Les blocages des dépôts pétroliers par les entreprises du BTP continuent au lendemain d’une réunion à Bercy

Economie

Le gouvernement a mis lundi sur la table une série de mesures pour répondre à certaines revendications. Sans toutefois revenir sur le cœur de la réforme contestée.

Stop ou encore ? Alors qu’une partie de l’ouest de la France est menacée de panne sèche, les représentants d’entreprises de travaux publics devaient se réunir à Paris et au Mans, dans la soirée de lundi 2 décembre, pour décider de poursuivre ou de lever les blocages des dépôts pétroliers menés depuis jeudi 28 novembre. Un mouvement déclenché pour protester contre la suppression progressive de l’avantage fiscal dont bénéficie le secteur sur le gazole non routier (GNR), à partir du 1er juillet 2020.

Lundi, à l’issue de cinq heures de réunion à Bercy, où une dizaine d’entrepreneurs ont été reçus par le ministre des finances, Bruno Le Maire, le gouvernement a mis sur la table une série de mesures pour répondre à certaines revendications. Mais sans revenir sur le cœur de la réforme : l’alignement des entreprises de travaux publics sur la fiscalité normale du gazole d’ici au 1er janvier 2022, en trois paliers. La perte d’un avantage qui renchérira les coûts des sociétés de 10 %, estime le secteur, dont les marges oscillent souvent entre 2 et 4 %. 

« Nous avons obtenu des avancées significatives mais ne sommes pas satisfaits à 100 %. Nous ne levons donc pas le blocage », commentait François Calvez, patron d’une PME de terrassement et représentant finistérien de la Chambre nationale de l’artisanat des travaux publics et des paysagistes (CNATP), à la sortie du rendez-vous ministériel. Devant les dépôts de Brest, Lorient, La Rochelle et Le Mans, le blocage est donc maintenu jusqu’à nouvel ordre. Dans la nuit de lundi à mardi, des gendarmes sont intervenus sur ordre de la préfecture pour débloquer le dépôt de Vern-sur-Seiche, près de Rennes, et deux personnes ont été placées en garde à vue.

« Faut-il céder sur ce délai, accepter ces propositions et libérer les dépôts pétroliers, ou maintenir une pression et obtenir un délai de cinq ans exigé par de nombreuses entreprises ? », s’interrogeait la CNATP lundi soir. Le gouvernement a cédé à une revendication symbolique du secteur : celle de conserver un colorant dans le carburant, pour décourager les vols sur les chantiers. Mais les propositions visent surtout à limiter les risques de concurrence déloyale de la part d’entreprises agricoles, qui exécutent fréquemment des travaux publics dans les petites communes.

Ces sociétés continueront à bénéficier d’une fiscalité très avantageuse sur le gazole et pourront répondre aux appels d’offres avec des tarifs plus avantageux, moyennant une discrète entorse à la loi. A Brest, l’un des patrons prévient : « Il faut s’attendre à des règlements de comptes à coups de fusil entre professionnels. » L’arsenal suggéré par le gouvernement pour renforcer les contrôles paraît assez difficile à mettre en œuvre selon les professionnels.

Situation très tendue

Sans compromis sur la date d’entrée en vigueur de la réforme, la tentation va être forte pour les protestataires de poursuivre le mouvement. Sur le terrain, la situation est déjà très tendue. Dans l’ex-région Poitou-Charentes, les pompes ont été assaillies par les automobilistes tout le week-end ; certaines étaient déjà à sec. Des professionnels venus de toute la Charente-Maritime, mais aussi des départements voisins des Deux-Sèvres et de la Vendée, bloquent les dépôts pétroliers à Laleu-la Pallice, à La Rochelle.

A Brest, selon Jérôme Cussonneau, le directeur du dépôt pétrolier, le blocage du site empêche, chaque jour, quelque 150 camions de sortir pour livrer 4,5 millions de litres d’hydrocarbures dans les stations-service de la région. Devant les grilles, les manifestants savouraient : « L’annonce d’un blocage provoque l’hystérie. Les gens se ruent à la pompe. Cette panique sert notre mouvement. Une pénurie fait davantage parler de notre action qu’une opération escargot. »

Spectaculaire, le mouvement n’en est pas moins minoritaire. La Fédération nationale des travaux publics (FNTP), qui représente l’essentiel du secteur, ne s’associe pas à ces blocages. Au mois de septembre, la fédération estimait avoir « évité le pire » en obtenant, outre quelques compensations, que la suppression de l’avantage fiscal entre en vigueur de manière échelonnée et puisse être entièrement répercutée sur les donneurs d’ordre, même pour les contrats en cours. Autrement dit, ce sont les collectivités locales qui payeront la facture, estimée par la FNTP à 700 millions d’euros par an pour les travaux publics.


Source : Les blocages des dépôts pétroliers par les entreprises du BTP continuent au lendemain d’une réunion à Bercy


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