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Une enseignante, une femme de ménage et un ingénieur racontent ce qui les a poussés à se mobiliser pour la première fois.

Ils ont 25, 43 ou 53 ans. Et ce jeudi 5 décembre ils ont décidé de franchir le pas : ils seront en grève pour la première fois de leur vie, se joignant à la mobilisation nationale contre la réforme des retraites. Chacun, pourtant, est animé par des raisons très différentes.

  • Gaëlle, professeure remplaçante, 25 ans : « Quand j’ai entendu le projet, j’ai eu l’impression que la précarité ne s’arrêterait en fait jamais »

Professeure de français dans l’académie de Créteil, Gaëlle, 25 ans, évoque le « choc supplémentaire » qu’a provoqué en elle la découverte des contours de la réforme qui, en l’état, ferait des enseignants les grands perdants du futur système.

« Je suis jeune et c’est dur de m’imaginer dans quarante ans. Mais quand j’ai entendu le projet, j’ai eu l’impression que la précarité que j’ai connue pendant mes études, et que je connais encore, ne s’arrêterait en fait jamais. C’est terriblement oppressant, on se dit : “A quoi va ressembler ma vie ?” »

Voilà sept ans déjà qu’elle travaille. Sans appui financier de sa famille, elle a accumulé les petits boulots alimentaires pour vivre tout en étudiant. Depuis un an et demi qu’elle est professeur remplaçante (TZR) dans deux lycées, elle continue, une fois par semaine, à faire des inventaires pour compléter ses revenus.

« Sinon, avec un loyer de 600 euros et moins de 1 600 euros de salaire, je ne m’en sors pas. Je suis diplômée, j’exerce le métier que je voulais mais je n’ai pas l’impression que mon quotidien se soit amélioré. Alors quand j’ai vu cette réforme qui dégrade encore notre statut, tout ça s’est mêlé, l’inquiétude m’a saisie, et j’ai décidé de me mettre en grève, sans hésiter. »

  • Manou, femme de ménage et « gilet jaune », 53 ans : « La grève, c’est aussi un moyen de protestation. C’est un tout petit sacrifice comparé à d’autres »

Manou non plus n’a pas hésité. A 53 ans, elle est salariée d’une grande société de nettoyage à Amiens. « Je sais qu’on doit dire autrement maintenant, mais moi je dis ce qui est : je suis femme de ménage. »

Elle travaille dans des banques et des bureaux, mais n’y croise personne. « Je suis là quand les autres ne sont pas là. » Pas de collègue, pas de syndicat pour la convaincre de manifester. « C’est par les “gilets jaunes” que je me suis renseignée. C’est eux qui m’ont ouvert les yeux sur plein de choses », raconte-t-elle. Elle a enfilé son gilet il y a un an maintenant. « Avant je ne me posais pas de question, je regardais BFMTV, je pensais que la France allait bien. Je faisais partie de ceux qui se moquaient en entendant des fonctionnaires se plaindre. »


Lire la suite : Réforme des retraites : pour Gaëlle, Manou ou Pierre, la grève du 5 décembre sera un « baptême »


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