Dans son dernier livre, "Un défi de civilisation" (*), Jean-Pierre Chevènement essaie de comprendre comment la France a pu devenir la cible d'un terrorisme porté par ses propres enfants. Selon lui, il faut remonter bien en arrière - au moment de la Première guerre mondiale - pour identifier le long processus de « haine de soi » qui est à l'œuvre en France.
Jean-Pierre Chevènement s'inquiète aussi d'une « globalisation devenue folle » qui a créé des fractures géographiques, sociales, générationnelles. Surtout, elle a mis en crise le modèle républicain et « périmé » le projet européen initié par la France après 1945. Jean-Pierre Chevènement défend un projet "d'Europe européenne" de l'Atlantique à l'Oural, qui permettrait à l'Europe de se relever et de peser face aux Etats-Unis et à la Chine. Pour la France, l'ancien ministre défend l'idée d'un gouvernement de « salut public » et regrette la disparition de toute politique industrielle. Et s'il ne conteste pas qu'il y a des efforts à demander au pays pour le redresser, il prône cependant de l'équité dans la répartition de ces efforts. Équité qu'il ne retrouve pas dans le programme de François Fillon.
LA TRIBUNE - Dans votre dernier ouvrage, Un Défi de Civilisation, vous tentez de comprendre comment la France a pu devenir la cible d'un terrorisme porté par ses propres enfants. Vous identifiez un long processus de haine de soi à l'œuvre dans notre pays qui, selon vous, remonte au début du 20e siècle...
JEAN-PIERRE CHEVÈNEMENT - Selon moi, ce phénomène prend sa source dans le prix exorbitant qu'a dû payer la France pour préserver son indépendance durant la première guerre mondiale. Il en a résulté un sentiment très profond de désorientation et de rejet. D'autant que ce conflit a donné naissance à des monstres que la France de la troisième République n'était pas préparée à affronter : le bolchévisme, le fascisme et, plus tard, le nazisme. Le pacifisme