Pour son président, le Forum de Paris sur la paix doit défendre le multilatéralisme dans un contexte international tendu.
Président du Forum de Paris sur la paix, Justin Vaïsse, 45 ans, est historien et préside depuis 2013 le Centre d’analyse, de prévision et de stratégie du ministère des affaires étrangères. Il revient pour Le Monde sur les commémorations du 11-Novembre et sur les missions du forum, qui se tiendra dans la Grande Halle de La Villette, à Paris.
Que signifient ces commémorations ?
Nous allons commémorer un armistice dont le souvenir est ambigu : les armes se taisent sur le front occidental mais le règlement de Versailles inaugure une paix bancale qui dure à peine vingt ans. La Société des nations [SDN], amputée du soutien de l’Amérique, ne parvient pas, dans les années 1930, à réagir aux agressions des régimes autoritaires.
Nous ne revivons certes pas la même histoire, mais les résonances avec les années 1930 sont troublantes, et je crois que le président Macron y est sensible : à la suite d’une crise économique, les frontières se ferment, les guerres commerciales et monétaires menacent, migrants et réfugiés mettent les sociétés politiques sous tension, etc. Surtout, un cercle vicieux s’établit entre la montée des mouvements populistes et nationalistes d’un côté et la crise de la gouvernance mondiale de l’autre. Chacun pense qu’il s’en tirera mieux tout seul, en consolidant sa souveraineté. Mais ni le climat, ni Internet, ni les entreprises multinationales, ni les migrants ne connaissent de frontières.
C’est donc une illusion, mais qui a pour effet d’accentuer en retour l’impuissance de nos institutions et règles collectives. La conscience de ces périls explique aussi pourquoi tant de chefs d’Etat, de gouvernement et d’organisation internationale viennent le 11-Novembre, à Paris, et pourquoi ils participeront au Forum de Paris sur la paix, qui se tiendra dans la Grande Halle de La Villette.
Le traité de Versailles ne portait-il pas en germe cet échec ?
Sans aucun doute : « Une...
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