L’enseignement de l’informatique au collège et au lycée est insuffisant, souligne le chercheur Serge Abiteboul, dans une chronique au « Monde ». Pour préparer l’avenir des citoyens, tous les enseignants doivent être formés aux nouvelles technologies.
Chronique « Transformations ». Si le carburant du numérique, ce sont les données, son moteur est l’informatique. Mais notre économie ne peut se limiter à des start-up, aussi brillantes soient-elles. Il faut inventer de nouvelles techniques, de nouveaux usages, pour encourager les entreprises et remplacer des pans entiers de la vieille économie. L’urgence est de réviser complètement toutes les entreprises, mais aussi tous les services publics. Leur organisation doit se transformer.
Qui fera vivre les fleurons de l’industrie, et s’épanouir les PME ? Qui assurera la nécessaire transition numérique de notre économie si les Français restent formés au travail du siècle dernier ? Les dirigeants et les ingénieurs sont pour la plupart en délicatesse avec le numérique. Ils sont bien incapables d’imaginer de nouveaux services numériques, de collaborer avec des informaticiens pour les développer. La transition numérique est d’abord une question de ressources humaines : la formation de tous les employés, de tous les travailleurs, doit être repensée radicalement, pas seulement celle de quelques privilégiés.
C’est à l’éducation nationale de montrer la voie
Pour préparer l’avenir, c’est à l’éducation nationale de montrer la voie. Nous ne manquons pas d’idées sur le sujet ; témoin, par exemple, le rapport « Jules Ferry 3.0 : bâtir une école créative et juste dans un monde numérique » (Conseil national du numérique, 3 octobre 2014), qui décrit l’urgence de transformer radicalement le système. Que faisons-nous de ces recommandations ?
La France, après avoir pas mal barguigné, a introduit l’informatique au collège et au lycée. Mais cela ne va pas suffire. Pour former les citoyens et les salariés de ce nouveau monde, tous les enseignants devraient être formés aux nouvelles technologies. C’est une tâche immense pour l’éducation nationale, qui affronte déjà de nombreux défis. Mais il n’y a pas d’alternative. L’esprit des « fab labs », des « hackathons », la pédagogie par projets sous toutes ses formes peuvent être diffusées massivement dans le système éducatif. Des projets s’appuyant sur le numérique peuvent permettre d’introduire un souffle nouveau dans l’enseignement de toutes les disciplines, en collaboration avec des professeurs déjà en poste qui enseignent l’informatique, et d’informaticiens embauchés en volume pour pallier la pénurie. Au vu des enjeux, les tergiversations pour créer un capes d’informatique sont dérisoires, incompréhensibles.
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