Il faut élargir les partenariats écoles-entreprises au-delà des intérêts immédiats de ces dernières pour combattre la pénurie de compétences, plaide dans une tribune au « Monde » David Chassan, cadre dirigeant d’une filiale de Dassault Systèmes.
Tribune. Le besoin croissant de maîtriser ce qui est devenu le nerf de la guerre pour les entreprises, à savoir leurs informations numériques et toute la data qui en découle, crée une pénurie sans précédent sur le marché de l’emploi dans la technologie. Surtout, de nouveaux domaines apparaissent continuellement (blockchain, cloud, machine learning, intelligence artificielle, etc.), qui nécessitent de mettre en face les compétences adéquates. Surtout, ces vagues technologiques successives rendent les compétences des collaborateurs et celles des futurs collaborateurs très rapidement obsolètes.
La participation active à la formation des futurs talents français doit s’inscrire dans une réelle dimension sociale et éducative
Si l’Etat semble avoir pris conscience du problème, en initiant notamment la récente réforme de l’enseignement secondaire, qui intègre un cursus autour des sciences de l’ingénieur, du numérique et des sciences informatiques, on sent bien que la réponse n’est pas à la hauteur des enjeux. Il faut aller beaucoup plus loin. Et c’est là que les entreprises de technologie ont un rôle à jouer. A elles de prendre leurs responsabilités et les devants pour ne pas laisser l’éducation nationale seule face à un défi majeur qui les concerne directement.
De plus en plus d’entreprises se saisissent du sujet en formalisant des partenariats avec de grandes écoles pour prodiguer des enseignements concrets, pour organiser des conférences ou des cours d’initiation aux technologies émergentes. L’idée est de compléter l’enseignement professoral par une expertise technique et métier plus opérationnelle.
Incitation fiscale
Si une telle démarche, qui représente un investissement en termes de ressources humaines et de moyens financiers, peut être saluée, elle n’en présente pas moins un écueil de taille, sur lequel l’Etat doit rester très vigilant. Pour prendre tout son sens, cette participation active à la formation des futurs talents français doit s’inscrire dans une réelle dimension sociale et éducative. Or, la majorité des entreprises qui l’entreprend le fait dans l’optique de se faire connaître des étudiants.
Ainsi, plutôt que de délivrer un enseignement agnostique, elles les forment à leurs propres méthodes et outils et, de fait, les enferment dans une doctrine technologique qui ne profite au final qu’à elles-mêmes, et nullement à notre économie. Les écoles sont demandeuses mais, dans la précipitation, se laissent séduire par des entreprises peu scrupuleuses.
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