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Les anciens rocardiens si proches dans leur jeunesse sont devenus rivaux, jusqu’à s’opposer aux européennes.

Sur la photo de groupe, Alain Bauer, Manuel Valls et Stéphane Fouks entourent Michel Rocard, sûrs d’eux et tout sourire. On est en septembre 1986 à la station de ski des Arcs, en Savoie, et le cliché immortalise la première génération Rocard. De la seconde en devenir, on n’aperçoit que Benoît Hamon, marchant sur le côté, l’air timide et mal fagoté. Olivier Faure, lui, n’est pas visible, encore dans l’ombre des grands frères.

A l’époque, les deux responsables qui s’affrontent désormais au sein de la gauche française étaient des étudiants fraîchement débarqués aux clubs Forum, la pépinière des jeunes rocardiens. Des petits provinciaux, issus de la classe moyenne catholique, nés à Brest pour Hamon ou Orléans pour Faure. Le futur premier secrétaire du PS a découvert la politique au lycée, le patron de Génération.s à la fac, mais les deux font leur baptême du feu dans les assemblées générales du mouvement étudiant contre la loi Devaquet à l’automne 1986. Chacun monte son réseau Forum dans sa fédération.

Les deux étudiantsse retrouvent quatre ans plus tard dans une première colocation à Maisons-Alfort, quartier des Juilliottes, puis une seconde rue Lafayette, dans le 9e arrondissement de Paris, avec leur copain Christophe Clergeau, aujourd’hui conseiller régional socialiste des Pays de la Loire. « C’était un bordel sans nom dans un appartement à l’esthétique calamiteuse, avec son mobilier de récup', mais c’était sympa », se souvient Benoît Hamon. « On appelait ça nos phalanstères, dont la composition changeait au gré des copains et des copines des uns et des autres », raconte Emmanuel Couet, un autre Breton devenu président de Rennes métropole.

« Les péquenauds »

Au début des années 1990, ces jeunes socialistes encore insouciants font l’apprentissage de la vie politique parisienne. « On était les péquenauds aux yeux des bien-nés parisiens. On n’avait pas les codes, on ne connaissait ni les lieux du pouvoir ni leurs références. L’impression de faire irruption dans un monde étranger a créé entre nous une solidarité particulière », explique Christophe Clergeau. La bande va prendre le relais des aînés Valls et Fouks aux clubs Forum, puis s’investir dans l’UNEF et le Mouvement des jeunes socialistes (MJS), alors moribond.

Tous croient alors au destin national de Michel Rocard, premier ministre, seul capable à leurs yeux de renouveler la gauche après Mitterrand. Mais le duo Hamon-Faure ne fait pas le même choix : le premier prend la tête du MJS et se constitue une bande fusionnelle qui le suivra dans toutes ses aventures de courants, tandis que le second, dans l’ombre de Clergeau, fait le pari du parti. La coloc se défait, leurs destins s’écartent peu à peu.


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