Le président de la Cour suprême du Pérou a présenté sa démission, jeudi 19 juillet, à cause d'une affaire de trafic d'influence qui ébranle l'appareil judiciaire du pays, poussant des milliers de Péruviens à descendre dans la rue.
Aux cris de "Dégagez tous les corrompus", "Stop la corruption ! Notre honte nationale", des milliers de Péruviens se sont rassemblés jeudi 19 juillet dans les rues de Lima et de plusieurs villes du Pérou pour réclamer des réformes anti-corruption, après la démission dans la journée du président de la Cour suprême, Duberli Rodriguez, en raison d'une affaire de trafic d'influence.
Le scandale a éclaté voici au début du mois de juillet, lorsque le site d'investigation IDL-Reporteros a commencé à diffuser des enregistrements audio de conversations téléphoniques dans lesquelles des magistrats semblaient discuter de projets d'échange de faveurs, d'aide à des criminels reconnus coupables, et évoquaient l'idée d'accorder des fonctions à des amis.
Des enregistrements compromettants dans une affaire de pédophilie
Duberli Rodriguez, qui n'est pas personnellement visé, a annoncé dans une lettre diffusée sur Twitter qu'il démissionnait de ses fonctions de chef de la Cour suprême et de président du système judiciaire "en raison de la crise institutionnelle que traverse la justice". Dans l’un des enregistrements, on entend l’ex-juge de la Cour suprême César Hinostroza, encore en fonction à l’époque, évoquer le procès du violeur d'une fillette de 11 ans. "Que voulez-vous, qu'on réduise sa peine ou qu'on le déclare innocent ?", propose-t-il à son interlocuteur.
Quelques heures avant la démission de Dubertli Rodriguez, jeudi, c’est un autre magistrat, Orlando Velasquez, à la tête du Conseil national de la magistrature et chargé de nommer et de superviser les juges et les procureurs, qui a lui aussi démissionné, tout comme deux autres membres de ce conseil, en lien avec la même affaire. Orlando Velasquez, qui a quitté son poste trois jours seulement après son entrée en fonction, a nié toute malversation, lors d'une conférence de presse tenue jeudi, et s'est dit injustement mis en cause.
Le scandale éclabousse jusqu’au gouvernement
La polémique n’a pas épargné non plus le gouvernement péruvien. Le président Martin Vizcarra, a quant à lui limogé son ministre de la Justice, Salvador Heresi, vendredi 13 juillet, après publication par une chaîne de télévision péruvienne de l'enregistrement d'une conversation téléphonique entre le ministre et un magistrat sous enquête pour trafic d'influence.
"Le problème de la corruption ne se pose pas seulement au niveau des magistrats. Nous avons besoin d'un véritable changement de notre système judiciaire et politique", réclamait Jorge Rodriguez, un étudiant de 31 ans qui a participé à la manifestation de jeudi à Lima. D’autres protestations ont eu lieu dans les villes de Cuzco, de Tacna et d'Iquitos, selon les médias péruviens.
La tourmente dans laquelle se trouve l'appareil judiciaire est un nouveau coup porté à la confiance des Péruviens dans leurs institutions publiques, après l'affaire de corruption qui a éclaté fin 2017 et a entraîné la démission en mars du président d'alors, Pedro Pablo Kuczynski.