Ils sondaient l'angle d'un ancien bâtiment de l'abbaye de Cluny quand ils sont tombés sur un trésor médiéval: plus de 2000 pièces du XIIe siècle. Soit une découverte «rare», selon des chercheurs de l'Université Lyon-II et le CNRS. Quelques semaines plus tard, les résultats nous sont dévoilés.
Retour à la mi-septembre, où l'équipe d'Anne Baud, enseignant-chercheur à Lyon-II et d'Anne Flammin, ingénieure au CNRS, creuse à la pelle mécanique pour reconnaître l'angle de l'ancienne infirmerie de l'abbaye. Soudain, des pièces commencent à tomber au fond du sondage.
«On pensait que c'était du bronze au début puis on a remarqué que c'était une monnaie. Ensuite on a vu un amas, un lot entier de monnaies, il y en avait énormément», a raconté Clarisse Couderc, étudiante en master 2 qui participait à la fouille, en marge d'une conférence de presse à Lyon. «La chance d'une vie» pour cette future archéologue, qui ne tarde pas à découvrir l'ampleur du trésor.
Plus de 2200 deniers et obole en argent, en majorité émises par l'abbaye de Cluny, ainsi que 21 dinars musulmans en or enfermés dans une peau tannée, étaient regroupés dans un sac en toile. Il renfermait également une «parole de salutation dans un contexte religieux», une feuille d'or repliée de 24 grammes, une piécette en or et surtout une bague sigillaire en or marquée «Avete», objet le plus précieux de ce trésor. Comme les pièces, cet anneau daterait du XIIe siècle, mais est serti d'une intaille représentant un dieu ou un empereur antique qui remonte à l'Empire romain.
Selon le CNRS, les dinars ont quant à eux été frappés entre 1121 et 1131 en Espagne et au Maroc, dans des espaces contrôlés par la dynastie berbère des Almoravides. Pour le spécialiste des monnaies Vincent Borrel, leur présence s'explique notamment par l'existence en Espagne de prieurés clunysiens. Elle pourrait témoigner d'échanges entre l'ordre de Cluny avec des Andalous, ou d'un don direct des Rois Catholiques d'Espagne. Des possibilités envisageables quand l'on sait que Cluny était l'un des monastères les plus influents du Moyen Âge, au centre d'un large réseau d'échanges.
Une valeur oscillant entre «trois et huit chevaux»
Le délégué régional du CNRS Frédéric Faure s'est félicité de cette «découverte impressionnante tant scientifiquement que pour le grand public».
«Ce qui est assez rare, c'est que c'est un trésor de la première moitié du XIIe siècle, très homogène, nous l'avons dans sa globalité, nous avons ses contenants même s'ils subsistent à l'état de vestiges et nous savons où nous sommes dans l'abbaye, ça ouvre des perspectives énormes de recherche», s'est réjoui Anne Baud.
À qui appartenait-il? «Les hypothèses sont les plus raisonnables et les plus folles», a-t-elle répondu. «On entrevoit une petite histoire: celle d'un religieux qui a enfoui son pécule pour le cacher», a précisé Mme Flammin.