Les images des violences ont quelque chose de politiquement insaisissable. Mais elles font penser à des scènes émeutières des anciennes révolutions ou de Mai 68.
Si l’histoire ne repasse pas les plats, elle a, du moins, une sacrée dose d’ironie. Il y a pile un an, Emmanuel Macron laissait entendre qu’il souhaitait commémorer les événements de Mai 68. Soutenu par plusieurs figures du mouvement étudiant cinquantenaire, comme Daniel Cohn-Bendit, Romain Goupil ou encore Roland Castro, le chef de l’Etat a longuement hésité à rendre hommage à ces événements fondateurs dans l’histoire sociale française. Pour finalement renoncer. Un an après, la mobilisation des « gilets jaunes » et la journée d’affrontements du 1er décembre en plein Paris font resurgir la possibilité d’une longue et violente contestation du pouvoir, comme il y a un demi-siècle.
Les images des violences qui ont émaillé la troisième journée de mobilisation des « gilets jaunes » ont quelque chose de politiquement insaisissable. Comment expliquer que des militants d’extrême droite, d’extrême gauche et non politisés se retrouvent ensemble, alors que tout montre qu’ils sont antagonistes ? Quel peut être le ciment d’une telle « convergence de l’émeute » ? L’entente, d’ailleurs, ne fut pas cordiale : Yvan Benedetti, ancien leader de l’Œuvre française, groupuscule pétainiste et antisémite dissous après la mort de Clément Méric en 2013, s’est fait molester lors de la manifestation.
Il faut alors renverser la perspective d’analyse. Ne pas se demander pour quoi une telle convergence existe, mais contre quoi. La réponse semble évidente : Emmanuel Macron « et son monde », ses réformes, la philosophie politique et économique qui les sous-tend.
Des airs de 24 mai 68
Difficile de trouver, dans l’histoire récente, un point de comparaison qui puisse expliquer ce phénomène. Le plus proche pourrait tout de même bien être la nuit du 24 au 25 mai 1968. Une nuit d’émeutes, de violences (qui fit deux morts) où les groupuscules gauchistes et le service d’ordre furent totalement dépassés par des manifestants « enragés », des révolutionnaires sans révolution. D’ailleurs, on remarque souvent, dans les manifestations, des références à Mai 68 mais aussi à 1789, avec les drapeaux tricolores et la Marseillaise.
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