« Un héros va se dresser. » Avec sa saucisse qui bande dur, l’affiche de « Sausage Party » donne le ton. Ce « Toy Story » pour adultes nous raconte la révolte d’une saucisse qui refuse de finir dans l’assiette du consommateur et entraîne avec elle les autres aliments du magasin, dont un pain à hot dog aux courbes irrésistibles, sorte de Betty Boop du rayon épicerie, minaudant et attendant bien sagement que sa saucisse de mari vienne la pénétrer.
Ce qui arrivera dans
Comme si Seth Rogen et Evan Goldberg, les deux scénaristes du film, avaient pris au pied de la lettre l’expression « food porn » qu’on emploie à longueur de tweets, de clichés Instagram et de tableaux Pinterest.
Car pour les amateurs de porno, le porn food, c’est plus qu’une formule. Sur le site du Tag Parfait, le magazine de culture porn, on trouve, par exemple, des articles sur le pornburger, le cronut (mélange de croissant et donut) ou encore la raclette.
Presque du voyeurisme
Pour Clément Arbrun, journaliste au Tag Parfait et aux Inrocks, « le foodporn est indissociable du champ pornographique ». Et c’est pourquoi « sur Le Tag Parfait on peut traiter le foodporn comme on évoquerait un film de la réalisatrice féministe Erika Lust : comme un fantasme, quelque chose de profondément sensuel et émotionnel. Une expérience. »
Il précise que la pornographie se trouve dans le regard de celui qui regarde :
« Quand on lui demande de définir la pornographie, l’essayiste Laurent de Sutter (auteur de “Pornostars : fragments d’une métaphysique du X”) cite Roland Barthes qui, parlant de la dimension érotique de la photographie, disait que “celle-ci réside dans un élément toujours singulier et toujours lié à la biographie du regardeur : le punctum. De même que, pour Marcel Duchamp, c’était le regardeur qui faisait le tableau, on peut dire que c’est le mateur qui fait la pornographie, c’est-à-dire l’excitation dans l’œil de celui qui regarde.”
Tout le foodporn est résumé à travers ces quelques mots. Le foodporn est une pornographie, un “fap” exquis qui éclot de l’imagination du “mateur”, c’est presque du voyeurisme (sur les réseaux, le “foodpornographe” dévoile son repas, dévoile son intimité, ce que ce repas raconte sur sa personnalité, sur ses émotions du moment). Pour reprendre l’expression de Jean-François Rauger (programmateur à la Cinémathèque française), le foodporn c’est “l’œil qui jouit” avant tout. »...
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