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Crèmes solaires : entre protection et danger
L’été est là avec ses beaux jours et ses journées ensoleillées. La température invite à se découvrir et à rester au soleil pour changer la pâleur de la peau. Erreur. Notre peau n’est pas faite pour rester au soleil trop longtemps. Les rayons du soleil présentent un large spectre de longueurs d’onde. Ce spectre contient la lumière ultra-violette (UV), la lumière visible (VIS) qui nous permet de voir et la lumière infrarouge (IR) qui provient des effets thermiques. Plus la longueur d’onde est courte plus elle contient d’énergie et peut donc rentrer plus loin dans la peau.
Intéressons-nous au spectre UV. Il contient les rayons UV-C qui constituent la zone d’énergie la plus élevée du spectre des rayons UV et s’étendent de 100 à 280 nm. Ces rayons sont considérés comme dangereux et sont connus pour causer le plus de dommages à l’ADN humain, mais ils sont actuellement absorbés par la couche d’ozone et ne posent donc pas de problème de santé majeur.
Les rayons UV-B qui s’étendent de 280 à 315 nm sont principalement associés aux brûlures. Bien que l’exposition à court terme à ces rayons provoque des coups de soleil, des périodes d’exposition plus longues sont capables d’augmenter la mélanogénèse et de provoquer une pigmentation, voire un cancer de la peau.
La couleur de notre peau résulte de sa production naturelle de pigments ou mélanine (mélanogenèse). Le bronzage est l’activation de la mélanogenèse par les UV. Environ 1 à 10 % des rayons UV à la surface de la Terre sont des UVB. Comme ces longueurs d’onde sont courtes, elles ne sont capables que d’atteindre l’épiderme et d’endommager l’ADN cellulaire, les protéines et les enzymes qui y sont exposés.
Les rayons UVA ont les longueurs d’onde les plus longues (315-400 nm) et sont capables de pénétrer plus profondément dans le derme. Ces rayons sont généralement connus pour provoquer le photovieillissement de la peau et ont également été associés au cancer. Les UV-A constituent 90 % du rayonnement UV à la surface de la Terre. Les couches externes de la peau reçoivent 18 fois plus d’énergie des UV-A que des UV-B.
Des types de peau différents
Le coup de soleil porte le nom d’érythème. La dose minimale d’érythème (Minimal Erythema Dose en Joules/cm2) est définie comme la dose d’irradiation UVB avec laquelle un érythème cutané minimal est perceptible. La détermination de la MED est une condition sine qua non pour la détermination du facteur de protection solaire ou les tests d’efficacité des produits de protection solaire commerciaux.
La dose minimale d’érythème (MED) est 1000 fois plus élevée pour les UVA que pour les UVB. Il convient de noter que la MED présente des différences inter- et intra-individuelles substantielles. Au moins en ce qui concerne les différences interindividuelles, une part importante de la variation chez les Caucasiens peut être attribuée aux différences dans les types de peau Fitzpatrick (c’est-à-dire que plus le type de peau est élevé, plus la MED est élevée).
L’érythème apparaît chez les individus présentant les types de peau claire de Fitzpatrick II, III et IV principalement. Cette échelle est un système de classification fondé sur la quantité de mélanine présente, la façon dont la peau réagit à l’exposition au soleil et sa tendance à prendre des coups de soleil ou à bronzer. La mélanine détermine la couleur naturelle de la peau ainsi que la façon dont la peau réagit aux rayons ultraviolets (UV) du soleil. L’échelle actuelle classe les peaux de type I à VI. Le type I correspond à une peau qui brûle toujours, tandis que le type VI correspond à une peau qui ne brûle jamais. Plus le type de peau est élevé, plus la MED est grande. La relation entre MED et couleur de peau et âge n’est toujours pas claire. Cependant, Il est considéré qu’il n’y a pas de différence de sexe dans les valeurs de MED.
Les MED ont eu tendance à augmenter avec le type de peau. Cependant, l’échelle de Fitzpatrick des types de peau n’est pas suffisante pour bien distinguer les valeurs. En fait, les valeurs MED pour les UV-A + UV-B, les UV-A et les UV-B séparés se chevauchent pour différents types de peau, de sorte que deux personnes peuvent avoir la même valeur MED, mais appartenir à des types de peau différents.
Comment caluculer le facteur de protection solaire ?
Le facteur de protection solaire (SPF – Solar Protecting Factor) est le rapport entre la dose minimale qui produit un érythème perceptible sur la peau (c’est-à-dire la dose minimale d’érythème (MED)) en présence ou en l’absence de 2 mg/cm2 de crème solaire, en utilisant le rayonnement solaire simulé comme source de lumière.
