Un an après le début de la vague #MeToo, des milliers de femmes et d'hommes ont défilé samedi à Paris et dans une cinquantaine de villes de France pour "dire stop aux violences sexistes et sexuelles".
Les organisatrices espéraient un "raz-de-marée féministe". Des dizaines de milliers de femmes mais aussi d'hommes sont descendus dans la rue, samedi 24 novembre, pour réclamer des mesures ambitieuses et des moyens afin de lutter contre les violences sexistes et sexuelles, un an après le début du mouvement #MeToo.
À bonne distance des "Gilets jaunes", les défilés, prévus dans une cinquantaine de villes (Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, Lille, Nantes...), se sont parés de violet, couleur choisie par le collectif féministe #NousToutes.
La carte des marches de samedi
Le cortège parisien est parti vers 14 h 30 du quartier de l'Opéra en direction de la place de la République, à la veille de la journée internationale pour l'élimination des violences à l’égard des femmes. Beaucoup de manifestants arboraient des pancartes "Ras le viol !", réclamant la fin de "l'impunité des agresseurs" et "des moyens financiers suffisants".
"C'est la plus grosse mobilisation (féministe) qu'on ait connue en France", s'est félicitée son instigatrice, Caroline De Haas, annonçant 50 000 personnes dans les rues, dont 30 000 à Paris. L'an dernier, elles et ils avaient été 2 000 à battre le pavé parisien, de source policière. Samedi, la police et les préfectures ont annoncé 12 000 manifestants à Paris entre Opéra et République, 2 400 à Lyon, 1 500 à Marseille, 950 à Rennes, 850 en deux cortèges à Nantes, 600 à Toulouse...
Le président français Emmanuel Macron a réagi dans la soirée sur Twitter :
La secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes Marlène Schiappa a elle aussi "salué" sur Twitter cette "grande manifestation (...) qui doit être vue et entendue". "Comme beaucoup d'autres, je reste mobilisée sans relâche", a-t-elle assuré.
"On veut des droits, pas des roses"
Des personnalités d'horizons divers, parmi lesquelles les comédiennes Muriel Robin, Eva Darlan, Vanessa Demouy et Juliette Arnaud, se sont jointes à la marche parisienne.
À Marseille, plusieurs centaines de personnes ont défilé, pour la plupart avec une touche de violet – foulard, boucles d'oreilles ou maquillage. "Malgré le mouvement #Metoo, dans les quartiers de Marseille, on ne parle toujours pas de ces sujets, c'est pourquoi c'est très important d'être là aujourd'hui", a témoigné Manon Millet, directrice d'un centre social.
Les féministes ont été également plusieurs centaines à battre le pavé dans le centre de Rennes. Parmi elles, une majorité de femmes, mais aussi de nombreux hommes. Pour Tanguy, un étudiant de 19 ans, "c'est un mouvement qui n'a pas de sexe, ce n'est pas un combat des femmes contre les hommes mais un combat des hommes et des femmes, ensemble, contre les inégalités". Des manifestants rennais portaient des pancartes clamant "on veut des droits, pas des roses", "abuse de l'amour, pas des femmes", "facho, macho, ils nous cassent le clito"...
Les manifestations étaient soutenues par de nombreux partis politiques de gauche, dont La France insoumise et le Parti socialiste, et des syndicats – CGT, CFDT et Solidaires.
À Paris, la gent masculine était cependant exclue d'un "petit espace non-mixte" pour rassurer des "femmes victimes de violences diverses qui ne se sentaient pas à l'aise à l'idée de défiler avec des hommes autour d'elles", selon Marion Schaefer, coorganisatrice de #NousToutes. Une initiative critiquée sur les réseaux sociaux, y compris par des militantes féministes.
"Passer du témoignage à l'action"
Né en septembre et appuyé par plusieurs associations, le mouvement #NousToutes entend "passer du témoignage à l'action", un an après #MeToo, qui a fait bondir de 23 % le nombre de cas de violences sexuelles signalées à la police.
En France, en 2016, 123 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-compagnon, soit environ une tous les trois jours. Chaque année, près de 220 000 femmes subissent des violences de la part de leur conjoint ou ex-compagnon, selon des chiffres 2017 officiels. En outre, plus de 250 femmes sont violées chaque jour, et une sur trois a déjà été harcelée ou agressée sexuellement au travail.
Le Parlement a adopté le 1er août dernier un texte sur les violences sexuelles et sexistes, prévoyant notamment la verbalisation du harcèlement de rue et l'allongement de 20 à 30 ans du délai de prescription pour les viols sur mineurs. Il comporte également des mesures contre le cyberharcèlement. Mais le collectif #NousToutes le juge insuffisant pour lutter efficacement contre le phénomène et demande davantage de moyens financiers.