Le gouvernement a demandé aux employeurs « d’être compréhensifs » pour la journée de grève du 5 décembre. Jusqu’à quel point sont-ils vraiment obligés de l’être.
Jeudi 5 décembre, la circulation des transports en commun devrait être réduite à sa portion congrue, au premier jour du mouvement social contre la réforme des retraites. La mobilisation s’annonce forte, notamment à la SNCF et à la RATP, où les trois syndicats représentatifs (UNSA, CGT et CFE-CGC) appellent à « une grève illimitée ». De grosses difficultés sont également prévues dans les autres transports urbains.
« Je demande aux employeurs d’être compréhensifs », a déclaré la ministre du travail, Muriel Pénicaud, le 24 novembre sur Europe 1, estimant qu’il « ne [fallait] pas demander aux gens de faire des acrobaties, de passer quatre ou six heures dans les transports ».
Quelles sont les règles en pareil cas ?
Les salariés ont-ils le droit de télétravailler ?
Commençons par une évidence : toutes les professions, en particulier celles qui requièrent un contact avec le public, ne sont pas éligibles au télétravail.
Pour les salariés dont le travail peut être effectué à distance, un accord de l’employeur est requis. « En l’absence d’accord collectif ou de charte, lorsque le salarié et l’employeur conviennent de recourir au télétravail, ils formalisent leur accord par tout moyen », précise l’article L1222-9 du code du travail.
Jacqueline Cortès, avocate en droit du travail à Paris, estime qu’il est « souhaitable de formaliser » cette journée de télétravail en précisant sa durée, le lieu depuis lequel le salarié va travailler, ou encore les horaires prévus. « En cas d’accident, il faut prouver qu’on était bien en télétravail », explique-t-elle. « Le télétravail, ça ne s’improvise pas », abonde Eric Rocheblave, avocat spécialisé en droit du travail au barreau de Montpellier, rappelant que ce mode de travail peut, en outre, poser des questions « en matière d’hygiène et de sécurité ».
« L’employeur qui refuse d’accorder le télétravail à un salarié occupant un poste permettant d’en bénéficier (dans les conditions prévues par accord collectif ou par charte) doit motiver sa réponse », ajoute le site service-public.fr.
Les salariés peuvent-ils poser une journée de congés payés ?
Les salariés peuvent poser une journée de congés payés ou de réduction du temps de travail (RTT), avec accord de leur employeur. S’ils en disposent, il s’agit d’une des solutions possibles pour éviter d’être en retard au travail ou encore pour pouvoir garder ses enfants, puisque de nombreuses écoles resteront fermées jeudi.
Les salariés peuvent-ils ne pas aller travailler ?
Pascal Caillaud, chercheur au CNRS en droit social à Nantes et membre du collectif Les Surligneurs, indique que les salariés ne peuvent invoquer un cas de force majeure pour ne pas se rendre à leur travail lors de ce mouvement social.
Annoncée depuis plusieurs mois, la mobilisation ne répond pas, en principe, à la définition de la force majeure, qui doit concerner un événement à la fois « imprévisible », « irrésistible » et « échappant au contrôle des personnes concernées ». Par conséquent, le salarié « ne pourra pas se retrancher derrière cet argument pour ne pas venir à son travail et demander à être rémunéré », explique le chargé de recherche.
Cependant, il « ne sera pas considéré comme fautif » de son absence et « ne pourra pas être sanctionné par l’employeur ». Il doit néanmoins informer son employeur et fournir un justificatif, édité par exemple par sa compagnie de transports. Son employeur pourra retenir sur son salaire une somme proportionnelle à la durée de l’absence, sauf en cas de convention ou d’accord collectif plus favorable.
En pratique, des arrangements sont souvent trouvés : « soit le salarié récupère ses heures, soit il pose une journée de congés », indique Me Rocheblave.
Que faire en cas de retard ?
En cas de retard, « le premier des réflexes, c’est de prévenir son employeur », souligne Eric Rocheblave. Les salariés doivent fournir, comme pour une absence, un justificatif. Une partie de leur salaire peut être retenue en proportion du temps de travail manqué, sauf en cas de convention ou d’accord collectif plus favorable.
Il est néanmoins possible « de trouver d’autres moyens de compensation », rappelle Jacqueline Cortès : rattrapage des heures, pose d’une journée de congés…
Un employeur doit-il participer aux frais induits par la grève ?
« Les salariés ont le libre choix de leur domicile », répond Eric Rocheblave. Si un événement rallonge la longueur et le coût du trajet, il appartient généralement au salarié de s’organiser et d’assumer, par exemple, le coût d’une chambre d’hôtel proche de son lieu de travail ou d’une garde d’enfants. Là encore, il est possible de trouver des compromis avec son patron. Un employé peut, par exemple, demander l’autorisation de partir plus tôt de son poste, et de rattraper par la suite les heures de travail manquées.
Lire la suite : Télétravail, retard, absence... quels sont les droits des salariés lors d’un jour de grève ?
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