En d’autres termes, le SPF est la quantité d’énergie solaire (ou de rayonnement UV) nécessaire pour produire un érythème sur une peau protégée par un écran solaire par rapport à la quantité d’énergie solaire (ou de rayonnement UV) nécessaire pour produire un érythème sur une peau non protégée. Ainsi, les chiffres SPF tels que 15, 30 et 60 indiquent 15, 30 ou 60 fois plus d’énergie solaire (en minutes) nécessaire pour produire un érythème sur la peau protégée (par un écran solaire) par rapport à la peau non protégée. Il est important de comprendre que la protection SPF n’est pas linéaire : le SPF 15 bloque 93 % des rayons UVB, le SPF 50 98 % et le SPF 50+ 98 %..
Selon les recommandations européennes concernant les écrans solaires, le SPF minimum indiqué sur l’étiquette doit être de 6 et le maximum de 50+. Le nombre de niveaux de SPF est limité à huit (SPF 6, 10, 15, 20, 25, 30, 50, 50+) pour faciliter la comparaison entre les différents produits sans réduire le choix du consommateur. Leur efficacité doit être indiquée sur l’étiquette en se référant aux catégories suivantes : « faible » (SPF 6 et 10), « moyenne » (SPF 15, 20, et 25), « élevée » (SPF 30 et 50) et « très élevée » (SPF 50+).
Quels filtres solaires dans nos crèmes ?
Pour obtenir une protection à large spectre (c’est-à-dire une protection à la fois contre les rayons UV-A et UV-B), les fabricants utilisent généralement plusieurs filtres UV organiques (UV-A et UV-B), dans les limites des concentrations et des combinaisons autorisées. Les crèmes solaires en contiennent approximativement 15 % de leur masse, le reste étant des émollients, des émulsifiants, ou des plastifiants. 28 filtres sont approuvés par la communauté européenne et 24 sont identifiés sur le marché des crèmes solaires.
Les filtres UV organiques sont également appelés filtres UV « chimiques ». Les exemples de filtres UVB chimiques comprennent les salicylates, les dérivés du camphre, les cinnamates et les dérivés du PABA (p-aminobenzoic acid) tandis que les filtres chimiques UV-A comprennent les anthranilates, les benzophénones et les dibenzoylméthanes. On trouve aussi des Triazines, Salicylates. Ces filtres agissent en absorbant les rayons UV ce qui les excite leurs électrons. Lorsque les électrons retournent à l’état fondamental, une énergie moindre est libérée sous forme de chaleur qui est dispersée dans la peau. Les filtres UV se caractérisent principalement par la valeur de leur pic d’absorption, qui désigne la longueur d’onde de la lumière à laquelle la substance absorbe le plus, et la valeur du coefficient d’absorption molaire au niveau du pic. Ces paramètres sont directement influencés par la structure chimique et déterminent l’étendue de la protection contre les UV. Les filtres UV peuvent donc être classés UV-A, UV-B ou filtres UV à large spectre (UV-A et UV-B).
La première crème solaire disponible dans le commerce n’a été commercialisée qu’en 1935, une création d’Eugène Shueller, fondateur de L’Oréal. Cette crème solaire s’appelait « Ambre Solaire » et contenait du salicylate de benzyle.
Les effets nocifs des écrans solaires
Malgré les effets bénéfiques des écrans solaires contre les effets nocifs des rayons UV, des inquiétudes croissantes se font jour quant à la sécurité et à la toxicité potentielle des produits solaires. Certains des filtres UV couramment utilisés ont des effets néfastes sur les humains et diverses créatures marines.
Les filtres organiques UV ont été détectés dans les écosystèmes d’eau douce et côtiers, dans la faune aquatique, y compris chez les dauphins, les poissons, les mollusques, et les coraux. Ils pénètrent dans l’environnement directement par le lavage de la peau lors d’activités récréatives, ou indirectement par lessivage à partir de décharges ou d’effluents des stations d’épuration, qui ne sont souvent pas en mesure d’éliminer efficacement ces polluants. En fonction des saisons, de l’emplacement, du niveau d’accès du public et des conditions d’échantillonnage, leur détection dans l’eau peut s’avérer difficile, et des conditions d’échantillonnage, leur détection dans l’eau a varié de ng/L au mg/L.
Chez les poissons ces filtres UV réduisent la fertilité, altèrent les fonctions des organes (cerveau, foi, cœur…) Chez l’humain cela peut perturber les activités œstrogènes, de l’utérus et introduire une toxicité potentielle pour le développement et la reproduction avec des perturbateurs endocriniens.
Une enquête a suggéré que les filtres UV de type Benzophenones qui peuvent compter jusqu’à 10 % des ingrédients et d’autres types de filtres UV largement utilisés ces dernières années sont omniprésents dans les échantillons d’urine des enfants, l’eau du robinet et l’eau distillée des bouteilles à Hongkong.
Maintenant que faut-il faire ? Il existe comme solution soit d’utiliser des crèmes solaires entièrement naturelles avec une efficacité moindre, s’exposer moins au soleil ou encore de se protéger avec des vêtements qui ont la même efficacité qu’une crème SFP50+. Un bon vêtement en coton a une absorption dans l’UV comparable à une crème solaire.
Régis Barille, Professeur en physique à l'université d'Angers, Université d'Angers
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.