Le compromis budgétaire négocié par le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, s’est heurté, jeudi 8 février, à la résistance opposée par un élu à la fois de son camp et de son propre Etat, le Kentucky, Rand Paul. Rompu aux marathons déclamatoires, ce dernier n’a pas battu jeudi son record de durée. Mais il a occupé le terrain assez longtemps pour empêcher un vote par les sénateurs.
Faute d’un vote du Congrès, le président Donald Trump s’est retrouvé dans l’incapacité de signer une loi de finances avant les douze coups de minuit fatidiques, synonymes de fermeture (shutdown) du gouvernement fédéral, faute de moyens.
Ce gel devait se traduire dès vendredi matin, pour une durée indéterminée, par la mise au chômage technique sans salaire de plus de 850 000 employés fédéraux considérés comme « non essentiels » au fonctionnement de l’administration. Les activités de nombreuses agences fédérales, comme les services fiscaux, ceux des parcs nationaux, ou la délivrance de passeports, devaient être affectées, au contraire des services de sécurité. Lors de ces épisodes, les militaires américains poursuivent leurs opérations, mais sans toucher leur solde.
Un premier shutdown provoqué par les sénateurs démocrates, du 20 au 22 janvier, avait été suspendu après le vote d’une rallonge budgétaire épuisée jeudi soir.
Obstruction parlementaire
Libertarien convaincu, Rand Paul s’est déjà fait un nom en bloquant au Congrès par des manœuvres classiques d’obstruction parlementaire (le « filibuster ») des textes jugés attentatoires aux libertés individuelles. Ce partisan d’un Etat fédéral réduit à sa plus simple expression s’est lancé en milieu d’après-midi dans un réquisitoire impitoyable d’un accord qui doit, en toute logique, creuser considérablement le déficit fédéral.
Dans sa longue intervention, Rand Paul s’est fait un devoir de placer ses collègues républicains face à leurs contradictions. L’accord budgétaire conclu par M. McConnell avec le chef de la minorité démocrate, Chuck Schumer (New York), comporte une forte hausse des crédits militaires et non-militaires, ainsi que des fonds pour les Etats victimes de catastrophes climatiques. Il devrait alourdir le déficit fédéral de plus de 300 milliards de dollars (245 milliards d’euros) en deux ans, alors que les recettes futures seront réduites, du fait des baisses d’impôts votées en décembre 2017.
« Vous étiez contre les déficits Obama et vous êtes aujourd’hui pour les déficits républicains, c’est une parfaite définition de l’hypocrisie », a-t-il ironisé à l’attention de la majorité de ses collègues. « Quand les démocrates sont au pouvoir, les républicains se comportent comme des conservateurs, mais quand ce sont les républicains qui le sont, il semble qu’il n’y a plus de parti conservateur », a-t-il déploré.fet que les deux grands partis américains sont l’un comme l’autre traversés par de profondes divisions.
Lire la suite : L'administration Trump confrontée à un nouveau « shutdown » - Le Monde