Le plasticien américain a reproduit quasiment à l’identique dans l’une de ses sculptures un cliché du photographe français Jean-François Bauret.
Le plasticien américain Jeff Koons, ancien trader, a été condamné en appel la semaine dernière à Paris, pour avoir contrefait dans l’une de ses sculptures, baptisée Naked, créée en 1988, un cliché du photographe français Jean-François Bauret (1932-2014), datant de 1975. La Cour d’appel a confirmé un jugement de 2017 qui condamnait la société Jeff Koons LLC et le Centre Pompidou – où l’œuvre devait être exposée –, à verser 20 000 euros de dommages et intérêts au titre de préjudice moral et patrimonial aux ayants droit du photographe. La société Jeff Koons LLC devra également payer 4 000 euros à la famille du photographe pour avoir reproduit l’œuvre litigieuse sur son site Internet.
Cette sculpture en porcelaine, d’un peu plus d’un mètre de haut, représente deux enfants nus debout : un garçonnet offre délicatement quelques fleurs à une petite fille aux longs cheveux. Jeff Koons a ajouté quelques éléments kitsch de décor, dont un socle en forme de cœur constellé de fleurs. La pose des enfants est rigoureusement identique dans les deux œuvres.
Le plasticien, dont la sculpture Rabbit a été vendue au montant record de 91,1 millions de dollars (82 millions d’euros), pour un artiste vivant, n’a toutefois pas été condamné à titre personnel. Me Stéphanie Legrand, avocate des ayants droit de Jean-François Bauret, s’est félicitée, dans un entretien à l’AFP, que « la responsabilité du Centre Pompidou » ait été « retenue ». A ses yeux, la direction de l’établissement « avait tenté de se dédouaner, mais les musées doivent être vigilants avant d’exposer, surtout avec le passif de Koons dans le domaine de la contrefaçon ».
De multiples accusations de plagiat
L’artiste – dont Le Bouquet de Tulipes a été inauguré en octobre, après bien des polémiques, dans les jardins des Champs-Elysées à Paris – a fait face lors de sa carrière à de multiples accusations de plagiat. « C’est en effet la troisième décision rendue en France contre l’artiste américain », a souligné, toujours à l’AFP, Jean Aittouares, avocat du publicitaire Franck Davidovici. Ce dernier avait créé, en 1985, un visuel pour une campagne de publicité appelée Fait d’hiver pour la marque de prêt-à-porter Naf Naf. Il y représentait une jeune femme allongée dans la neige secourue par un petit cochon portant à son cou un tonnelet de saint-bernard.
En 2018, Jeff Koons a été condamné pour « contrefaçon » pour avoir copié, en 1988, sous forme de sculpture portant le même nom, Fait d’hiver, ce cliché. Le plasticien américain avait ajouté, là encore, quelques éléments de décors, comme des petits pingouins, et avait dévêtu la mannequin aux cheveux courts et bruns, lui faisant porter un simple haut en résille noire à la place d’une doudoune. « Des différences minimes », selon le Tribunal de grande instance de Paris, pour qui « la contrefaçon était constituée », d’autant plus que Jeff Koons n’avait pas demandé l’accord du photographe pour modifier son visuel.
« Art de l’appropriation »
En 1992, il a été condamné aux Etats-Unis pour sa sculpture String of Puppies, qui plagiait, là encore, le cliché d’un photographe. Un an plus tard, nouvelle condamnation pour avoir représenté sans autorisation Odie, un personnage de la série Garfield dans Wild Boy and Puppy. En 2017, les internautes ukrainiens s’étaient déchaînés contre lui, car il avait présenté à New York une sculpture gonflable représentant une danseuse assise, copie quasiment conforme d’une figurine d’une sculptrice ukrainienne décédée en 1993.
Faisant souvent fi du droit d’auteur, Jeff Koons justifie cette transgression du droit en parlant d’« art de l’appropriation ». Les œuvres pour lesquelles il a été condamné appartiennent à la série Banality, dont le principe consiste à créer une œuvre à partir d’objets achetés dans le commerce ou publiés dans la presse. Des citations certes, mais illégales.
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