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Les magistrats financiers considèrent que l’action de la France est insuffisante contre les fraudeurs fiscaux. Plusieurs pistes d’amélioration existent, à commencer par un chiffrage rigoureux.

Saisie en mai par le gouvernement à la suite de la crise des « gilets jaunes », on attendait la Cour des comptes sur un chiffrage de la fraude fiscale : impossible, cependant, de « produire une évaluation robuste dans un délai aussi restreint que celui laissé par la saisine du premier ministre », indique le rapport que son premier président, Didier Migaud, devait rendre public lundi 2 décembre. C’est sur un autre aspect, en revanche, que l’enquête des magistrats financiers risque de provoquer quelques remous : contrairement au discours ambiant, l’Etat, disent-ils, paraît aussi brouillon que négligent dans la lutte contre la fraude fiscale.

Fin octobre, le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, assurait que la loi antifraude votée en 2018 avait permis à l’Etat de récupérer 1,6 milliard d’euros de plus que l’an passé (sur les neuf premiers mois de l’année). Mais la Cour des comptes est perplexe devant une telle affirmation. Entre 2013 et 2018, les sommes recouvrées grâce au contrôle fiscal ont chuté de 22 %, passant de 10 à 7,8 milliards d’euros. Or, cela augmente dans d’autres pays, ce qui « place la France dans une situation singulière ». En 2018, ces sommes étaient 2,5 fois moindres qu’en Allemagne et 2 fois moindres qu’au Royaume-uni. Même « efficacité insuffisante » pour la lutte contre la fraude aux cotisations sociales : leur taux de recouvrement est « très faible », indique le rapport, soulignant que « des pans entiers de cotisations [sont] peu ou pas contrôlés ».

Pourtant, depuis la crise financière de 2008, des progrès ont été accomplis, notamment grâce aux institutions internationales. Les Etats ont amélioré leur coopération. En France, deux lois (en 2013 et en 2018), ont permis de renforcer l’arsenal répressif. Au point, d’ailleurs, que le pays dispose maintenant de « l’un des dispositifs juridiques les plus complets à cet égard ». Mais « l’utilisation de ces outils supplémentaires ne s’est pas encore accompagnée d’une amélioration des résultats du contrôle ».

Un « hiatus » que la Cour explique de multiples manières. Mis à part dans la lutte contre la fraude à la TVA, l’impulsion interministérielle est « modeste ». Ainsi, le comité national de lutte contre la fraude ne se réunit plus et le poste de délégué national à la lutte contre la fraude est vacant depuis le mois de mai. Enfin, différents ministères chargés de la lutte contre la fraude ne coopèrent pas assez entre eux, « alors même que les nouvelles formes de fraude exigent un renforcement de cette coopération ».


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