Travailler debout présente certains avantages, mais ne résoud pas tous les problèmes liés à la sédentarité. Shutterstock
Vaut-il vraiment mieux travailler debout plutôt qu’assis ?
Josephine Chau, Macquarie UniversityLes bureaux « assis-debout », comme leur nom l’indique, permettent non seulement de travailler assis, mais aussi, en se déployant grâce à un vérin ou via un simple interrupteur, de pouvoir travailler debout.
Ce type de mobilier transformable s’est largement démocratisé ces dernières années, au prétexte que passer sa journée de travail debout serait meilleur pour la santé. Mais est-ce vraiment le cas ?
Rester longtemps debout expose-t-il à d’autres risques ? Vaut-il mieux acheter un bureau assis-debout, ou se débarrasser du sien, si l’on en possède déjà un ? Voici ce que nous apprennent les dernières recherches scientifiques sur le sujet.
Passer trop de temps en position assise : quels dangers ?
Nous sommes nombreux à passer la majorité de nos heures de veille quotidiennes en position assise. Récemment, une revue de littérature scientifique a une fois de plus enfoncé le clou quant aux effets délétères sur la santé des périodes prolongées et ininterrompues passées en position assise.
Les personnes qui restent trop longtemps assises courent ainsi plus de risques de développer des maladies chroniques telles que le diabète de type 2, des maladies cardiaques voire certains cancers, ou encore de voir leur espérance de vie raccourcie. Une position assise prolongée peut également entraîner des troubles musculosquelettiques, en particulier au niveau du cou et du dos.
Cette situation est encore plus délétère dans le cas de personnes qui font très peu d’exercice, ou qui ne respectent pas les recommandations en matière d’activité physique.
Rappelons que si s’activer physiquement permet bel et bien de diminuer les risques associés à la sédentarité, cela ne suffit pas systématiquement à contrebalancer complètement les effets négatifs de longues heures quotidiennes passées en position assise.
Rester debout pendant de longues périodes peut aussi s’avérer délétère
Passer de longues périodes en position debout peut également avoir des conséquences négatives sur la santé, en particulier du point de vue musculosquelettique. Cela peut en effet entraîner une fatigue musculaire, un gonflement des jambes, un développement de varices, ainsi que la survenue de douleurs ou de sensations d’inconfort dans le bas du dos et les membres inférieurs (hanches, genoux, chevilles et pieds).
Des travaux de recherche récents suggèrent que limiter la station debout à environ 40 minutes d’affilée réduirait les risques de développer des douleurs musculaires et articulaires. Ceci est valable non seulement dans le cas de personnes qui ont déjà ressenti des symptômes auparavant, mais aussi pour celles qui n’ont jamais eu de douleurs.
Il a été constaté que les personnes qui ont déjà souffert après être restées longtemps debout ont une probabilité plus élevée d’expérimenter à nouveau des douleurs lors d’une station verticale prolongées, y compris si elles s’assoient régulièrement, dans l’objectif de faire une pause pour récupérer.
Soulignons que tout le monde ne ressentira pas forcément ces symptômes musculosquelettiques après être resté debout pendant des périodes prolongées, certains individus étant plus résistants que d’autres.
Rompre avec les longues périodes en position assise
Réduire ou interrompre les périodes passées en position assise en se levant ou en se déplaçant peut permettre d’améliorer la circulation sanguine. Cela pourrait aussi influer positivement sur le métabolisme et l’état de santé du muscle cardiaque, voire sur la santé mentale et l’espérance de vie.
Des modélisations indiquent que s’astreindre à remplacer, chaque jour, une heure de position assise par une heure passée debout peut conduire à des améliorations en matière de tour de taille, de niveau de graisse et de cholestérol.
Le bénéfice est encore plus important lorsque la position assise est remplacée par la marche ou par une activité physique d’intensité modérée à vigoureuse.
Ainsi, interrompre de longues périodes passées en position assise par deux minutes de marche toutes les 20 minutes ou cinq minutes de marche toutes les 30 minutes peut aussi permettre d’améliorer la glycémie, ainsi que les niveaux de graisse et de cholestérol.
D’autres travaux indiquent qu’il est également efficace de pratiquer toutes les 30 minutes des interruptions basées sur trois minutes de marche légère ou d’exercices de résistance simples, tels que des squats ou des élévations des mollets.
