La saison 5 de « The Crown » est sortie : cap sur la décennie infernale des Windsor
Cristina Barreiro Gordillo, Universidad CEU San PabloLa cinquième saison de The Crown, la série britannique consacrée à la vie d’Elizabeth II d’Angleterre, est sortie le 9 novembre. Le nouveau volet couvre les événements des années 1990 qui, sur le plan politique et privé, ont défini cette période de son règne. Mais que s’est-il passé exactement pendant ces années ?
1992, annus horribilis
L’année 1992 marque le 40e anniversaire de l’accession au trône d’Elizabeth II. Toutefois, dans le discours qu’elle prononce le 24 novembre pour marquer l’occasion, Elizabeth II décrit 1992 comme son annus horribilis.
Le discours intervient quatre jours après l’incendie du château de Windsor, qui a détruit une partie du bâtiment. Au cours des mois précédents, les tabloïds londoniens ont ouvert leurs éditions quotidiennes en évoquant les frictions dans la relation entre le prince et la princesse de Galles, le divorce de la princesse Anne et de son mari, le capitaine Mark Phillips, et le divorce entre le prince Andrew et Sarah Ferguson.
Les scandales sont continuels et rien ne semble calmer la presse à scandale qui se déchaîne contre les enfants de la Reine. L’intransigeance de l’incombustible reine mère dans les affaires sentimentales de ses petits-enfants n’a pas non plus arrangé la situation.
L’époque est également marquée par de nombreux changements dans l’ordre international. Après plus d’une décennie en tant que Premier ministre, Margaret Thatcher laissait Downing Street aux mains de John Major, moins charismatique, mais doté d’un gouvernement conservateur capable de remettre sur les rails la situation en Irlande du Nord après des années de violence et de meurtres.
La fin de la guerre froide provoque l’effondrement de l’Union soviétique. Boris Eltsine tente de faire face à une nouvelle Russie menacée par la corruption et la guerre en Tchétchénie.
Bien qu’Elizabeth II soit parvenue à maintenir sa légitimité en tant que chef d’État et du Commonwealth, la famille royale s’effrite sous ses yeux.
Charles et Diana
Le désaccord entre le prince Charles et Diana a été rendu public bien que tous deux aient essayé de protéger leurs deux plus jeunes fils, William et Harry, qui avaient respectivement onze et neuf ans lorsque la séparation a été annoncée en décembre 1992.
Camilla, toujours mariée au brigadier Andrew Parker Bowles, était peut-être alors la figure la plus détestée de la société britannique, une source infinie de dérision et de reproches. Peu de gens comprenaient pourquoi le prince de Galles préférait son éternelle maîtresse, peu raffinée et vulgaire, au glamour que dégageait Diana.
Élisabeth II ne l’a probablement pas compris non plus, même si ses relations avec sa belle-fille avaient été peu cordiales jusque-là. Elle a enduré pendant des décennies les rumeurs constantes sur les aventures extraconjugales du duc d’Édimbourg. Même au début des années 1990, alors qu’ils avaient tous deux largement dépassé l’âge mûr, l’existence de Lady Penny (Penelope Knatchbull) dans la vie sentimentale de son mari, une amie proche souvent considérée comme une maîtresse, était bien connue.
[Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. Abonnez-vous aujourd'hui]
La reine se souvient également de quelle façon la vie « licencieuse » de sa sœur Margaret a jeté le discrédit sur l’institution royale, même si depuis ces années de jeunesse, les relations entre elles se sont apaisées.
La goutte d’eau a fait déborder le vase lorsque Diana, en deuil, a donné une interview en 1995 au journaliste de la BBC Martin Bashir dans laquelle elle a déclaré qu’ils étaient « trois dans leur mariage ». Le divorce suit rapidement et est rendu public en 1996.
Charles… successeur ?
Buckingham Palace était sur le point d’exploser. La popularité de l’héritier était au plus bas et certains ont osé faire allusion à des accords présumés entre le prince Charles et John Major pour tenter de forcer une transmission accélérée de la couronne, ce que l’ancien Premier ministre lui-même a nié.
Si John Major a pu avoir des divergences d’opinion sur la manière de traiter les questions relatives au nouvel ordre du Commonwealth et, en particulier, le transfert de la souveraineté sur Hongkong du Royaume-Uni à la République populaire de Chine – l’un des sujets brûlants de la politique étrangère de la Couronne au milieu des années 1990 –, il n’y a jamais eu de manœuvres de Charles contre la Reine pour avancer la succession.
De plus, la vision britannique de l’héritier présomptif était si négative qu’une telle intrigue de palais aurait été incompréhensible.
Seul le plus jeune des enfants de la Reine, le prince Edward, qui avait abandonné ses activités audiovisuelles pour travailler pour la couronne, semblait alors épargné par les scandales sentimentaux. Edward essayait de garder secrète son histoire naissante avec la fille d’un vendeur de voitures, Sophie Rhys-Jones. Pour la reine et le duc d’Édimbourg, cela allait également être difficile à avaler.
La « princesse du peuple »
Pendant ce temps, les sujets britanniques commençaient à construire le mythe de la « princesse du peuple » : celui de la pauvre Diana abandonnée, déprimée, boulimique qui, enfoncée dans la douleur de la trahison, tombait dans les bras des médecins et des gardes du corps. Elle était la martyre, il était le traître. La Reine tente de gérer la pire crise institutionnelle de la monarchie depuis l’époque d’Edouard VIII.
Au milieu des gros titres et des poursuites photographiques des paparazzi, la « Lady Di » autrefois apathique commence à renaître de ses cendres, portant du Versace, fréquentant des artistes et se souciant des problèmes de société, ceux que la monarchie semble négliger : la lutte contre le sida, les
Cependant, elle commence également à avoir une liaison avec le fils rebelle du milliardaire Al-Fayed. Dodi Al-Fayed était d’origine égyptienne et de confession musulmane, ce qui était inacceptable pour la mère du futur souverain du Royaume-Uni.
En cet été 1997, il semblait que l’arrivée des travaillistes de Tony Blair au gouvernement ouvrirait une nouvelle ère. Mais le 31 août 1997, le monde s’est réveillé avec la nouvelle de la mort de Diana.
Cristina Barreiro Gordillo, Profesora Titular Historia Contemporánea, Universidad CEU San Pablo
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.