L'affaire Fillon prend une nouvelle dimension. Trois juges d'instruction vont désormais enquêter sur ce dossier portant sur une kyrielle de délits financiers présumés. Le tout en pleine campagne électorale.
Un coup de tonnerre dans un ciel déjà passablement obscurci. Comme nous l'annoncions, le parquet national financier (PNF) a ouvert hier soir une information judiciaire dans l'affaire des emplois présumés fictifs du couple Fillon et de leurs enfants. Les salaires litigieux perçus (entre 1988 et 2013) par l'épouse de François Fillon, sa fille Marie et son fils Charles, essentiellement en tant qu'assistants parlementaires, dépasseraient le million d'euros brut. L'enquête change donc de cadre procédural mais aussi de braquet. Elle ne porte plus seulement sur d'éventuels détournements de fonds publics et abus de biens sociaux. Elle s'élargit à un possible trafic d'influence, sans compter des manquements aux obligations de déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. A deux mois seulement du premier tour de l'élection présidentielle, tout s'accélère pour le candidat de la droite.
Jusqu'à présent, le PNF dirigeait lui-même les investigations, avec l'appui des policiers de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) et cela dans le cadre d'une enquête préliminaire. Une procédure qui permet perquisitions et auditions, mais n'autorise pas la défense à avoir accès aux pièces du dossier. Le PNF a finalement choisi d'ouvrir une information judiciaire, ce qui implique la désignation de juges d'instruction. Trois magistrats indépendants vont enquêter, avec plus de moyens. Ce qui change tout. D'un point de vue procédural, bien sûr, mais aussi politique.
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La voie est désormais ouverte à une convocation de François Fillon, en tant que témoin assisté ou pour une mise examen, sans que cette échéance soit fixée. Or, lorsque l'affaire a éclaté dans « le Canard enchaîné », le candidat LR à l'élection présidentielle, protestant de sa bonne foi, a déclaré qu'il se retirerait s'il venait à être poursuivi. Parole imprudente même s'il a, depuis, rectifié le tir. « J'irai jusqu'au bout », confiait-il la semaine dernière, s'en remettant « au seul jugement du suffrage universel ».
Pourquoi un tel changement de stratégie de la part du PNF ? « Aucun élément nouveau n'est apparu dans l'enquête », s'étonne un bon connaisseur du dossier. Preuve en est que, le 15 février, lorsque les policiers spécialisés ont transmis la totalité de leur procédure aux magistrats, ces derniers ont choisi de poursuivre leur enquête préliminaire....
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