Bondy (AFP) - De la boue d'Indochine aux nuits froides du djebel algérien, il s'est battu sous le drapeau bleu-blanc-rouge. Cinquante ans après, cet ancien tirailleur sénégalais recevra bientôt la nationalité française. "Mieux vaut tard que jamais", sourit Yoro Diao, 88 ans.
Après des années de bataille administrative, cette reconnaissance à laquelle il "ne croyait plus" a été solennellement promise cette semaine par le président François Hollande.
"C'est une injustice qui est réparée. Au Sénégal tout le monde en parle et aussi à Bamako, à Abidjan...", se félicite M. Diao, une barrette de décorations colorées épinglée sur sa veste grise.
Cet homme mince est le doyen d'un petit groupe d'anciens combattants sénégalais qui viennent de quitter un foyer vétuste pour s'installer dans un local neuf à Bondy, au nord de Paris.
Certains portent une calotte traditionnelle, tous ont sorti cravate et costume pour célébrer la nouvelle, même s'"il ne faut pas danser avant que le tam-tam n'arrive", plaisante l'un d'eux.
Agés de 77 à 88 ans, ils appartiennent à la "dernière génération" d'une longue lignée de combattants africains engagés volontaires ou enrôlés d'autorité dans les rangs de l'armée française. Ils ont été de tous les combats du conflit de 1870 contre la Prusse à la guerre d'Algérie achevée en 1962.
Si les premiers régiments ont été formés au Sénégal, ces "tirailleurs sénégalais" à la célèbre chéchia rouge étaient originaires de toutes les colonies françaises, de l'Afrique de l'ouest et du centre, jusqu'à Madagascar.
"On sait qu'ils étaient plus de 200.000 hommes lors de la Première guerre mondiale, 150.000 pour la Seconde, 60.000 en Indochine?", explique l'historien Julien Fargettas auteur d'un ouvrage consacré à ces "soldats noirs".
Engagé volontaire en 1951, Yoro Diao a servi en Indochine puis en Algérie. Il montre quelques photos jaunies tirées d'une enveloppe kraft. "C'était plus dur en Indochine. On tombait souvent dans des embuscades, j'ai perdu beaucoup de camarades, des Blancs, des Noirs".
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