Pas opposée à l'idée de taxer les revenus des géants de la Tech, l'Allemagne souhaite attendre que les discussions avancent à ce sujet au niveau mondial avant de se positionner au niveau européen. Le ministre des Finances d'outre-Rhin souhaiterait, aussi, pouvoir faire adopter des mesures d'exclusion protégeant les groupes automobiles de son pays.
En mars dernier, Bruno Le Maire — ministre français de l'Économie — annonçait qu'une taxe européenne de 2 à 6 % sur les revenus des grands groupes high-tech serait rapidement votée à Bruxelles. Quelques jours plus tard, la Commission européenne confirmait ce projet de taxation, partant sur une base de 3 % et visant les entreprises du numérique dont le chiffre d'affaires mondial dépasse les 750 millions d'euros annuels. Seulement, alors que la pression fiscale mise sur ces entreprises reines de l'optimisation s'accentue un peu partout dans le monde, c'est le calme plat en Europe depuis plusieurs mois. Il était donc temps que le débat refasse surface, relancé la semaine dernière par les déclarations du ministre britannique des Finances — Philip Hammond — qui a évoqué la mise en place au Royaume-Uni d'une taxe à 2 % visant ces sociétés d'ici à 2020, à moins qu'une règle internationale ne voie le jour entre-temps.
Un thème également abordé par les ministres européens dans le cadre de la dernière réunion de l'ecofon, le Conseil des affaires économiques et financières qui réunit les ministres des 27 États membres. À cette occasion, Olaf Scholz — ministre allemand des Finances — a déclaré être favorable à la mise en place d'une taxe européenne sur les GAFA si, et uniquement si, aucun accord mondial n'est conclu d'ici à l'été 2020. Ce n'est pas tout, il souhaite également que le champ d'application de cette hypothétique taxe soit réduit, notamment pour qu'en soient exonérés les activités de "commercialisation des données" et celles touchant à "l'Internet des objets" (et ce, afin de protéger de grands groupes industriels allemands, comme ceux du secteur automobile).
La France demande un accord de principe
Une position allemande qui met le ministre français de l'Économie, Bruno Le Maire, dans l'embarras. En effet, désireuse de pousser l'adoption de cette taxe au niveau européen, la France ne peut pas se passer du soutien de son voisin allemand. Alors, le ministre français se dit prêt à repousser à la fin de l'année 2020 l'entrée en vigueur d'une telle taxe, mais demande en échange à ce qu'un accord de principe soit trouvé avant la fin de l'année. Pourquoi ? Tout simplement parce que sans cet accord de principe, les pays de l'Union européenne pourraient commencer à légiférer chacun de leur côté sur le sujet. Ce serait, selon Bruno Le Maire, un "échec politique" autant qu'un affaiblissement du concept de marché unique, si l'on en croit ses propos rapportés par BFM Business. Il faut dire qu'il n'y a pas que le Royaume-Uni qui réfléchit à faire cavalier seul dans la taxation des GAFA : l'Espagne et l'Italie ont déjà, eux aussi, présenté de tels projets de loi. Reste donc à savoir également comment avanceront les discussions au niveau de l'OCDE pour que soit trouvé un accord mondial de taxation des revenus des GAFA.
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