Arles (AFP) - Debout au-dessus d'un bac rempli d'eau et de pâte à papier, Benoît Dudognon secoue un tamis en bambou pour former une feuille. Ce geste destiné à façonner le washi, un papier japonais à l'histoire millénaire et aujourd'hui en voie de disparition, l'Arlésien de 37 ans est le seul en Europe à le maîtriser.
Cette technique, le nagashizuki, vieille de plus de 1.300 ans et inscrite au patrimoine immatériel de l'Unesco depuis 2014, produit un papier utilisé pour écrire, imprimer des livres et fabriquer des cloisons coulissantes.
Seules trois communautés la pratiquent encore au Japon, notamment dans le quartier de Misumi-cho à Hamada, dans la région de Shimane (ouest), où Benoît s'est formé auprès de deux maîtres papetiers.
"Ce geste a nécessité six mois d'apprentissage à lui tout seul", raconte sa femme Stéphanie Allard, 42 ans, qui travaille avec lui. "C'est la clé du papier Japon, car il permet de disposer les fibres en longueur, en préservant leur intégrité, ce qu'on ne fait pas pour le papier européen".
Le résultat, après séchage, est un papier doux, lumineux, résistant, qui change de couleur selon son épaisseur, respire avec l'humidité ambiante et dispose d'une longévité exceptionnelle de 400 ans.
Le couple s'est passionné pour ce papier après la fermeture, en 2009, de la papeterie industrielle dans laquelle travaillait Benoît. Grâce à une amie botaniste, ils découvrent que le mûrier à papier utilisé pour le washi pousse aussi en Camargue.
Une fois au Japon, leur formation ne se passe pas sans heurt. Après la catastrophe nucléaire de Fukushima, en 2011, le couple et leurs filles en bas âge sont rapatriés d'urgence . "On est revenus par la suite finir l'apprentissage", raconte Stéphanie.
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