Sur YouTube, Laurent est tombé sous le charme d’un mec se filmant en train de fumer. Huit ans après, il a découvert l’étrange monde de la « smoking room ».
L’extraordinaire d’Internet est de documenter les passions, toutes les passions. Il y a les communes et les singulières, qui se hiérarchisent en catégories et sous-catégories comme s’emboîtent les poupées russes.
Prenons le porno. Il existe la catégorie « webcam », on peut affiner la recherche pour trouver des cams gays, puis des cams gays cuirs où la peau morte est célébrée. Au bout de ce bout se terrent les fétichismes de niche, comme la cam gay « domination financière » (oui) ou, celle qui nous intéresse dans cet article, la cam gay « smoking room » (« fumoir » en français).
A la rédaction de Rue89, on a découvert ce type de cams grâce à Laurent (son prénom a été changé), Parisien d’une cinquantaine d’années. Lui a « une sexualité exclusivement homosexuelle » et, d’ordinaire, il n’est pas amateur de cams :
« Regarder un mec qui se branle et le payer pour qu’il fasse des choses que je lui demande ? Non merci. C’est une sorte de “Peep show” amélioré, sans réelle interaction avec la personne. Et disons que mes fantasmes ne vont pas jusqu’à la prostitution. »
Ces derniers mois, néanmoins, Laurent s’est fait happé par la cam « smoking room », un lieu à la croisée des « Hysterical Literature » et de l’ASMR, où les mecs... fument.
A lui de vous raconter.
L’homme qui se filmait fumant
Il y a huit ans, alors que je circule sur YouTube, comme il nous arrive à tous de le faire, la vignette d’une vidéo attire mon regard. J’y vois, en miniature, un mec, une cigarette à la bouche. Je le trouve très joli. Je clique sur la vidéo et je découvre une sorte de petit court-métrage, à plan fixe, au cours duquel le mec fume. C’est tout, il fume. La vidéo est assez courte : elle débute quand il allume sa cigarette et s’arrête quand il éteint son mégot.
Je suis intrigué, je clique sur sa chaîne YouTube et regarde ce qu’il a en magasin. Je découvre des dizaines d’autres vidéos similaires. Je me dis « c’est un artiste conceptuel » et puisqu’il me plaît beaucoup, je m’abonne à sa chaîne. Je n’ose pas le contacter : c’est un youtubeur. Il appartient à un monde, public, qui m’est complètement étranger.
Je reçois trois ou quatre vidéos de lui par semaine. C’est sensiblement la même chose. Parfois, il invite une autre personne – toujours un homme – à fumer. Il y a une espèce de jeu entre eux, ils s’échangent la fumée de leurs cigarettes respectives, de bouche en bouche. C’est à ce moment que je découvre qu’il est gay.
« Je le connais »
Séduit, je suis un observateur un peu distrait. Au bout de six mois, je remarque que l’un de ses bras a tendance à bouger. C’est presque imperceptible car le mec se filme en plan poitrine [l’image s’arrête sur son ventre, ndlr]. Là, je comprends.
Il se branle en fumant une cigarette face caméra. Mais on est sur YouTube : tu ne verras jamais sa bite et tu le verras encore moins jouir. Pris d’affection pour ce mec, je reste abonné à sa chaîne, même s’il devient trop cuir à mon goût. Un peu frelaté.
L’été dernier, en 2016, je reçois un amant chez moi, Vincent [son prénom a aussi été changé, ndlr]. Il est à côté de moi quand la « star de YouTube » – c’est comme ça que j’appelle le youtubeur – sort une nouvelle vidéo. Je la lance à peine que Vincent me dit : « Je le connais »...
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