Deux ados sont morts depuis le début de l'année après avoir ingurgité ce médicament détourné en drogue.
Ces chiffres ne sont que la partie émergée d'un phénomène en pleine expansion. Depuis le début de l'année, cinq cas d'intoxication grave à la codéine ont été signalés chez des jeunes, dont deux sont décédés, selon l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament).
Comme Pauline, 16 ans, la dernière victime en date, que ses proches croyaient sans histoires, de plus en plus de mineurs détournent l'usage d'antidouleurs à la codéine, vendus en pharmacie sans ordonnance, à des fins «récréatives». Cet antalgique, de la même famille que l'opium, provoque une sensation de défonce avec un ralentissement du rythme cardiaque. Il y a un an, le «purple drank», mélange de sirop pour la toux à la codéine, d'antiallergique, de Sprite et de colorant violet, avait déjà fait l'objet d'une mise en garde de l'ANSM. L'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) évoquait aussi «plusieurs cas d'hospitalisation» dès 2015.
La dépendance s'installe assez vite
Malgré ces alertes, la mode de ce cocktail lénifiant, vanté par les rappeurs américains dès les années 1990, ne faiblit pas. Mais, depuis un an, une nouvelle tendance émerge : celle des comprimés à la codéine, comme le Klipal ou le Codoliprane vendus 2 à 3 € la boîte. «Nous voyons arriver de plus en plus de personnes en difficulté avec ces substances psychoactives», constate un médecin sur le forum de discussion et de prévention Psychoactif.
Ces observations de terrain devancent les études, encore rares. Selon Florence Vorspan, addictologue à l'hôpital Fernand-Widal, à Paris (AP-HP), la toxicité de la codéine «peut entraîner un coma, parfois mortel si cette substance est associée à des anxiolytiques et de l'alcool». Au bout de quelques mois d'usage régulier, la dépendance s'installe. Et l'arrêt de sa consommation provoque de grandes douleurs et une incapacité à dormir pendant quatre à cinq jours. Sans compter le paracétamol contenu dans le Codoliprane à l'origine d'hépatites aiguës à haute dose.
A l'ANSM de se prononcer
Les comprimés sont-ils encore plus dangereux que le sirop ? «Oui. Si on le sniffe ou on l'injecte, les effets sont démultipliés, selon Florence Vorspan. Mais, en France, les médicaments sont plus faiblement dosés qu'aux Etats-Unis où il y a une vague de surdoses.»
Pourtant, aujourd'hui, même des enfants peuvent s'en procurer légalement dans les officines. «Les professionnels ont le droit de refuser s'ils ont des doutes», défend Alain Delgutte, président du Conseil central de l'ordre national des pharmaciens. Sur la question de l'interdiction, il estime que c'est à l'ANSM de se prononcer. Mais il le reconnaît : «Ce phénomène nouveau témoigne d'un mal-être chez les jeunes, d'une volonté d'échapper au quotidien. C'est un vrai problème.»...
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