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Les pleins pouvoirs dont dispose le président, qui va être en mesure de faire passer des réformes non débattues et non négociées, doivent nous alerter sur les risques d’une dérive despotique, analyse Guy Sorman, écrivain et essayiste, dans une tribune au « Monde ».

 

TRIBUNE. Le macronisme est l’avatar d’une passion française : le despotisme éclairé, de Bonaparte à de Gaulle, la quête du sauveur. Les origines sont anciennes. On pense à Voltaire. Dans l’esprit des Lumières, lui se méfiait du peuple et n’envisageait de remplacer la monarchie absolue que par un roi philosophe. Son modèle, mythique évidemment, était l’empereur de Chine qu’il supposait sage, entouré d’une administration mandarinale censément lettrée et recrutée sur son mérite : nos futurs énarques.

Il y avait bien Montesquieu qui se méfiait de toute autorité et devait formaliser le principe de séparation des pouvoirs. Mais Montesquieu fut exporté aux Etats-Unis, leur Constitution de 1789, immuable, en témoigne.

Tandis que nous, Français, héritions de la Convention, tous pouvoirs confondus. Le scepticisme démocratique et l’indifférence à la concentration des pouvoirs sont les marqueurs de notre histoire longue : loin de s’en inquiéter, le peuple et les commentateurs se réjouissent de l’unité de la décision politique. Comme si celle-ci était garantie d’efficacité heureuse. Napoléon et le code civil, n’est-ce pas ? Mais aussi Napoléon et la guerre perpétuelle. De Gaulle et la décolonisation. Mais aussi Mai-68, comme témoignage de l’incapacité gaulliste à épouser son temps.

Lorsque, chez nous, les pouvoirs se distinguent, plutôt par hasard que par la Constitution, on hurle au gouvernement des juges ; et quand un président et un Parlement, d’appartenances distinctes, cohabitent, on regrette cette atteinte à l’esprit despotique de la Ve République.

Socialement désastreux

Emmanuel Macron, qui estime les Français monarchiques dans leur âme, hérite de cette histoire au bilan mitigé. Despote que l’on suppose éclairé, mais au fond nous n’en savons rien : les pleins pouvoirs de Macron lui permettraient – dit-on – de faire passer des réformes indispensables qu’un Parlement moins servile lui aurait refusées.

Admettons...


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