Le président Macron aurait manifestement préféré s’appuyer sur les Etats-Unis pour peser sur la Chine mais, malgré ses efforts de séduction, il n’est pas parvenu à convaincre Donald Trump de ne pas faire cavalier seul sur les questions économiques, climatiques et diplomatiques. Il n’a d’autre choix que de s’appuyer sur la Chine tout simplement pour exister sur la scène mondiale et si possible peser face aux Etats-Unis.
Analyse. La visite ne figurait pas à l’agenda. Pourtant, mercredi 6 novembre, avec plus d’une heure de retard sur le planning officiel, Emmanuel Macron a tenu à se rendre, sans journaliste, au temple de Confucius avant de quitter Pékin et de s’envoler pour Paris. Comme si, à l’issue d’une visite officielle de 52 heures dont 9 passées aux côtés de son homologue Xi Jinping, le président français en était arrivé à la conclusion que la compréhension de la Chine actuelle passait par celle de ce philosophe.
Rejeté par Mao ainsi que par une grande partie de l’élite chinoise du XXe siècle pour son respect de l’ordre établi, Confucius a été réhabilité par Xi Jinping pour la même raison. Quelques heures plus tôt, le président avait déclaré avoir évoqué avec son homologue chinois la question des droits de l’homme au cours d’un « échange franc et pleinement respectueux ». Plus question de chercher à imposer des valeurs certes « fondamentales » pour les Européens mais que les dirigeants chinois refusent de qualifier d’« universelles ».
En janvier 2018, lors de sa première visite officielle en Chine, Emmanuel Macron insistait sur la « réciprocité » qui devait caractériser les échanges entre les deux pays. Le président avait également critiqué les « nouvelles routes de la soie », ce colossal projet d’investissements chinois tout autour du globe, trop « à sens unique » selon lui. De son côté, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, dénonçait, « les investissements de pillage » chinois en Europe.
Changement de ton
Moins de deux ans plus tard, le changement de ton est notable. La France accepte, cette fois, d’être invitée d’honneur à la Foire aux importations de Shanghaï vue, par certains, comme un exercice de propagande chinois, et la « réciprocité » a disparu du vocabulaire présidentiel. Au contraire, Emmanuel Macron loue désormais « le choix de l’ouverture » fait par la Chine et Bruno Le Maire ne se plaint plus de ce que les Chinois achètent mais de ce qu’ils n’achètent pas : en l’occurrence, une usine de retraitement des déchets nucléaires.
Ce changement de ton s’accompagne d’un changement de format : pour peser face à la Chine, le président français a choisi d’« européaniser » sa délégation. Il était accompagné de la ministre allemande de l’éducation et de la recherche, Anja Karliczek – qui n’a pas paru très à l’aise dans cet exercice – ainsi que de Phil Hogan, aujourd’hui commissaire européen à l’agriculture et demain au commerce. Par ailleurs, des entreprises allemandes ont rejoint les françaises lors d’une rencontre avec ces trois responsables européens à Shanghaï. Déjà en mars, Emmanuel Macron avait invité la chancelière allemande Angela Merkel et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker à participer à un entretien à l’Elysée avec Xi Jinping.
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