Si les disparités économiques restent bien inférieures dans les pays du nord de l’Europe, elles progressent plus rapidement qu’ailleurs, y mettant en jeu la cohésion sociale.
Ce sont des enfants sans domicile fixe, avec ou sans parent,qui déménagent au minimum entre sept et huit fois par an, passant d’un foyer à une chambre chez une connaissance ou un à appartement loué au noir. Au dernier recensement, ils étaient 718 à Stockholm, 1 247 à Malmö (extrême sud). En Suède, ils seraient plus de 5 400, selon un rapport de l’ONG Rädda Barnen (Save the Children), publié début 2018.
A première vue, pourtant, tout va bien dans les pays scandinaves. Fidèles à leur réputation, la Suède, le Danemark et la Finlande continuent de se classer en haut des tableaux des pays les moins inégalitaires, avec des revenus moyens bien plus élevés que leurs voisins et une pauvreté absolue en baisse. Mais une comparaison dans le temps dévoile une autre réalité : nulle part ailleurs dans l’Organisation de coopération et de développement économiques, les inégalités de revenus n’ont autant augmenté que dans le nord de l’Europe depuis les années 1980.
La Suède arrive en tête. Dans le royaume de 10 millions d’habitants, les riches sont de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres.L’indice de Gini – utilisé sur une échelle de 0 à 1 pour mesurer l’inégalité des revenus d’une population – est ainsi passé de 0,226, en 1991, à 0,320, en 2016 : un record.
Le système de redistribution s’est grippé
Et alors que 50 % des Suédois les moins riches disposaient de 32 % du revenu disponible total en 2005, selon l’Office des statistiques, ils n’en perçoivent plus que 29 %, tandis que la part des 10 % les plus riches est passée de 24 % à 27 %. « On peut y voir une convergence avec le reste de l’Europe, de la part de pays qui se distinguaient, jusque-là, par leur niveau très élevé d’égalité », observe l’économiste Jesper Roine.
Selon ce professeur à la Stockholm School of Economics, ce serait toutefois manquer les spécificités régionales : « Alors qu’ailleurs, la hausse des inégalités est essentiellement le résultat de la mondialisation de l’économie et des progrès technologiques, ce n’est paradoxalement pas le cas en Scandinavie. » Pour preuve : l’échelle des salaires y reste resserrée. « En ce sens, le modèle scandinave a fonctionné », remarque Jesper Roine.
Toutefois, ces dernières décennies, le système de redistribution, qui faisait la fierté des social-démocraties du nord de l’Europe, s’est grippé. D’un côté, les revenus du capital se sont envolés et concentrés entre les mains d’un petit groupe. De l’autre, les transferts sociaux sont restés à la traîne, pénalisés par des politiques fiscales taxant moinsles revenus du travail et du capital. capital.
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