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Après vingt-quatre heures de flou, l’Assemblée a rejeté un amendement favorisant fiscalement l’huile de palme.

Cela aurait pu être une sortie de route malencontreuse au cœur du long examen du budget. L’épisode a, au contraire, révélé une fracture profonde au sein du macronisme. Après vingt-quatre heures de tiraillements, de Tweet rageurs et de concertation au plus haut sommet de l’Etat, l’Assemblée nationale a finalement rejeté, vendredi 15 novembre au soir,à une écrasante majorité (58 voix contre, 2 pour), un amendement au projet de loi de finances (PLF) pour 2020 favorisant fiscalement l’huile de palme. Cette dernière est considérée comme ayant des conséquences dramatiques sur l’environnement, notamment en termes de déforestation. Mais le gouvernement s’est une nouvelle fois prononcé, vendredi soir, en faveur de cet amendement.

D’abord adopté, jeudi, en quelques secondes et à la surprise générale, celui-ci a semé le trouble entre la majorité et l’exécutif. Il a surtout réveillé le débat lancinant qui oppose impératif écologique et intérêts économiques. Un affrontement en place publique dont se serait bien passé Emmanuel Macron. A l’orée de la seconde partie de son mandat, le président de la République se pose en défenseur de la planète. De son côté, alignée sur les éléments de langage élyséens, la majorité se targue de défendre un budget « vert ».

C’était sans compter sur l’attitude de certains députés et membres de l’exécutif. Déposé par le député (MoDem) des Bouches-du-Rhône Mohamed Laqhila, l’amendement problématique a initialement été adopté sans débat au cours de la longue litanie de l’examen du PLF, qui en est à sa cinquième semaine de discussions au Palais-Bourbon. Il prévoyait le report à 2026 de la fin de l’avantage fiscal dont bénéficie l’huile de palme, qui reste considérée, pour le moment, comme un biocarburant.

« Sous le manteau »

L’amendement controversé visait à en modifier un autre, adopté dans le précédent budget, selon lequel l’huile de palme doit être exclue de la liste des biocarburants dès le 1er janvier 2020. Une mesure dénoncée par le groupe pétrolier Total, qui a démarré, début juillet, l’exploitation d’une raffinerie d’agrocarburants à La Mède (Bouches-du-Rhône), près de Marseille, activité pour laquelle il utilise de l’huile de palme. L’amendement de M. Laqhila était cosigné par d’autres députés, notamment élus des Bouches-du-Rhône, qui émargent au MoDem, à La République en marche (LRM) et chez Les Républicains (LR).

Visiblement sensible aux arguments du pétrolier, le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, avait donné, jeudi, un avis favorable au nom du gouvernement, contre l’avis du rapporteur (LRM) du budget, Joël Giraud. Mais l’amendement n’ayant pas été défendu par ses auteurs, il n’avait pas donné lieu à discussion. Une fois le dispositif voté, l’émoi a rapidement gagné l’opposition de gauche comme la majorité. « L’amendement est passé en deux secondes, sans aucun débat. C’est une erreur à rattraper en deuxième lecture », a estimé la députée LRM de l’Allier Bénédicte Peyrol. « On s’est fait niquer ! », a embrayé Joël Giraud auprès de l’Agence France-Presse. Il a demandé une réunion de la commission des finances afin d’obtenir une nouvelle délibération.

 


Lire la suite : L’huile de palme rouvre la fracture entre économie et écologie au gouvernement et dans la majorité


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