Les bureaux assis-debout sont-ils utiles ?
Les bureaux assis-debout peuvent s’avérer efficaces pour réduire le temps passé en position assise au cours d’une journée de travail. En outre, les utilisateurs de ce type de bureaux ne restent généralement pas debout de longues heures durant. Ils ont plutôt tendance à alterner entre les postures assises et debout au cours de la journée.
Cependant, la mise en place de nouvelles habitudes de travail ne va pas toujours de soi, et sur le long terme, de nombreux utilisateurs de bureaux assis-debout ont tendance à revenir exclusivement à la position assise.
Il faut par ailleurs avoir conscience que, dans le cas des employés de bureau, le recours au mobilier assis-debout n’est pas suffisant pour réellement diminuer les effets délétères du temps passé en position assise.
Afin de s’assurer que les initiatives visant à « passer moins de temps assis et bouger plus » soient effectivement mises en œuvre (et maintenues de manière efficace sur le long terme) dans les entreprises, les employeurs doivent donc intégrer cet état de fait dans les politiques internes de leurs organisations, ainsi que dans la culture d’entreprise et lors de la conception des environnements de travail.
Se débarrasser de son bureau assis-debout ou le garder ?
Si vous possédez déjà un bureau assis-debout, la décision de le conserver ou de vous en débarrasser dépendra de plusieurs facteurs. Avant tout, évaluez vos habitudes : utilisez-vous régulièrement votre bureau en position debout, ou privilégiez-vous plutôt la position assise ?
Votre confort entre également en ligne de compte. Lorsque vous travaillez debout (ou assis…) durant de longues périodes, êtes-vous incommodé ou ressentez-vous une fatigue, des douleurs spécifiques ? Si tel est le cas, vous devriez peut-être ajuster votre routine « assis-debout », ou changer l’ergonomie de votre bureau en ajoutant des accessoires supplémentaires (un tapis de sol pour rendre plus confortable votre station verticale, par exemple, ou un repose-pieds pour améliorer votre assise, etc.).
Autre conseil : livrez-vous à une évaluation de l’ergonomie de votre bureau assis-debout. Est-il correctement configuré pour travailler de manière confortable ?
Réfléchissez aussi à vos besoins en matière de santé. Le fait de réduire le temps passé en position assise, ou d’interrompre régulièrement ces périodes en restant debout, atténue-t-il votre inconfort ?
Si votre objectif est d’améliorer votre santé, gardez à l’esprit que vous lever et vous déplacer régulièrement durant de votre journée de travail constitue une alternative à l’achat d’un bureau assis-debout, car cela vous permettra d’obtenir les mêmes bénéfices.
Si vous avez un problème de santé ou êtes sujet à des troubles musculosquelettiques persistants, consultez votre médecin ou demandez à votre employeur de faire évaluer votre poste de travail par un expert en ergonomie. Leurs conseils pourront vous aider à déterminer si passer à un bureau assis-debout peut présenter un intérêt, et, le cas échéant, ils pourront vous indiquer comment l’utiliser de la manière la plus efficace possible.
Enfin, il faut avoir conscience qu’acquérir un tel dispositif représente un investissement non négligeable, que ce soit en termes de coût ou d’espace. Si vous ne l’utilisez pas souvent pour travailler en station verticale, il se peut que ce type de bureau n’ait pas vraiment de valeur ajoutée pour vous.
Pratiquer une activité physique régulière demeure le plus important
Les recommandations australiennes en matière d’activité physique, tout comme celles de l’Organisation mondiale de la santé, (OMS) (et des autorités sanitaires françaises, ndlr) précisent qu’il est important de limiter le temps passé assis.
Interrompre les périodes passées en position assise par des périodes d’activité physique – même de faible intensité – présente clairement des avantages pour la santé.
L’OMS recommande en outre aux adultes d’envisager de « faire davantage que les niveaux d’activité physique d’intensité modérée à vigoureuse recommandés » afin de diminuer les conséquences délétères résultant des longues périodes assises.
C’est probablement le point le plus important : rester simplement debout à son bureau ne suffit pas à réduire les effets délétères d’une position assise prolongée. Pour cela, il est indispensable de bouger davantage.
Josephine Chau, Senior Lecturer in Public Health, Macquarie University
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.