environ 5 %).

L’élimination de l’éthanol et de l’eau entraîne également l’élimination de molécules de petites tailles et de composés volatils (produits chimiques qui se vaporisent dans des conditions atmosphériques normales) – bien que les fabricants fassent de leur mieux pour les réintégrer dans le produit final.

De même, la modification des conditions de brassage ou l’utilisation de souches de levure non conventionnelles pour la bière à faible teneur en alcool conduit également à des profils aromatiques différents de ceux obtenus par un processus classique.

Malgré ces défis, les producteurs améliorent constamment leurs produits. Nos enquêtes ont montré que même certains buveurs de bière expérimentés ne peuvent pas distinguer les bières sans alcool de leurs équivalents alcoolisés.

Donc, si l’humeur ou les circonstances le justifient, n’hésitez pas à essayer une bière ou un vin à faible teneur en alcool ou sans alcool pendant ce mois de janvier. Vous serez peut-être surpris par l’amélioration de la gamme et de la qualité de ces produits.

David Bean, Senior Lecturer in Microbiology and Fermentation Technology, Federation University Australia et Andrew Greenhill, Associate Professor in Microbiology and Fermentation Technology, Federation University Australia

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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