Il n’est pas encore roi, mais déjà Mohammed Ben Salman est traité comme tel. Le prince héritier saoudien est arrivé en France, dimanche 8 avril, pour une visite officielle de deux jours, où il sera reçu à l’Elysée, y compris pour un dîner officiel, et rencontrera chefs d’entreprise et investisseurs. Ce séjour parisien conclut un périple en Egypte, au Royaume-Uni puis, pendant trois semaines, aux Etats-Unis, où le futur roi a affirmé sa stature d’homme d’Etat auprès des principaux alliés de son pays. En prenant le risque de partir pour un temps aussi long de Riyad, il montre aussi être désormais suffisamment assuré de son pouvoir.
En France, comme dans ses étapes précédentes, il veut incarner une image plus libérale et moderne de l’Arabie saoudite. C’est aussi sur cela que parie l’Elysée, parlant avant tout de « vision commune » et de « nouveau partenariat stratégique ». « Il est plus facile, en termes d’opinion publique, d’accompagner un jeune prince qui veut faire des réformes », analyse Agnès Levallois, vice-présidente de l’Institut de recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient (Iremmo), en soulignant que « même si on ne sait pas encore ce qu’elles donneront à terme, elles vont en tout cas dans le bon sens ».
Selon la méthode qu’il affectionne, Emmanuel Macron compte jouer – et afficher – une relation personnelle avec MBS. Dimanche soir, ils ont dîné en tête à tête au musée du Louvre, bouclé pour l’occasion. Une rencontre à titre privé annoncée à la dernière minute, alors que le jeune prince démarre lundi la partie officielle de sa visite. Les deux hommes s’étaient déjà rencontrés une première fois, le 9 novembre 2017, lors d’une escale surprise à Riyad du président français, à l’issue de sa visite dans les Emirats. Leur échange de plus de trois heures en pleine nuit, à l’aéroport de la capitale saoudienne, avait été franc, voire tendu, portant notamment sur le sort du premier ministre libanais, Saad Hariri, retenu à Riyad. Emmanuel Macron réussit alors à convaincre son interlocuteur de laisser partir le dirigeant libanais.
L’autre gros morceau fut l’Iran. En substance, le prince héritier saoudien expliquait que Paris devait choisir entre Riyad et Téhéran, et disait clairement ne pas apprécier les tentatives de médiation françaises pour tenter de sauver l’accord sur le nucléaire iranien de juillet 2015 entre les « 5 + 1 » (les membres permanents du Conseil de sécurité plus l’Allemagne) et Téhéran, que les Saoudiens ont toujours rejeté.
Le langage a changé
Le Liban, à la veille des élections, et plus encore l’Iran, seront à nouveau à l’ordre du jour. « MBS » est galvanisé par le soutien du président américain, assurant que « la relation n’a jamais été aussi bonne entre les deux pays ». « Il considère que la présence de Donald Trump à la Maison Blanche représente une chance historique pour les puissances sunnites », souligne Michel Duclos, de l’Institut Montaigne. Paris est certes la capitale européenne la plus ferme vis-à-vis de Téhéran, critiquant notamment son rôle déstabilisateur dans la région et les dangers de son programme balistique. Mais la volonté macronienne de poser la France comme « puissance d’équilibre » s’annonce comme un exercice toujours plus délicat sur fond de tensions régionales croissantes.
La quête de contrats a été longtemps au cœur des relations franco-saoudiennes, mais nombre d’annonces mirifiques ne se sont jamais concrétisées. Le langage a désormais changé. « Les contrats, qu’ils soient civils ou militaires, ne sont pas au centre de la visite », assure l’Elysée, où l’on préfère mettre l’accent sur les nouvelles technologies, les investissements d’avenir, le développement du tourisme, notamment archéologique, sur des sites nabatéens pré-islamiques. « C’est une façon de faire de nécessité vertu », ricane un diplomate de la région. Lors du séjour du prince héritier aux Etats-Unis, l’administration américaine a quant à elle donné son accord à des contrats d’armement pour un montant d’un peu plus d’un milliard de dollars (815 millions d’euros).
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