Carles Puigdemont a renoncé à redevenir président de la Catalogne. Jeudi 10 mai, le dirigeant indépendantiste, destitué par le gouvernement espagnol fin octobre 2017, a annoncé depuis Berlin que son groupe présentera dans les prochains jours, devant le Parlement catalan, la candidature à la présidence de Quim Torra, éditeur et ancien président de l’association Omnium cultural. M. Puigdemont se trouve en Allemagne dans l’attente de la résolution du mandat d’arrêt européen émis contre lui par Madrid pour « rébellion ».
Sauf surprise, M. Torra devrait obtenir le vote des 66 députés indépendantistes de droite et de gauche (sur 135) et bénéficier de l’abstention déjà annoncée des quatre députés séparatistes d’extrême gauche, CUP, échouant à être élu dès le premier tour, mais il devrait obtenir la majorité simple en seconde votation.
Près de cinq mois après les élections catalanes du 21 décembre 2017, qui avaient entériné la majorité indépendantiste (en sièges), la voie semble enfin ouverte pour la formation d’un gouvernement régional, condition posée par Madrid pour mettre fin à la mise sous tutelle approuvée par le Sénat espagnol le 27 octobre 2017, à la suite de la déclaration unilatérale d’indépendance de la Catalogne.
Le gouvernement espagnol a réagi en rappelant dans un communiqué laconique que son « obligation est de respecter la loi ». Pour l’exécutif, soucieux d’éviter de nouvelles élections régionales, la possible formation d’un gouvernement en Catalogne, même indépendantiste, est un soulagement.
Pour favoriser ce déblocage, Mariano Rajoy a d’ailleurs renoncé à déposer devant le Tribunal constitutionnel un recours contre le vote par procuration de M. Puigdemont et d’un autre député mis en examen pour « rébellion » et réclamé à la Belgique, Toni Comin, comme l’exigeait la formation « unioniste » Ciudadanos.
Quim Torra, député néophyte de la liste Ensemble pour la Catalogne (JxC), proche de M. Puigdemont, est le premier candidat à l’investiture présenté depuis les élections qui n’est ni en prison ni en « exil » ni poursuivi par la justice.
Tweet anti-espagnols
En janvier et février, le Tribunal constitutionnel espagnol avait empêché la candidature à distance de M. Puigdemont – alors installé en Belgique pour éviter la justice espagnole –, et celle de l’ex-président de l’association indépendantiste ANC, Jordi Sanchez, en détention provisoire pour sédition. En mars, c’était la CUP qui avait empêché l’investiture de l’ancien porte-parole du gouvernement catalan, Jordi Turull, la veille de son placement en détention provisoire : elle exigeait un programme de rupture avec l’Etat.
Ces derniers jours, M. Puigdemont s’était montré décidé à se porter de nouveau candidat. Le 4 mai, le Parlement catalan avait, dans ce but, réformé la loi de présidence pour permettre son investiture à distance. Mais, mercredi, après un recours du gouvernement espagnol, cette loi a été suspendue par le Tribunal constitutionnel, fermant définitivement la porte à sa possible réélection.
La désignation de Quim Torra, un nationaliste radical connu pour ses Tweet anti-espagnols, ne marque cependant pas l’abandon de l’agenda indépendantiste. Dans une allocution diffusée sur Internet, M. Puigdemont, bien décidé à conserver les rênes, a insisté sur le fait que M. Torra devra « défendre le mandat du 1er octobre ». Une référence au référendum illégal, boycotté par les partis constitutionnalistes, qui s’était soldé par 90 % de oui à l’indépendance mais avec seulement 43 % de participation.